Monsieur le ministre, je voulais attirer l'attention sur la situation de l'industrie papetière dans notre pays.
Avec 129 usines et plus de 22 000 salariés, cette filière occupe une place importante, voire centrale, dans certains bassins d'emploi. Or les licenciements, les arrêts de machines, les restructurations comme les fermetures d'usines se multiplient, malheureusement, dans toute la France. Plus de 15 % des salariés pâtissent de cette situation.
Nous en sommes arrivés à ce stade du fait de la mondialisation libérale qui impose ses principes. Elle menace et détruit des emplois, elle met des territoires en danger. Nombre d'entreprises sont aux mains de multinationales et de fonds de pension qui n'ont rien à voir avec l'industrie.
De ce fait, les choix stratégiques sont dominés par des logiques purement financières, sans considération industrielle, humaine et sociale. Le seul objectif est de donner toujours plus aux actionnaires.
Des unités de production sont rachetées à bas prix par des soi-disant investisseurs qui ne font rien pour relancer la production. Au contraire, ils créent les conditions pour que les sites ne puissent pas être rentables. Comme vous le savez, ils ne font pas d'investissement productif, réservant ceux-ci aux pays à bas coût de main-d'oeuvre et à faibles contraintes en matière d'environnement. Ils investissent encore moins dans la recherche et l'innovation. Ils prennent des décisions commerciales contraires à l'intérêt des usines et vendent leurs productions à bas prix. Ils refusent d'informer les salariés et les mettent souvent devant le fait accompli.
C'est ainsi que, dans mon département, agit le fonds de pension Carlyle, propriétaire depuis peu de Otor. Il semble vouloir condamner le site de Saint-Étienne-du-Rouvray, qui emploie 385 personnes. Il ne veut pas entendre les propositions des salariés visant à développer ledit site avec de nouvelles productions porteuses. C'est pourquoi mon ami Hubert Wulfranc, le maire de cette ville, et moi-même demandons que les représentants de l'État organisent une table ronde afin que toutes les possibilités, aussi bien pour ce site que pour l'industrie papetière française en général, soient largement envisagées.
Je veux également citer l'exemple du groupe M-real, dont les résultats sont bons. Ce groupe démantèle son site d'Alizay, situé dans le département de l'Eure, après avoir participé à la casse du droit du travail dans l'industrie papetière en Finlande. Il prévoit de décentraliser 100 postes et de procéder à 85 licenciements.
Le temps qui m'est imparti ne me permet pas de traiter la situation de tous les sites français. Cependant, je veux évoquer le cas du groupe Smurfit, qui, après sa fusion avec Kappa, envisage de fermer son site à Gaillon ; de ce fait, 45 salariés sont sur la sellette.
Sur l'ensemble de notre territoire, la liste est longue : Stora Enso arrête deux machines à papier à Corbehem, dans le Pas-de-Calais ; Tembec supprime des emplois à Tarascon et freine la production à Saint-Gaudens, en Haute-Garonne ; Emin Leydier licencie à Saint-Vallier, dans la Drôme, après l'arrêt d'une machine à papier ; International Paper ferme son site de Maresquel, dans le Nord-Pas-de-Calais, et se débarrasse de nombreux postes ; Matussière et Forest, après la fermeture du site de Rambervillers, dans les Vosges, laisse à l'abandon une partie des autres sites, une fois opéré le rachat de ceux qui sont considérés comme les plus « juteux » par un fonds de pension.
Voilà pourquoi, monsieur le ministre, il me semble urgent et important de mettre en oeuvre une véritable politique industrielle dans le domaine du papier et du carton. L'État ne peut rester indifférent. Il doit apporter des réponses pour défendre notre industrie, car l'avenir de notre pays en dépend.
La logique des papetiers me paraît anti-économique et anti-sociale. Leurs actions frappent des entreprises rentables, au savoir-faire professionnel connu et reconnu.
Dès lors, monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour l'industrie papetière ? Êtes-vous prêt à recevoir les élus de ces sites confrontés à de dures difficultés sociales et économiques ainsi que les représentants des salariés de ces entreprises de l'industrie papetière ?