Intervention de Philippe Marini

Réunion du 21 juin 2010 à 15h00
Réforme du crédit à la consommation — Discussion générale

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini :

Ma deuxième observation porte sur le cœur même de nos travaux.

Je tiens à dire que nos travaux ont reposé sur la participation active des membres de la commission spéciale, quelle que soit leur sensibilité politique. Chaque groupe s’est vraiment impliqué dans l’élaboration de ce texte, ce qui nous a permis de constituer, au-delà même des positions politiques qui sont très légitimement les nôtres, ce que je qualifierai de « patrimoine commun ». En effet, nous avons bel et bien bâti un socle commun dans lequel nous pouvons, les uns et les autres, nous reconnaître.

Cela peut sans doute s’expliquer par la conjugaison des préoccupations gouvernementales et des nôtres, qui avaient été exprimées au travers de différentes initiatives parlementaires, que Philippe Dominati a rappelées.

Il est clair que nous sommes, pour la plupart d’entre nous, excédés par ce que nous voyons dans nos départements : la pression de la concurrence et l’insistance de publicités tapageuses poussent à l’erreur bon nombre de nos administrés, notamment les plus fragiles d’entre eux.

Dans ces conditions, il était urgent de réformer le système en profondeur, et c’est ce que nous avons fait.

Aujourd'hui, nous souhaitons mettre un terme final au débat. Certes, nous aurions pu aller plus loin, et améliorer bien des choses encore, mais le souci de l’efficacité et celui de l’urgence sociale nous conduisent à demander que le Sénat adopte le texte dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, et nous nous justifierons bien sûr lors de l’examen des articles.

Ce texte me paraît équilibré : il réforme en profondeur le modèle économique du crédit à la consommation, mais ne casse pas pour autant la dynamique de ce secteur. Grâce aux ajouts effectués, en première lecture, par le Sénat, auxquels s’additionnent ceux de l'Assemblée nationale, nous sommes parvenus à atteindre cet équilibre.

Les principales innovations de ce projet de loi, vous les connaissez, mes chers collègues. La première est la réforme du régime de l’usure, un régime fort ancien, pour lequel il a fallu définir une nouvelle approche. Ouvrir ce débat aurait pu faire peur, mais force est de reconnaître aujourd'hui que la solution à laquelle nous sommes parvenus grâce au travail accompli en commun avec le Gouvernement peut faire consensus.

La seconde innovation est la perspective de création d’un fichier positif, sujet ô combien conflictuel, voire passionnel lors de la préparation des débats de première lecture. J’ai la faiblesse de croire, madame le ministre, que la formule équilibrée, l’honnête transaction que nous avions conseillée en première lecture a permis de dépassionner le débat en prenant du temps et en acceptant de porter un regard pluraliste sur ce sujet.

Par ailleurs, comme l’ont souligné tant Mme le ministre que Philippe Dominati, nous avons souhaité préciser la place du microcrédit personnel dans tout ce paysage.

Il n’en reste pas moins que les dispositions sans doute les plus visibles, celles qui jalonnent le parcours du consommateur, sur lequel nous avons cheminé, madame le ministre, lors de votre intervention, concernent l’encadrement de la distribution du crédit sur le lieu de vente, pour limiter le crédit renouvelable à ce que doit être son objet réel, c’est-à-dire un besoin de trésorerie ponctuel, et pour lutter contre le malendettement des ménages.

À cet égard, nos apports concrets sont l’exigence de la double offre de crédit, la mise en place, dans les surfaces de vente, d’espaces dédiés et la formation des personnels qui y travaillent, le renforcement des informations à délivrer aux emprunteurs, tout cela s’ajoutant au paiement comptant « par défaut » et au remboursement minimum du capital à chaque échéance.

Voilà un modèle global, qui est clair et qui devrait permettre de répondre aux difficultés auxquelles nous étions confrontés et de limiter les tentations excessives auxquelles étaient soumis nombre de nos concitoyens et qui les conduisaient sur le chemin du surendettement par le biais du malendettement. Bref, un modèle auquel les opérateurs vont désormais pouvoir se conformer sans qu’il en résulte pour autant une rupture de leurs activités.

Pour conclure, je souhaiterais évoquer, madame le ministre, le sentiment d’urgence qui implique une publication rapide des textes d’application.

Dans ce projet de loi, sont prévues trente mesures d’application. Si le calendrier législatif, la rareté du temps parlementaire, nous a conduits à attendre un an afin de pouvoir nous prononcer définitivement sur ce projet de loi, il est clair – vous nous l’avez indiqué tout à l’heure – que la mise en œuvre administrative des textes d’application ne doit pas engendrer de nouveaux délais, hormis ceux que requièrent leur élaboration et leur mise en forme.

Vous l’imaginez bien, nous serons, les uns et les autres, très vigilants au sujet de l’échéance de six mois que vous avez évoquée pour l’application de l’ensemble de ces dispositions, car nous avons le sentiment que nombreux sont nos collègues, et plus nombreuses encore sans doute sont les associations de consommateurs, à attendre ce texte.

Tout en saluant votre engagement personnel en la matière, madame le ministre, et en vous remerciant d’avoir précisé ces échéances, je souhaite que vos services et l’ensemble des services de l’État concernés par ce sujet se mobilisent dès demain pour que les délais que vous avez fixés soient parfaitement respectés.

La commission spéciale vous appelle naturellement, mes chers collègues, à suivre les avis qui seront exprimés, en son nom, par le rapporteur Philippe Dominati, et vous invite à voter le texte tel qu’il résulte des travaux de l’Assemblée nationale.

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