Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, le projet de loi dont nous venons de débattre longuement repose sur quatre grands piliers.
Le premier consacre le rôle central dévolu au maire en matière de prévention de la délinquance.
Le deuxième, relatif à la santé mentale, vise à faciliter les hospitalisations d'office.
Le troisième prévoit une énième réforme de la justice des mineurs.
Enfin, le quatrième ajoute de nouvelles infractions et des peines complémentaires dans le code pénal.
Nous l'avons dit, le dispositif de prévention de la délinquance reposera en grande partie sur les épaules du maire. Le champ de ses compétences se trouvera donc considérablement étendu. Faire du maire un pivot dans ce domaine témoigne de la défiance du Gouvernement à l'égard de l'action sociale et de la justice des mineurs.
Mais ce que vous semblez oublier, monsieur le ministre délégué, c'est que, dans tous les cas, le maire devra répondre aux attentes de ses électeurs. L'intérêt des enfants en difficulté pourrait alors dépendre des contingences politiques et des seules préoccupations de maintien de l'ordre. Nos craintes sont grandes à ce sujet. À la lecture de ce projet de loi, elles sont pleinement justifiées.
Par ailleurs, peut-on encore aujourd'hui parler de la spécificité de la justice des mineurs ? Déjà largement malmenée depuis la loi Perben I du 9 septembre 2002, elle est ici profondément remise en cause. Le volet « prévention » de l'ordonnance de 1945 est oublié, les procédures accélérées et l'enfermement des mineurs sont encouragés, le principe de l'atténuation de la responsabilité pénale est fortement entamé. La justice des mineurs diffère de moins en moins de celle des majeurs, ce qui nous inquiète.
Pour des raisons qui restent incompréhensibles, le volet « santé mentale » n'a pas été retiré de ce texte, ce qui ne nous satisfait évidemment pas, pas plus d'ailleurs que l'adoption par voie d'ordonnances des dispositions relatives aux hospitalisations d'office. Il est urgent que le Parlement adopte un texte réformant la loi du 27 juin 1990, et ce dans d'autres conditions que celles qui nous sont imposées aujourd'hui par le Gouvernement.
Enfin, nous ne pouvons tolérer d'avoir à créer de nouvelles infractions dès qu'un fait divers fait la une des journaux. Comme les six autres textes présentés par le ministre de l'intérieur en matière de sécurité, ce projet de loi a subi les aléas de l'actualité. Il faut reconnaître que ce texte offre au ministre de l'intérieur la possibilité de développer son programme politique, comme il le fera encore cet après-midi, fondé sur l'instrumentalisation du sentiment d'insécurité et de la peur de l'autre.
Vous l'aurez compris, nous ne pourrons voter ce projet de loi fourre-tout. Alors que ce texte devait traiter de la prévention de la délinquance, si l'on s'en tient à son titre, de nombreuses autres dispositions y ont été ajoutées au fur et à mesure des lectures dans les deux assemblées.
Tel qu'il résulte des travaux du Sénat en deuxième lecture, ce texte est très loin de renforcer la prévention en matière de délinquance. Il ne favorisera pas non plus l'accompagnement des familles en difficulté afin de les aider à s'en sortir.
En revanche, l'inflation législative continue de polluer notre législation pénale et les atteintes aux droits des personnes se multiplient.
Parallèlement, la délinquance économique et financière - la délinquance en col blanc - peut continuer de prospérer sans que ses auteurs risquent le moins du monde d'être inquiétés. Ce sont donc bien les populations en difficulté qui sont les seules visées par ce texte.
Pour toutes ces raisons, nous voterons résolument contre ce projet de loi.