Monsieur le sénateur, à la demande du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Michel Pébereau a remis à la mi-décembre 2005 un rapport sur la dette publique qui pose la question de l'avenir de nos finances publiques et de notre capacité à restaurer nos marges de manoeuvre budgétaires et à faire des choix.
Parmi les voies qui permettent le retour à l'équilibre des finances publiques, le rapport prévoit de stabiliser en euros courants les dotations de l'État aux collectivités territoriales. Il considère, en effet, que « le mode de financement des collectivités locales peut réduire l'attention qu'elles portent à l'efficacité de certaines dépenses ».
Toutefois, cette proposition est suivie immédiatement d'une autre recommandation, à savoir « assurer aux collectivités territoriales une plus grande maîtrise de leurs ressources et de leurs dépenses ».
Surtout, le rapport de la commission sur l'évolution de la dette publique a le mérite de souligner la nécessité d'une démarche globale, qui embrasse les domaines de l'État, de la sécurité sociale et des collectivités locales et concerne aussi bien sur les ressources que les dépenses.
C'est dans cet esprit que s'est réunie, le 11 janvier dernier, la première conférence nationale des finances publiques. Le Gouvernement a proposé plusieurs engagements réciproques.
En soulignant que l'évolution des concours de l'État devrait être compatible avec les normes de dépenses qu'il s'impose à lui-même, le Gouvernement s'est engagé à mieux associer les collectivités aux décisions qui les concernent et à élargir leurs marges de manoeuvre s'agissant des compétences transférées. Les travaux qui s'engageront prochainement à la suite de cette première rencontre permettront d'avancer sur chacune de ces pistes.
Monsieur Biwer, vous avez évoqué des collectivités locales « victimes » de compétences « insuffisamment compensées » et dont l'autonomie fiscale serait « écornée ». En toute amitié, je trouve ces termes quelque peu injustes. Depuis 2002, nous avons apporté aux collectivités des garanties sans précédent, en matière d'autonomie financière comme de compensation des transferts.
Le Gouvernement souhaite seulement engager une démarche de transparence et de responsabilité avec les collectivités territoriales et leurs représentants, en sortant de ce que le rapport de M. Pébereau qualifie de « climat de suspicion mutuelle ».
À cette réponse que je vous apporte au nom de Nicolas Sarkozy, j'ajouterai une conclusion personnelle.
Revenons sur l'histoire de la décentralisation depuis 1982, à laquelle j'ai d'ailleurs participé avec Jean-Claude Gaudin. Celui-ci, lorsqu'il présidait aux destinées d'une belle région dont j'étais le premier vice-président, nous avait invités à mettre en oeuvre un plan sans précédent en matière d'éducation, le « plan lycée réussite ».
Lorsque M. Gaston Deferre, en 1982, a décidé d'engager l'acte I de la décentralisation, il a transféré des compétences et des responsabilités, mais sans les accompagner d'un centime ni de moyens matériels ou humains. Par exemple, les lycées et les collèges transférés aux régions ou aux départements étaient des bâtiments pour lesquels depuis trente ans ou quarante ans rien n'avait été fait. Dans le même temps, les personnels et les moyens sont restés dans les rectorats. Les collectivités ont dû faire face et investir.
Si, aujourd'hui, dans certains départements ou régions de France, il y a des collèges ou des lycées magnifiques, ce n'est pas grâce à l'aide de l'État !
Avec l'acte II de la décentralisation, nous n'avons pas procédé de la même manière. Tous les transferts réalisés ont été compensés à l'euro près. Nous avons transmis aux collectivités tous les moyens humains, matériels et financiers dont disposaient auparavant les services de l'État pour exercer ces compétences.
Certes, si la collectivité fait plus aujourd'hui que l'État hier, cela lui coûtera plus cher, mais c'est alors un choix, celui du volontarisme politique, qu'il lui appartient d'assumer.
Quoi qu'il en soit, en ce qui nous concerne, depuis 2002, et contrairement à ce qui s'était passé auparavant avec l'APA, les SDIS, les services départementaux d'incendie et de secours, ou bien d'autres compétences encore, nous avons procédé à des transferts qui permettent aux collectivités d'exercer certaines responsabilités au plus près du terrain tout en bénéficiant d'un véritable transfert de ressources de la part de l'État.
Ainsi, la piste proposée aujourd'hui par le Gouvernement consiste à se rapprocher des collectivités locales, pour étudier avec elles, dans un vrai dialogue et une vraie concertation, comment équilibrer les dépenses et les ressources. Ce faisant, l'État montre toute la confiance qu'il accorde aux collectivités pour assumer les responsabilités qui sont désormais les leurs et que, souvent, sur un certain nombre de thèmes, elles savent d'ailleurs mieux assumer que lui.