Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le 25 novembre 1960, les soeurs Patricia, Minerva et Maria Teresa Mirabal, opposantes à la dictature de Rafael Trujillo en République dominicaine, étaient assassinées.
C'est pour commémorer cet événement, symbole de la résistance à l'oppression politique et sociale d'un peuple tout entier, et plus particulièrement des femmes, que l'Assemblée générale de l'ONU a adopté, le 17 décembre 1999, une résolution faisant du 25 novembre la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes.
Il s'agit aujourd'hui de lutter contre toutes les formes de violences dont les femmes font l'objet - violences physiques, psychologiques et sexuelles -, exercées tant dans la sphère publique que dans la sphère privée. Les femmes sont également victimes de la violence sur leur lieu de travail, de façon beaucoup plus fréquente qu'on ne le soupçonne ; cette violence peut aller de la plaisanterie douteuse au viol.
Certes, au cours des dernières années, notre pays a fait des progrès indéniables pour lutter contre ces violences.
Je citerai, de manière non exhaustive, les mesures les plus significatives.
En 1975, le premier refuge pour les femmes battues a été créé à Clichy.
En 1980, le Parlement a adopté la loi relative à la répression du viol et de certains attentats aux moeurs.
La création de la première ligne d'écoute des victimes de harcèlement sexuel sur le lieu de travail date de 1985. L'année suivante, un numéro vert pour les victimes de viol a été mis en place.
La première campagne nationale d'information sur les violences envers les femmes a été lancée en 1989.
La Cour de cassation a consacré la reconnaissance du viol entre époux en 1990. La même année, la loi relative à la protection des personnes contres les discriminations en raison de leur état de santé ou de leur handicap a autorisé les associations à se porter parties civiles lors des procès.
L'adoption de la loi du 2 novembre 1992 relative à l'abus d'autorité en matière sexuelle dans les relations de travail et modifiant le code du travail et le code de procédure pénale a permis de lutter contre le harcèlement sexuel.
La loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a prévu de renforcer les dispositions relatives à l'information, l'accueil et la prise en charge des victimes de violences.
Enfin, l'avancée la plus récente est la possibilité d'éloignement du conjoint violent du domicile conjugal, qui a été permis par la loi du 26 mai 2004 relative au divorce.
Si ces avancées sont réelles, elles sont, cependant, très loin d'être suffisantes. Quelques chiffres significatifs le prouvent, même si nous ne disposons pas de statistiques fiables puisque seulement 6 % à 10 % des femmes portent plainte.
Ces violences concernent toutes les femmes, quels que soient leur âge, leur milieu social ou leur niveau d'études. Une enquête conduite en 2000 a permis de connaître le niveau des violences subies par les femmes au cours des douze mois précédents. Parmi les femmes interrogées, 4 % ont déclaré avoir subi des agressions physiques, 4 % également des agressions sexuelles, 26 % ont dit avoir été victimes d'une agression verbale et plus de 55 % ont estimé avoir subi des pressions psychologiques.
En outre, 29 femmes sont mortes cet été à la suite de coups et blessures ou poussées au suicide par les souffrances endurées.
Si ces chiffres sont, bien sûr, inquiétants, une autre donnée de l'enquête est encore plus alarmante : en effet, 0, 3 % des femmes interrogées avouent avoir été violées, ce qui représenterait 48 000 femmes par an.
Je n'ai pas voulu noircir le tableau, j'ai simplement souhaité traduire par les statistiques la triste réalité dans une société dite « civilisée ».
Devant ce constat, la délégation du Sénat aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes a décidé, en juillet dernier, de consacrer son prochain rapport d'activité au thème des violences envers les femmes. Nous avons déjà auditionné des personnalités compétentes. Elles ont témoigné de situations qui nous ont véritablement atterrés et qui ont montré que le combat est loin d'être terminé.
Les batailles à mener sont celles de l'information, de la sensibilisation de l'opinion publique et de l'éducation au respect de l'autre dès le plus jeune âge, en particulier pour les enfants témoins de la violence au sein de leur famille. L'accent n'est pas suffisamment mis, me semble-t-il, sur ce dernier point.
C'est donc pour cette raison que je porte un ruban blanc, symbole de la lutte contre ce fléau, pour alerter et ne pas accepter l'inacceptable.
A cet égard, je vous remercie, monsieur le président, de bien vouloir signer la charte « Zéroviolence », témoignant ainsi de tout l'intérêt que vous portez à ce sujet préoccupant.
En conclusion, je vous propose, monsieur le président, mes chers collègues, de contribuer à amplifier une véritable prise de conscience pour dénoncer ces violences, afin qu'elles ne soient plus banalisées. Je vous invite donc, si vous le voulez bien, à porter aujourd'hui ce ruban blanc, synonyme du refus d'ignorer cette violence, du refus de la dissimuler et du refus de la nier. C'est ainsi que nous progresserons vers une société plus humaine et plus respectueuse de l'autre. §
J'ai le plaisir, monsieur le président, de vous remettre ce ruban, que vous aurez la gentillesse de porter toute la journée. §