Malgré différents amendements qui nous poussaient dans un autre sens, monsieur Mahéas, une première novation aura consisté à transposer, aussi fidèlement que possible, au niveau législatif un accord intervenant dans le champ de la fonction publique. Nous devons tous partager cet objectif de fidélité aux accords, qui marque une nouvelle pratique du dialogue social dans la fonction publique.
Je souhaite que nous puissions ainsi ouvrir une nouvelle voie dans l’élaboration de règles fondées sur la concertation et le compromis.
Plus que jamais, en effet, le dialogue social est indispensable. Nous vivons un temps de profondes réformes, qu’elles soient budgétaires, administratives ou statutaires. Le Gouvernement a donc le devoir de donner toute sa place au droit de participation des agents publics à l’organisation et au fonctionnement du service public, et ce en affirmant très clairement deux principes : d'une part, que l’élection soit la source de toute représentativité ; d'autre part, que la négociation prenne le pas sur la confrontation.
Mesdames, messieurs les sénateurs, ces deux principes se trouvent au cœur du projet de loi sur lequel vous devez vous prononcer aujourd’hui.
L’élection sera désormais le fondement de la représentativité syndicale. C’était déjà le cas dans la fonction publique territoriale comme dans la fonction publique hospitalière. Désormais, ce le sera également dans la fonction publique de l’État, ce qui est très positif.
Par ailleurs, tout syndicat légalement constitué depuis plus de deux ans pourra se présenter aux élections professionnelles. Il s’agit là d’un signe fort d’ouverture.
La culture de la négociation doit se généraliser dans la fonction publique à tous les échelons pertinents de l’administration. Ce principe me semble tout aussi déterminant que le précédent. Il convient à la fois d’élargir le champ de la négociation au-delà des questions salariales et de fixer les conditions dans lesquelles un accord signé sera désormais considéré comme valide.
Si les principes doivent être refondés, il faut également moderniser l’organisation et le fonctionnement du dialogue social.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite attirer plus particulièrement votre attention sur deux points.
En premier lieu, le texte crée un nouveau conseil commun aux trois versants de la fonction publique. Cela m’apparaît comme une innovation essentielle pour garantir l’unité de la fonction publique ; j’emploie ce terme à dessein, car il ne s’agit nullement d’« unification ». Je réaffirme avec force qu’il n’entre nullement dans la volonté du Gouvernement de déposséder les conseils supérieurs actuels de leurs attributions. Sur ce point, nos débats ont été sans ambiguïté et plusieurs amendements ont été adoptés en ce sens.
Chaque versant de la fonction publique possède son histoire, son originalité, sa spécificité. Il faut reconnaître ces différences et savoir les conserver lorsqu’elles se justifient. Toutefois, n’oublions pas que ce qui nous rassemble est bien plus important que ce qui nous distingue : servir l’intérêt général transcende chacune des trois fonctions publiques.
À travers le Conseil commun de la fonction publique, l’unité de la fonction publique n’en sera que mieux affirmée, car les employeurs territoriaux et hospitaliers pourront s’exprimer, dès l’origine, sur les textes concernant les trois versants de la fonction publique, ce qui n’était pas le cas auparavant.
En second lieu, le paritarisme numérique ne sera plus une obligation. Il n’existe plus depuis près de vingt ans dans la fonction publique hospitalière, sans que le dialogue social s’en trouve pour autant affaibli. Il existe dans la fonction publique de l’État, mais de façon si formelle qu’il est difficile de trouver un seul défenseur de cette façon de procéder.
J’en viens à la fonction publique territoriale, qui fut au cœur de nos débats et sur laquelle, mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs d’entre vous se sont exprimés. Le Gouvernement a entendu les points de vue des élus et des représentants du personnel ; il vous propose d’y maintenir l’essentiel des principes du paritarisme. Ainsi, deux collèges sont prévus à tous les niveaux, l’un accueillant les représentants des employeurs, l’autre ceux des agents. Naturellement, les collectivités territoriales resteront totalement libres de maintenir un paritarisme numérique, si elles le souhaitent.
Par ailleurs, à la suite d’une délibération, c’est-à-dire en toute indépendance, mais aussi en toute transparence, la collectivité sera libre de prévoir, d'une part, le vote des représentants du personnel, d’autre part, l’avis des représentants de la collectivité.
La seule évolution porte bien sur ce point : une obligation est remplacée par une faculté. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner à cette tribune, la philosophie qui sous-tend ce texte consiste à privilégier la souplesse.
Le Gouvernement est particulièrement respectueux de la libre administration des collectivités locales. Je le dis en tant que secrétaire d'État, mais aussi en tant qu’élu local, plus précisément de maire.
Pour entrer pleinement en vigueur, cette rénovation du dialogue social suppose de définir une période transitoire, qui sera utile pour faire évoluer les règles de validité des accords. Vous le savez, jusqu’à présent, aucune règle n’existait en la matière. Nous avons souhaité engager un processus qui, à terme, nous permettra de passer à des accords majoritaires.
Une période transitoire étant toutefois nécessaire, seront valides, dans un premier temps, les accords réunissant au moins 20 % des représentants des agents sans faire l’objet d’une opposition de plus de 50 % de ces mêmes représentants. Cette période transitoire permettra également d’organiser une convergence des dates d’élections aux comités techniques et aux commissions administratives paritaires dans les trois versants de la fonction publique.
Reconnaissons ici que la fonction publique de l’État s’inspire de ce qui existe déjà, de façon très satisfaisante, dans la fonction publique hospitalière comme dans la fonction publique territoriale. Il s’agit néanmoins d’une opération complexe puisqu’il faut unifier les durées des mandats et synchroniser les élections à la fonction publique de l’État, qui se déroulaient au fil de l’eau. Plusieurs dizaines de milliers d’instances sont ainsi concernées.
Par conséquent, une solution pragmatique a été envisagée, qui suppose de procéder en deux temps. Tout d'abord, à la mi-2011 sera organisée la constitution des nouvelles instances de la fonction publique de l’État et de la fonction publique hospitalière, dont le mandat devrait s’achever de façon naturelle à la fin de 2011. Ensuite, il s’agira de laisser la fonction publique territoriale poursuivre ses mandats jusqu’à leur terme naturel, à la fin de 2014, date à laquelle il est prévu d’organiser des élections générales sur les trois versants de la fonction publique.
Vous le voyez, il s’agit là d’un projet de loi d’importance