En effet, cela reviendrait à faire sortir du dispositif toutes les personnes qui vivent avec un chiffre d’affaires inférieur à 32 000 euros, qui ne peuvent pas ou qui ne souhaitent pas se développer et qui peuvent parfaitement s’accommoder de cette situation sur une longue période, pour une durée bien supérieure à trois ans.
Je pense notamment aux mères de famille qui gardent un équilibre de vie satisfaisant en vivant de leur auto-entreprise, sans souhaiter travailler davantage ou augmenter leur chiffre d’affaires. Je pense aussi à toutes ces personnes, artisans ou professions libérales, qui, avec un chiffre d’affaires de 25 000 euros à 30 000 euros, gagnent davantage avec leur auto-entreprise qu’en étant salarié dans une entreprise. Voilà la réalité ! Il faut garder à l’esprit que ces chiffres correspondent à un revenu mensuel proche d’un SMIC et demi, ce qui, vous le savez, n’est pas si éloigné de la moyenne des revenus de nos concitoyens.
Au nom de quoi voudrait-on imposer à ces entrepreneurs des contraintes nouvelles, alors que la donne de départ, celle qui les a convaincus de franchir le pas, était la simplicité du dispositif ? N’est-ce pas un encouragement à abandonner son activité ou, pis, à la poursuivre, mais sans la déclarer ?
J’entends beaucoup d’intervenants évoquer une « concurrence déloyale » à propos du statut de l’auto-entrepreneur. Je veux le dire ici avec force, si concurrence il y a, elle n’est pas fiscale, ce qu’a d’ailleurs montré une étude de l’ordre des experts-comptables. Un auto-entrepreneur paie autant de charges qu’un entrepreneur individuel. Il nous faut en finir une fois pour toutes avec les contrevérités véhiculées sur ce point. Je ne peux pas laisser prospérer des affirmations qui se présentent parées des habits de l’évidence, alors qu’elles ne sont jamais chiffrées et qu’elles ne s’appuient sur aucun exemple concret !
Quelle est la réalité ? Pour un commerçant travaillant sur Internet, un « e-commerçant », marié, qui n’a pas de stock et qui réalise un chiffre d’affaires de 69 000 euros dans l’année, les prélèvements seront de 8 966 euros s’il est sous le régime de l’auto-entrepreneur et de 9 010 euros s’il est en micro-entreprise. La différence est de 40 euros sur l’année ! Si ce même commerçant réalise un chiffre d’affaires de 10 000 euros, il paiera 1 300 euros de charges en étant auto-entrepreneur et 1 400 euros s’il est en micro-entreprise, soit une différence de 8 euros par mois. Parler de concurrence déloyale me paraît tout de même excessif !
On pourrait multiplier les exemples ; on aboutirait parfois à une différence légèrement favorable à l’auto-entreprenariat et parfois une différence nettement favorable aux régimes réels d’imposition, notamment en cas de déficit ou de faible marge. Je tiens à votre disposition tous les exemples tirés de cette étude provenant de l’ordre des experts-comptables.
La vraie concurrence, mesdames, messieurs les sénateurs, ne se situe pas au niveau des charges. S’il y a une concurrence, c’est simplement une concurrence par la simplicité ! Et si cette simplicité excessive est « déloyale », faut-il alors y répondre par une complexification qui viendrait remettre tout le monde à égalité ? Je ne le crois pas. S’il doit y avoir une harmonisation, elle doit évidemment se faire par le haut, c’est-à-dire avec plus de simplicité pour tout le monde, quel que soit le statut, quel que soit le chiffre d’affaires.
Il s’agit là, je crois, d’un chantier utile qu’il nous faudra ouvrir et qui répondrait d’ailleurs aux vœux de l’éminent président de la commission des finances, M. Jean Arthuis. S’il y a un combat à mener, c’est bien celui de l’extension de la simplicité du régime de l’auto-entrepreneur aux 1, 5 million d’entrepreneurs individuels. La simplicité doit agir comme une contagion heureuse au reste de l’économie.
Je ne citerai qu’un seul exemple pour étayer cette idée. Le premier janvier 2009, avec le portail de l’auto-entrepreneur, nous rendions possible la déclaration de création d’entreprise par Internet.