Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 11 janvier 2007 à 9h30
Prévention de la délinquance — Article 46

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Il nous est proposé de modifier le code de procédure pénale, le code général des collectivités territoriales et la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer afin d'élargir le champ de compétence et d'intervention des gardes champêtres et des agents de la police des chemins de fer.

Vous connaissez notre scepticisme à l'égard de toutes les mesures d'extension des pouvoirs de police à diverses catégories de personnels autres que ceux de la police nationale.

Ces extensions successives, que la loi met peu à peu en place, nous paraissent difficilement acceptables dans un État de droit, compte tenu de la disparité des moyens sur notre territoire et des possibles différences d'application de notre droit par de multiples et diverses autorités.

Vous ne serez donc pas étonnés que nous nous opposions à l'extension des pouvoirs de police des gardes champêtres.

De plus, ces nouvelles missions risquent d'entraîner, une nouvelle fois, une augmentation des dépenses de personnels dans un grand nombre de communes qui, aujourd'hui, rencontrent déjà de grandes difficultés pour finaliser leur budget, compte tenu des multiples transferts de charges qui leur sont imposés.

En ce qui concerne les agents de la police des chemins de fer, il est bon de préciser que, en dépit de leur appellation d'agent, ils n'ont pas le statut de policier au sens communément compris : ce sont des agents de police administrative. Leurs prérogatives vont donc être étendues afin qu'ils puissent assurer des missions de police au sens du maintien de l'ordre et du contrôle de police, prérogatives qui leur permettront d'exercer des contraintes physiques à l'encontre des contrevenants.

Nous n'acceptons pas cette mesure qui donne pouvoir à des agents administratifs non tenus d'appliquer les règles déontologiques de la police d'effectuer des actes de contrainte physique à l'encontre d'un citoyen ne disposant pas d'un titre de transport.

Faut-il rappeler ici que la contrainte visant à réduire la liberté de circulation des citoyens est telle que le législateur a de tout temps réservé son exercice aux seuls agents de police dûment mandatés ?

Faut-il aussi rappeler que retenir une personne contre son gré est une violence faite à sa liberté et que cet acte ne peut être accompli que par les mêmes agents ?

En outre, nous craignons que l'application de cet article 46 ne donne lieu à de possibles dérapages du fait des situations tendues qui ne manqueront pas de naître.

Enfin, cet article 46 crée dans les faits un nouveau délit d'occupation d'infrastructures de transport clairement destiné à réprimer les actions syndicales et sociales.

Dorénavant, toute personne qui entrave la circulation des trains encourt une peine de six mois de prison et une amende de 3 750 euros.

Ce n'est pas la première fois que ce gouvernement tente de s'attaquer aux libertés syndicales et à la liberté de manifester. Il s'agit d'une criminalisation de l'action sociale, qu'elle soit syndicale, politique ou sociale.

En effet, chacun sait bien que ce type d'événement ne survient que dans des circonstances particulières de développement des luttes sociales, par exemple la grande grève des cheminots en 1995 ou la lutte des jeunes contre le contrat première embauche.

Parfois, les élus locaux peuvent recourir à de telles actions pour la défense de leur territoire. Il m'est d'ailleurs arrivé de participer à de tels mouvements pour m'opposer à la suppression d'une gare.

En créant ce nouveau délit, le Gouvernement nous propose de réduire les libertés publiques.

Vous comprendrez donc que nous nous y refusions.

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