Tout récemment, nous avons eu la chance de prendre connaissance du bilan dressé par le Sénat, sous la direction de M. Marini, sur le régime de l’auto-entrepreneur.
Il en ressort que la crainte concernant le risque de substitution entre salariat et auto-entrepreneur, que le groupe socialiste avait manifestée, en séance publique, lors de la discussion du projet de loi créant ce nouveau régime, était fondée. Ce n’était pas simplement une vue de l’esprit de notre part !
Des employeurs peu scrupuleux obligent en effet des salariés, voire des personnes étrangères en situation précaire, à adopter ce statut.
En période de crise, ce chantage à l’emploi est plus facile à exercer, les employeurs expliquant qu’ils n’ont plus de quoi payer les charges sociales, ou bien qu’il s’agit d’une période transitoire, faisant miroiter une embauche définitive en contrat à durée indéterminée.
Ce ne sont souvent que de belles promesses, car, en réalité, ceux qui sont soumis à ces statuts, que ce soit celui de l’EURL ou celui, à venir, de l’EIRL, non seulement doivent désormais payer eux-mêmes leurs charges, mais encore ne perçoivent ni prime de précarité ni congés payés. En outre, les heures supplémentaires qu’ils effectuent ne sont pas comptabilisées puisque le code du travail ne s’applique pas. Enfin, les personnes ayant choisi ce régime peuvent être remerciées sans préavis et ne bénéficient d’aucun droit au chômage.
Nous craignons que, avec l’EIRL, nous rencontrions les mêmes difficultés majeures que celles que nous rencontrons avec l’EURL. Libérer les énergies créatrices et entrepreneuriales, oui, monsieur le secrétaire d’État, mais pas au prix d’une régression sociale !
On pourrait nous rétorquer que ce que nous dénonçons est un banal phénomène de travail dissimulé ou falsifié et que les employeurs indélicats n’ont pas attendu ce nouveau statut pour faire travailler au jour de faux indépendants ou au noir de vrais ouvriers, et que dès lors qu’il existe un lien de subordination, un contrat passé entre un sous-traitant et un donneur d’ordre s’expose à être requalifié en contrat de travail ordinaire.
C’est l’argument qui nous a été opposé tant en commission qu’en séance publique.
M. le secrétaire d’État a annoncé qu’il avait donné des instructions pour réprimer durement ces fraudes. Je m’en réjouis et je souhaite que cela soit réellement suivi d’effet. Mais, pour mettre en accord le discours et les actes, nous proposons de renforcer l’information sur le caractère illégal de ces pratiques visant à dissimuler une relation salariale de subordination sous la forme d’une relation commerciale de sous-traitance.