Intervention de Yves Pozzo di Borgo

Réunion du 6 décembre 2004 à 15h00
Loi de finances pour 2005 — Défense

Photo de Yves Pozzo di BorgoYves Pozzo di Borgo :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis l'échec de la Communauté européenne de défense, en 1954, les Européens s'en remettaient à l'ONU ou à l'OTAN pour intervenir dans les crises diplomatiques.

L'évolution des positions franco-britanniques, en décembre 1998 à Saint-Malo, et l'aval de l'Allemagne en mai 1999 à Toulouse ont permis aux sommets européens de Cologne et d'Helsinki de lancer, en juin et décembre 1999, la politique européenne de sécurité et de défense, la PESD, qui permet aux Européens d'intervenir dans les crises en Europe lorsque l'Alliance n'est pas engagée.

L'examen du projet de budget de la défense pour 2005 intervient dans un contexte dont nous ne pouvons que nous réjouir.

La décision des ministres de l'Union européenne, le 22 novembre de cette année, de se doter de treize groupes tactiques formés d'unités de combat de 1 500 hommes censées être opérationnelles en quinze jours en est un élément majeur. Je vous en félicite, madame la ministre.

Le jeudi 2 décembre, nous avons vu la force armée de 7000 soldats de l'Union européenne, l'EUFOR, prendre officiellement la relève de l'OTAN en Bosnie.

Cela montre que les Européens membres de l'Union ont la capacité collective d'agir de manière autonome dans des crises européennes.

En dehors du fait que le développement de cette politique de défense dépendra évidemment, dans les années qui viennent, de la mise en place d'une politique étrangère commune, l'autonomie européenne ne sera réelle que si l'Union européenne dispose d'un certain nombre de capacités critiques en matière de renseignement, de transport de troupes et, surtout, de systèmes de commandement et de communication, sans parler d'autres domaines plus stratégiques.

Un approfondissement de la compatibilité et de la mutualisation des moyens, de concert avec nos partenaires, est une condition sine qua non de cette politique européenne.

Mais revenons au budget que nous examinons aujourd'hui.

Il s'élève, pour 2005, à près de 43 milliards d'euros, en hausse de 850 millions d'euros.

Les dépenses de ce budget sont importantes, mais nécessaires - je dirai même prioritaires -, même si elles sont quelquefois insuffisantes, nul n'en doute. Je voudrais louer, madame la ministre, votre énergie en ce domaine.

Mais ces dépenses pèsent lourdement sur la situation budgétaire de la France.

Notre endettement de 1000 milliards d'euros est effarant. Les 80 % de l'impôt sur le revenu qui ne servent qu'à payer les charges financières de la dette ôtent au pays ses capacités d'investissements majeurs et fondamentaux pour l'avenir et accroissent le poids de la pression fiscale, au détriment de l'initiative individuelle et collective.

Malgré cela, nous voterons un budget 2005 qui est encore en déficit.

L'équilibre des comptes de l'Etat devrait être inscrit dans le marbre de la Constitution. Ce serait sans doute une erreur économique, mais cette initiative, qui ne verra jamais le jour, permettrait au moins au Conseil constitutionnel de rappeler aux gouvernements successifs, de gauche comme de droite, et aux parlementaires que nous sommes qu'ils ne peuvent pas continuer à hypothéquer l'avenir des générations futures.

Les dépenses que nous consacrons à notre défense représentent à elles seules près de 2 % de notre PIB. Si l'on compare ce chiffre à ceux des autres pays européens qui, pour la plupart, ont des dépenses de défense comprises entre 1 % et 2 % de leur PIB - à l'exception des Britanniques, dont les dépenses atteignent 2, 4 % -, force est de constater l'écart important de l'effort fourni en ce domaine par les différents Etats membres de l'Union européenne.

Nombre de budgets de défense européens sont en chute libre alors que le nôtre est toujours en hausse, ce dont je vous félicite, madame la ministre. Cette disparité s'amplifie avec le temps, du fait des réformes en cours dans tous les Etats européens.

Pourtant, la question de l'investissement des pays membres de l'Union européenne dans la constitution des forces et dans la mutualisation des moyens constitue un point clé de la politique européenne de défense.

Dans cette perspective, madame la ministre, j'aurais souhaité savoir - mais vous avez déjà répondu en partie tout à l'heure à cette question - quels objectifs et quelle évolution vous comptez donner à la politique européenne de défense.

Comment comptez-vous préparer la défense française à la mise en oeuvre du traité constitutionnel, si celui-ci est ratifié et dépasse les seuls objectifs de Petersberg ?

Dès lors, comment envisagez-vous l'évolution du budget de la défense dans un nécessaire contexte de compatibilité et de mutualisation des moyens nationaux respectifs de l'ensemble des pays européens, ne serait-ce que pour desserrer la pression financière sur notre propre budget ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion