Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 10 octobre 2006 à 22h15
Secteur de l'énergie — Discussion générale suite

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le monde a pris conscience que nous nous rapprochions inéluctablement de l'épuisement des hydrocarbures - à plus ou moins un siècle -, pour ce qui est du pétrole en tout cas. Cela a déclenché une tension internationale que certains n'hésitent pas à qualifier de « guerre des ressources ».

Les compagnies pétrolières ou gazières, dont les implications nationales et internationales ont toujours concerné les États, font désormais partie de la stratégie des gouvernements ; l'énergie constitue aujourd'hui une priorité liée à l'indépendance, et donc à la sécurité de leur pays.

Si la seconde guerre du Golfe est vraisemblablement la meilleure illustration de cette réalité, la compagnie Gazprom apparaît de plus en plus comme le bras économique et financier de la Russie, et la Chine pousse ses pions diplomatiques et pétroliers vers la mer Caspienne et, à travers l'Iran, l'Arabie saoudite, le Soudan et le Tchad, vers le Golfe de Guinée.

Il faut souligner que le développement de la consommation intérieure chinoise accentue cette course effrénée vers l'appropriation des ressources. Aujourd'hui, un Chinois consomme 1, 8 baril par an, contre 17 barils pour un Européen de l'ouest et 28 barils pour un Nord-Américain. Il est évident que la consommation chinoise par tête d'habitant va augmenter et que l'écart aujourd'hui considérable tend à se réduire. La tension va donc s'accroître avec la demande.

Au regard de ce nouveau contexte international et de cette guerre de mouvement à l'échelle planétaire, a-t-on le droit de rester figé sur des positions prises par le gouvernement il y a deux ans ? Peut-on, par pure idéologie, faire preuve d'angélisme et jouer contre nos intérêts nationaux ?

Il est évident que, pour défendre ceux-ci, il faut renforcer les entreprises qui en ont la charge. Cela passe inéluctablement par des alliances - entre distributeurs, entre distributeurs et producteurs -, et par des investissements dans une capacité d'exploitation-production afin de contrôler les ressources, ce qui nécessite des capitaux considérables.

L'évolution du secteur gazier, en particulier, s'accélère : en moins de six mois, l'Allemand E.ON a fait connaître son offre sur l'Espagnol Endesa, le Russe Gazprom s'est rapproché de l'Algérien Sonatrach et cherche des participations dans les divers distributeurs européens.

Quels sont aujourd'hui les rapports de force entre les protagonistes ? En 2005, le chiffre d'affaires d'E.ON s'est élevé à 56 milliards d'euros, celui de Statoil à 49 milliards d'euros et celui de Gazprom à 42 milliards d'euros. Gaz de France, quant à lui, avec 22, 4 milliards d'euros, a enregistré un chiffre d'affaires qui est au mieux deux fois inférieur à celui de ces compagnies.

Le Gouvernement a pris conscience de l'infériorité de Gaz de France au regard de ses concurrents en termes de capital et de ce chiffre d'affaires.

Ne nous cachons pas la réalité : ce texte prépare la fusion avec Suez.

En quoi le projet de loi relatif au secteur de l'énergie répond-il à la nouvelle donne énergétique : contrôle des ressources et concentration des distributeurs, d'une part, besoins croissants, d'autre part ?

Ce texte répond avant tout aux obligations européennes de la France de transposer les deux directives du 26 juin 2003, qui ouvrent le marché du gaz et de l'électricité à la concurrence pour la constitution d'un marché unique. La France, une fois encore, est l'un des trois derniers États à transposer ces directives.

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