Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 6 mai 2009 à 14h30
Entrée sur le territoire français au titre de l'asile — Article 1er

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Dans la continuité de la loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile de 2007, le dernier alinéa de l’article 1er prévoit que les audiences de la CNDA pourront se tenir dans « une salle d’audience ouverte au public spécialement aménagée à cet effet », auprès de la zone d’attente au sein de laquelle l’intéressé est maintenu.

Or, nous l’avons rappelé à de multiples reprises, la tenue d’audiences dans la zone aéroportuaire contrevient à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, laquelle exige, d’une part, la publicité des audiences et, d’autre part, l’indépendance et l’impartialité du juge, pour satisfaire aux conditions d’un procès équitable.

Afin de se prémunir contre ce genre de critiques, le texte prévoit que les audiences foraines auront lieu dans « une salle d’audience ouverte au public spécialement aménagée à cet effet ». Or, si je prends l’exemple de la zone d’attente de Roissy, la situation géographique de la salle d’audience ne permettra pas d’assurer une réelle publicité des audiences, dans la mesure où il s’agit d’un lieu fort éloigné de toute habitation, dans une zone de fret constituée de hangars et d’entrepôts, à laquelle il est très difficile d’accéder par les transports en commun.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les zones d’attente sont placées sous le contrôle et l’administration de la police. Ainsi, les procès peuvent se dérouler dans un lieu administré par l’une des parties, ce qui placerait le juge dans une situation de dépendance inadmissible et incompatible avec son devoir d’impartialité.

La question des audiences délocalisées s’est posée très concrètement : les avocats et magistrats ont clairement exprimé leur désaccord, voire leur refus de siéger, que ce soit dans la zone d’attente pour personnes en instance de Roissy, ou ZAPI 3, ou dans les centres de rétention, comme ce fut le cas à Toulouse en 2007.

Enfin, je rappellerai que la Cour de cassation, dans une décision du 16 avril 2008, a jugé illégales les audiences délocalisées en centres de rétention.

Il n’y a que peu de défenseurs de ces audiences délocalisées, qui sont contraires à l’idée que les magistrats, les avocats et nous-mêmes avons de notre justice.

Dans le même ordre d’idée, prévoir que, sauf opposition de l’étranger, l’audience pourra se tenir par visioconférence, l’intéressé se trouvant dans la salle d’audience de la zone d’attente et le magistrat au tribunal, ne saurait garantir le respect des principes de recours effectif et de procès équitable.

Cette réforme nous est présentée comme devant s’accompagner nécessairement d’une augmentation des moyens alloués à la CNDA. Il nous paraît alors nécessaire de prévoir, dans ces nouvelles ressources, la possibilité que les audiences se tiennent dans les locaux de la CNDA plutôt que d’être reléguées aux périphéries des zones d’attente.

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