L'état de la société montre combien il serait utile que l'on se penche sur elle, en particulier sur le « vivre ensemble », sur la richesse de la diversité, et sur l'élaboration d'une mémoire collective recevable par tous.
Il ne suffit donc pas d'inscrire un budget « sciences humaines et sociales » ; il faut que les priorités données à l'ANR intègrent cette dimension.
Ma seconde préoccupation concerne les modalités d'application de la LOLF. On nous avait promis clarté et lisibilité. On avait mis en perspective un rôle parlementaire accru. C'est la confusion qui prime et nos marges de manoeuvre sont toujours très étroites.
Ma troisième préoccupation illustre d'ailleurs la deuxième. Depuis des années, avec nos collègues Ivan Renar et Pierre Laffitte, nous plaidons pour la culture scientifique et technique, et nous le faisons avec le soutien de toute la commission des affaires culturelles. Eh bien ! pour y voir clair dans les documents, il faut visiter trois programmes différents, au travers de plusieurs ministères !
Nous avions fait passer au Gouvernement le message d'un nécessaire soutien accru : les moyens baissent de 0, 2 %.
Nous vous avions alerté sur l'injustice territoriale : la Cité des sciences et de l'industrie accroît son budget de 3 millions d'euros - elle en a certes besoin -, mais les associations de terrain, décidément vouées aux gémonies par votre gouvernement, n'ont plus que 190 000 euros, et quarante centres de culture scientifique se partagent 4, 5 millions d'euros pour tout le reste de la France !
Comment voulez-vous construire une société de la connaissance dans de telles conditions ?
Vous qui êtes responsable du domaine de la recherche, où allez-vous trouver des citoyens imprégnés de rationalisme, d'esprit critique, à l'écoute de l'autre, prêts à se lancer dans la société de la connaissance dont chacun parle, mais contre laquelle tout se joue ?
Je termine en réitérant solennellement une proposition constructive et d'actualité.
Les terminales scientifiques servent plus de sas de sélection que d'antichambre du savoir pour les passionnés de mécanique ou de chimie. De toute manière, ceux-là iront vers les grandes écoles ou la recherche, si toutefois la loi levait le spectre de l'impasse et de la précarité.
Mais peu se destinent au CAPES ou à l'agrégation en sciences. Responsable de l'enseignement supérieur, vous n'allez plus, monsieur le ministre, former suffisamment de professeurs de mathématiques, de physique et de chimie.
Rétablissez les concours de prérecrutement : les lauréats auront des bourses en échange d'un engagement décennal. L'un de vos objectifs, favoriser l'égalité des chances dans l'enseignement supérieur, vous le permet. Vous dites même que « l'impact de ces aides sera mesuré par un indicateur d'accès des jeunes selon leur origine sociale ». Je vous le rappelle, ce dispositif, hier nommé IPES ou bourse d'école normale pour les maîtres, avait été déterminant pour l'intégration des enfants de mineurs polonais dans le Nord-Pas-de-Calais ou d'ouvriers italiens en Moselle ou en Rhône-Alpes.
Ne croyez-vous pas que ceux qui crient leur colère dans les banlieues pourraient, pour certains, bénéficier de cette mesure ? Et surtout ne me répondez pas, comme M. de Robien, que les postes d'auxiliaires de vie scolaire rempliront ce rôle : chacun a droit à la dignité de vraies études !