Intervention de Dominique Gillot

Réunion du 1er décembre 2011 à 9h30
Loi de finances pour 2012 — Recherche et enseignement supérieur

Photo de Dominique GillotDominique Gillot, rapporteure pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, rapporteure pour avis de la commission de la culture, je m’en remets à l’analyse des chiffres telle que l’ont dressée les rapporteurs spéciaux de la commission des finances. En dépit d’un périmètre si changeant année après année, ces derniers ne se sont pas laissé aveugler par les comparaisons.

Pour ma part, je m’en tiendrai à l’analyse que nous avons formulée en commission.

Alors que le Gouvernement se vante d’avoir sanctuarisé le budget de l’enseignement supérieur en ces temps d’austérité jamais connus, je me dois de faire remonter le malaise profond qui étreint nos universités et la communauté étudiante.

L’augmentation de seulement 1 % des crédits de paiement de la MIRES correspond à une perte d’au moins 0, 7 % en pouvoir d’achat. La croissance réelle des crédits budgétaires de l’enseignement supérieur doit être ramenée à 373 millions d’euros.

Une augmentation de la dotation de fonctionnement des universités, qui s’établit à 46 millions d’euros en 2012, inférieure à l’inflation, ainsi qu’une compensation très insuffisante de leur glissement vieillesse-technicité, le GVT, devraient dès lors déboucher sur un gel des recrutements, voire sur une suppression de postes au sein des établissements publics d’enseignement supérieur, dont la situation budgétaire est très critique.

C’est là le nœud du problème : les difficultés rencontrées par les présidents d’université dans le passage aux responsabilités et compétences élargies se sont clairement cristallisées autour de l’évolution de la masse salariale, notamment du fait du GVT non pris en compte dans les transferts de charges.

Le recul de la date de départ à la retraite des personnels – quatre mois de plus par an –, l’augmentation de la masse salariale liée aux évolutions naturelles de carrière, les mesures de revalorisation de certaines catégories de personnels, l’augmentation de la charge de travail induite pour les enseignants chercheurs liée à la mise en œuvre des objectifs du plan « Réussir en licence », voilà autant de paramètres décidés sur le plan national qui échappent à la maîtrise budgétaire des responsables d’université.

Alors, soyons honnêtes : les 14, 5 millions d’euros débloqués par le ministère afin de compenser le GVT solde des universités sont une goutte d’eau dans la mare des difficultés de nos universités, malmenées sur le chemin de l’autonomie.

S’agit-il d’une rallonge bienveillante de la part du Gouvernement ? Non ! Ces 14, 5 millions d’euros seront dégagés après redéploiement sur le programme 150, donc au détriment d’autres actions en faveur de l’enseignement supérieur.

S’agit-il d’une compensation intégrale ? Non plus ! Le GVT positif global des universités s’établit à 20 millions d’euros ; 5 millions d’euros restent donc à financer.

Compte tenu de la faiblesse globale de leurs dotations de fonctionnement, les universités au GVT négatif ne sont pas prêtes à mutualiser leurs ressources. Dans ces conditions, les universités les plus en difficulté sont contraintes à des gels de postes ou à des suppressions de filières pour éviter de présenter un budget en déséquilibre.

Malgré toutes les alertes, la sentence est lourde et stigmatisante : après avoir enregistré, pour la deuxième année consécutive, un budget en déficit, huit universités – ou cinq… ou sept… – seront placées sous tutelle de leur rectorat. Faut-il donc comprendre que la réforme « vertueuse » de l’autonomie des universités conduit à accentuer les inégalités territoriales de notre système d’enseignement supérieur, en sanctionnant nos universités de « territoire », qui doivent assumer des charges dont la montée en puissance n’a été ni prévue ni compensée par l’État ?

On en revient donc à l’irresponsabilité de l’État, qui s’abrite derrière des réformes de décentralisation et de renforcement de l’autonomie des acteurs locaux pour mieux se décharger de ses responsabilités financières et les obliger à une récession certes génératrice de moindres dépenses pour le ministère, mais catastrophique pour l’enseignement supérieur.

J’en viens au malaise de la communauté étudiante. Celle-ci, qui a crû de 1, 7 % à la rentrée dernière, est en voie de paupérisation accélérée. Ce budget pour 2012 est, pour nos étudiants, objet de toutes les inquiétudes. La mise en place du dixième mois de bourse, juste prise en compte de la durée de la scolarité, vient occulter la baisse préoccupante d’autres dispositifs comme le fonds national d’aide d’urgence ou les aides à la mobilité internationale.

Le Centre national des œuvres universitaires et scolaires comme les autres opérateurs du programme et les associations voient leurs subventions une nouvelle fois siphonnées : 12, 8 millions d’euros de crédits en moins en 2011, et 6, 3 millions d’euros de moins en 2012. De surcroît, on nous a annoncé que le CNOUS n’était pas en capacité, actuellement, de verser le dixième mois de bourse.

On imagine mal, dans ces conditions, comment les CROUS parviendront à répondre aux besoins de logement étudiant ; l’engagement des nouvelles constructions ou les réhabilitations restent notoirement insuffisants au regard des objectifs fixés par le rapport Anciaux.

Les retards accumulés devraient repousser l’atteinte de ces objectifs à 2016. Il y a fort à craindre que les CROUS, compte tenu de leurs difficultés budgétaires, devront compenser la baisse de leurs marges de fonctionnement par un accroissement des loyers dans les résidences étudiantes.

Mais cela n’était sans doute pas suffisant. Le plafonnement du versement de l’aide personnalisée au logement en fonction du revenu des parents a été évoqué par M. Carrez, rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale. Le secrétaire d’État au logement s’y est déclaré favorable, en totale mésestime du principe d’autonomie des étudiants.

À cela s’ajoute le doublement de la taxation des contrats de complémentaire santé, applicable aussi aux mutuelles étudiantes, …

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