Cet héritage, dont nous n'oserions plus rêver, a été immédiatement dilapidé par trois dévaluations.
Aujourd'hui, avec une dette qui représente 63, 7% du PIB et un déficit qui doit être apprécié au regard non des 3% du PIB mais de l'écart bien réel de 18, 5% entre les dépenses et les recettes de l'État, nous serions obligés de dévaluer, sans l'extraordinaire « assurance naufrage » que constitue l'euro. L'euro est la meilleure des choses, car c'est un formidable ciment du marché unique : c'est la pire des choses s'il nous rend aveugles.
La France n'est pas en bon état, quelque chose s'est brisé dans les années 80. Si nous voulons qu'elle guérisse, nous devons nous attaquer à son mal avec lucidité et courage.
Aujourd'hui, il faut trouver des solutions aux trois maladies chroniques que sont le déficit, la dette et le chômage.
Le déficit de la France diminue, mais il atteint encore 45 milliards d'euros en loi de finances initiale. Cette prévision de déficit pour 2005 replace la France sous la barre des 3% du PIB.
On observe une baisse de la part des dépenses de fonctionnement dans le recours à l'emprunt, qui passe de 20, 5% à 12, 5%.
Ces résultats apportent quelque soulagement, mais le recours à l'emprunt pour assurer le fonctionnement, dont les crédits sont essentiellement prévus au titre III, « Moyens des services », est malsain.
Si l'on peut considérer que la rémunération d'un chercheur constitue un véritable investissement, il n'en demeure pas moins que c'est de fonctionnement que nous parlons. Dans une entreprise, cela pourrait s'apparenter à de la « cavalerie ».
Nous avons oublié l'esprit de la procédure budgétaire. Puisque les recettes sont votées avant les dépenses, nous devrions partir de ces recettes pour décider des dépenses, comme tout gestionnaire.
Depuis plus de vingt ans, nous sommes devenus dépendants de la dépense publique et nous sommes rentrés dans une spirale perverse : nous considérons que des besoins toujours croissants doivent être financés à tout prix, quitte à recourir de nouveau à l'endettement dont le niveau est déjà intenable.
Finalement, on raisonne non plus à partir des recettes mais bien à partir des dépenses à satisfaire. Quelle entreprise, quel ménage penserait et gérerait de la sorte ?
En ce qui concerne les dépenses, le budget connaît une hausse limitée à la hausse des prix, soit 1, 8%. Il faut saluer ici le maintien pour la troisième année consécutive de la norme «zéro volume ».
Nous avons réussi à contenir les dépenses, ce qui était une étape nécessaire. Il faut avoir la volonté d'aller plus loin, et parvenir à un maintien du budget à euros constants, ce qui constituerait pour l'année à venir une diminution prévisible de 1, 8% de ces dépenses.
Créons une mécanique de contrainte pour appuyer notre volonté politique. Monsieur le secrétaire d'Etat, cet effort, chaque ménage, chaque entreprise est capable de le faire. Pourquoi l'État ne se fixerait-il pas cet objectif ? La LOLF en facilitera la réalisation. De même que certains médicaments ne sont plus remboursés ou ne le sont plus autant en raison de leur manque d'efficacité, certaines dépenses n'ont plus lieu d'être.
Considérons le poste le plus important des dépenses - les traitements et pensions - qui est passé à près de 43, 3 % aujourd'hui. En dépit de sa nette augmentation, je ne pense pas que nos compatriotes aient le sentiment d'une amélioration substantielle dans l'accomplissement des missions de service public ainsi que dans la mise en oeuvre des devoirs régaliens de l'Etat, sauf sans doute en matière de sécurité.
La gestion de l'Etat et de la fonction publique est la pierre angulaire de toute maîtrise des dépenses publiques. Le ministre d'Etat a rappelé que, lorsque l'Etat recrute un fonctionnaire, c'est pour toute sa vie et non pas seulement pour la durée de sa vie professionnelle.
Il convient aussi de faire la distinction entre les emplois du secteur marchand et les postes dans l'administration. Vous n'avez pas renouvelé certains postes de fonctionnaires partis à la retraite. Le solde négatif est d'environ 7 000 emplois sur plus de 2, 2 millions : c'est vraiment peu !
Nous savons tous que la situation démographique actuelle constitue une opportunité historique. Ne la laissons pas passer ! Nous devons atteindre le ratio de nos voisins de l'Union européenne, à population et à richesse comparables. Ainsi, au Royaume-Uni et en Allemagne, 15 % de la population active travaillent pour l'Etat, contre 27, 3 % chez nous.
Il serait stupide de faire un dogme d'une baisse généralisée et uniforme du nombre de fonctionnaires où qu'ils se trouvent. Soyons pragmatiques ! C'est faire preuve de respect que d'affirmer qu'individuellement nos fonctionnaires peuvent être au moins aussi performants que leurs homologues britanniques ou allemands, puisque, dans le secteur privé, les Français sont les plus productifs du monde, à l'heure. Nous avons là la démonstration que l'Etat est un très mauvais chef d'entreprise.