Monsieur Détraigne, nous en revenons donc une nouvelle fois à cette question du SMA.
Vous avez rappelé le rôle des maires et les difficultés auxquelles ils sont confrontés, notamment les complications qu’ils ont pu connaître lors de la mise en œuvre de cette loi. À cet égard, permettez-moi de faire deux remarques.
D’une part, je comprends très bien la situation des maires. Je l’ai été moi-même douze ans, après avoir exercé un mandat d’adjoint pendant quinze ans.
D’autre part, même si vous vous êtes abstenu, le texte qui a été adopté a bien été le fruit d’une concertation avec le président de l’Association des maires de France, M. Pélissard. Un travail en amont a en effet été mené, et le projet de loi initial a fait l’objet d’améliorations très sensibles, parmi lesquelles je citerai en particulier le relèvement du seuil de déclenchement de la procédure. Je rappelle d’ailleurs que, à l’Assemblée nationale, M. Pélissard a voté le texte.
Au-delà de ces considérations générales, sur lesquelles il n’y a pas lieu de revenir, quelle est la situation aujourd’hui au regard du SMA ?
Tout d’abord, contrairement à ce que l’on entend ici ou là, le dispositif a bien fonctionné, même si, je le reconnais bien volontiers, les maires ont subi une contrainte très forte. Lors de la grève du 20 novembre dernier, sur les 12 000 communes concernées, plus de 10 000 ont mis en place le service minimum d’accueil. Selon une enquête réalisée non par le ministère, mais par l’AMF, la majorité des 10 000 maires en question n’a pas, semble-t-il, rencontré de problèmes particuliers.
Ensuite, les difficultés qui ont pu être recensées sont de trois natures.
Premièrement, nous n’arrivons pas à calibrer le dispositif de manière satisfaisante dans la mesure où le nombre réel des grévistes parmi les enseignants ne correspond pas aux chiffres annoncés préalablement, qui sont souvent supérieurs à la réalité. Ainsi, le 20 novembre dernier, alors que 67 % des enseignants s’étaient déclarés grévistes, le mouvement n’a finalement été suivi que par 47 % d’entre eux. L’accueil est donc « surcalibré ».
Deuxièmement, nous ne connaissons pas non plus à l’avance le nombre d’élèves qui viendront à l’école le jour de la grève.
Nous avons recherché avec M. Pélissard, que j’ai rencontré hier, les moyens de mieux dimensionner le SMA par un système d’information plus performant. Nous allons mobiliser à cette fin les inspecteurs d’académie et les inspecteurs de l’éducation nationale, les IEN, afin qu’ils puissent établir, circonscription par circonscription, un meilleur calibrage. En d’autres termes, il faut éviter à tout prix que la montagne n’accouche d’une souris !
Troisièmement, il convient de veiller à la qualité de l’alerte sociale. On nous a en effet reproché de ne pas avoir ouvert de discussions préalables à la mise en place du SMA. Mais, je le rappelle, le décret relatif à la modernisation du dialogue social n’était pas encore paru. Il a été publié voilà quelques jours seulement.
Nous aurons donc désormais beaucoup plus de temps pour discuter avec les représentants de nos personnels lorsqu’une grève sera annoncée. Ce faisant, nous serons en mesure de mieux évaluer les mobiles de la contestation syndicale et l’ampleur du mouvement et, donc, de nous y préparer beaucoup mieux.
Par ailleurs, conformément à ce qu’a indiqué très clairement le Président de la République devant le Congrès des maires, parmi ceux d’entre eux qui n’appliquent pas le SMA, deux catégories doivent être distinguées.
Il y a, d’une part, ceux qui, rencontrant de trop grandes difficultés ou ne sachant comment s’y prendre, ne parviennent pas à assurer l’accueil. Nous devons les aider à résoudre ces difficultés, éventuellement chercher avec eux les causes objectives qui les empêchent de se conformer à la loi.
Il y a, d’autre part, ceux qui, par principe, font délibérer leur conseil municipal et organisent ensuite une conférence de presse pour annoncer leur refus de mettre en place, quoi qu’il arrive, le service minimum d’accueil.
J’ai pris, ce matin même, la décision de lever tous les recours engagés contre les mairies qui ont été dans l’obligation de constater l’impossibilité matérielle d’organiser l’accueil des élèves. En revanche, je n’ai pas suspendu les procédures lancées contre les mairies volontairement récalcitrantes. D’ailleurs, un certain nombre d’entre elles – je pense notamment à une commune du sud de la France, que je ne nommerai pas ! – qui s’étaient déclarées incapables d’organiser le SMA ont subitement su le faire, après avoir constaté la réaction assez vigoureuse du tribunal administratif !
Par conséquent, monsieur le sénateur, nous avançons sur ce sujet.
Vous avez également évoqué la question centrale de l’évaluation, qui, je le rappelle, est inscrite dans la loi. Le dispositif sera bien évalué au bout d’un an. Hier, Jacques Pélissard et moi-même sommes tombés d’accord sur la nécessité d’anticiper cette évaluation, pour la rendre plus prospective.
La semaine prochaine, j’assisterai à une réunion que le Président de la République organise avec l’AMF. Nous verrons à cette occasion les conclusions qu’il tirera de toutes ces réflexions, mais, en tout état de cause, celles-ci devraient aller dans le sens des annonces que je viens de vous faire. À mon sens, un modus vivendi sera trouvé sur cette question.
Je tiens à le dire, les familles sont évidemment favorables à ce que leurs enfants soient accueillis les jours de grève.