Intervention de Michèle Alliot-Marie

Réunion du 6 décembre 2004 à 22h00
Loi de finances pour 2005 — Défense

Michèle Alliot-Marie, ministre :

Aujourd'hui, le rôle de la défense en matière de cohésion sociale est de deux types.

D'abord, il s'agit d'une formation, certes, très succincte, mais commune aux garçons et aux filles à travers la JAPD. Je me suis efforcée de rendre cet enseignement, très sommaire puisqu'il se déroule sur une seule journée, plus intéressant et plus formateur quant à la responsabilisation de chaque jeune par rapport à son pays. J'ai d'ailleurs fait refaire les modules de présentation de la JAPD, pour les rendre plus attractifs et plus instructifs.

Dans le même esprit, j'ai souhaité que cette journée comporte une initiation au brevet de secourisme, afin que chaque jeune, non seulement sache pratiquer les gestes qui sauvent, mais soit conscient, avec cette possibilité d'intervenir lors d'accidents, qu'il est un peu responsable des autres.

Ensuite et surtout, la professionnalisation a permis un autre type d'intégration sociale et professionnelle qui, bien que concernant moins de personnes, agit plus en profondeur. Chaque année, en effet, la défense recrute entre 30 000 et 35 000 jeunes de tous niveaux, y compris des polytechniciens et des saint-cyriens, mais qui, pour la plupart, n'ont pas de formation.

Après avoir dispensé à ces jeunes une formation professionnelle de base et leur avoir appris un métier, la défense se chargera aussi de leur intégration professionnelle lorsqu'ils partiront, une fois arrivés au terme de contrats qui sont en général courts, c'est-à-dire au bout de cinq ou dix ans. De ce point de vue, nous enregistrons un taux de réussite tout à fait extraordinaire, puisque 96 % des jeunes qui quittent la défense sont intégrés dans les entreprises au titre d'un contrat à durée indéterminée. La défense est ainsi certainement l'organisme d'intégration professionnelle, et donc sociale, le plus performant de notre pays. Ce phénomène se reproduisant tous les ans, le rôle de la défense, bien que souvent méconnu, est donc tout à fait essentiel en la matière.

Pour ce qui concerne les relations actuelles entre le Rwanda et la République démocratique du Congo, il est vrai que la France est intervenue, voilà maintenant dix-huit mois, dans une opération difficile, qui était la première menée de façon autonome par l'Union européenne et qui a été une parfaite réussite.

Aujourd'hui, les conditions sont cependant extrêmement différentes.

D'abord, il ne faut pas oublier que l'ONU a obtenu, à la suite de notre intervention, des effectifs supplémentaires ; deux brigades sont ainsi en cours de déploiement dans cette région.

Ensuite, à notre demande et justement pour tenir compte des événements survenus antérieurement, les moyens, notamment juridiques, de l'ONU ont été renforcés, à l'instar de ceux dont la France avait disposé en la matière.

Aujourd'hui, l'ONU est donc effectivement en mesure d'exercer une pression politique et diplomatique sur les acteurs de cette crise. Cela a d'ailleurs été le cas, notamment la semaine dernière, au niveau du Conseil de sécurité, où le président rwandais a été mis en garde contre toute ingérence en République démocratique du Congo.

Je ne pense donc pas qu'il y ait recours à l'Union européenne, ni même mise en oeuvre du programme ReCAMP, ou renforcement des capacités africaines de maintien de la paix, qui est destiné à permettre l'équipement d'un certain nombre de forces africaines en cas de besoin.

Enfin, vous m'avez interrogée sur le projet de constitution européenne et sa référence à l'OTAN. Bien entendu, nous continuons à dire de l'OTAN qu'elle est le fondement de notre défense dès lors qu'une menace majeure pourrait peser sur l'Europe.

Cela étant, puisque vous me demandez ce qu'attend la France de l'OTAN en dehors de cette action générale, j'aurais tendance à inverser la question : qu'est-ce que l'OTAN attend de la France ? En effet, il ne faudrait pas oublier que notre pays est d'ores et déjà l'un des premiers contributeurs. A ce propos, je vous rappelle que, à l'heure où je vous parle, ce sont des généraux français qui dirigent les deux opérations les plus importantes, et au demeurant extrêmement difficiles, de l'OTAN : le général de Kermabon, au Kosovo, et un autre général français qui, à la tête de l'état-major de l'Eurocorps, dirige les forces de l'OTAN en Afghanistan.

Si la France compte parmi les contributeurs les plus importants de l'OTAN et commande ses deux opérations les plus importantes, elle joue, de surcroît, un rôle moteur dans la création d'une Europe de la défense. Cette dernière est elle-même appelée à intervenir, soit seule, comme alternative à l'OTAN ainsi qu'elle l'a fait, l'année dernière en Ituri, soit en liaison avec l'OTAN dont elle assure la relève, comme elle le fait depuis une semaine en Bosnie ou comme elle l'a fait, l'année dernière, en Macédoine, soit encore au sein de l'OTAN dont elle dirige certaines opérations.

Renforcer la défense européenne, c'est également, pour nous, un moyen de renforcer notre capacité, de façon autonome ou en liaison avec l'OTAN, de travailler pour la paix dans le monde et pour la stabilisation d'un certain nombre de zones.

Par là même, nous remplissons pleinement notre rôle, conformément à notre conception de ce que peut et doit être la place de la France.

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