Intervention de Vincent Delahaye

Réunion du 17 novembre 2011 à 14h30
Loi de finances pour 2012 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Vincent DelahayeVincent Delahaye :

Je souhaite faire deux remarques générales au sujet des hypothèses sur lesquelles repose en partie la construction du budget.

Pour ma part, je m’attends en 2012 à une croissance économique malheureusement plus proche de 0 % que de l’hypothèse de 1 % retenue par le Gouvernement. Sans prétendre avoir une compétence scientifique comparable à celle des services du ministère des finances, je m’interroge sur la sincérité de ce budget. J’espère obtenir quelques précisions dans le cours de la discussion.

De nombreux États membres de l’Union européenne construisent leurs budgets sur des hypothèses volontairement restrictives : c’est notamment le cas du Danemark et des Pays-Bas.

Nous pourrions retenir cette méthode : prendre pour référence la moyenne des estimations des économistes – elle est aujourd’hui de 0, 9 %, au mieux – et retrancher un demi-point, dans un souci de prudence.

La prudence, principe de base de la comptabilité, est aussi une vertu s’agissant de budget. Elle nous épargnera, j’en suis sûr, des mauvaises surprises ; et, en matière financière, elles sont toujours particulièrement désagréables !

En examinant les dispositions du projet de loi de finances relatives aux recettes, nous avons aussi remarqué l’inscription, au titre des recettes non fiscales, de 5 milliards d’euros provenant d’opérations de cession de participations de l’État. Or nous ne disposons d’aucune indication sur les actifs qui pourraient être concernés. Quelles participations seraient cédées et selon quel calendrier ? Est-il vraiment réaliste de compter sur cette recette très hypothétique ? La sincérité de notre budget ne s’en trouve-t-elle pas compromise ?

Ces remarques sur la prudence et la sincérité étant faites, j’aborde la question des recettes fiscales.

Le groupe de l’Union centriste et républicaine est attaché à une évolution de la fiscalité favorisant davantage la compétitivité économique, donc la création d’emplois.

Nous ne souhaitons pas nous lancer dans une concurrence fiscale préjudiciable aussi bien à nos finances publiques qu’à celles de nos voisins européens ; loin de nous l’idée de soutenir un quelconque dumping à l’irlandaise. Notre projet est tout différent : nous militons pour que l’impôt ne pénalise pas les entreprises. Pourquoi, en effet, imposer lourdement la production, alors que l’impôt est toujours supporté in fine par le consommateur ?

Comme les États-Unis, nous accusons un double déficit : à celui de notre budget s’ajoute celui de notre balance commerciale, qui représente 75 milliards d’euros. C’est autant de richesses qui ne sont pas réinvesties au profit de nos entreprises.

Une fiscalité moins compétitive signifie de l’activité en moins, des chômeurs en plus et des recettes d’impôt sur le revenu, de CSG et de TVA grevées à mesure que les caisses d’assurance chômage se vident.

Au-delà de la seule mécanique économique de l’impôt, notre système s’enfonce dans des subtilités byzantines qui le rendent aussi illisible qu’injuste.

L’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés sont grevés par plus de 65 milliards d’euros de niches fiscales. Elles sont une source d’iniquité dans notre société et contribuent à rendre notre système fiscal de plus en plus dégressif, donc injuste envers les moins favorisés.

L’impôt sur les sociétés est marqué par une divergence sans cesse plus grande entre son taux facial, que toutes les entreprises devraient supporter, et son taux réel, qui peut s’avérer dérisoire pour certains groupes.

Il ne s’agit pas d’aligner l’imposition de toutes les sociétés sur le taux le plus élevé, mais de refonder globalement la fiscalité des entreprises pour éviter de pénaliser la production tout en disposant d’impôts justes, aux rendements performants.

Songez, mes chers collègues, que l’imposition de la production représente dans notre pays près de quinze points de la richesse annuelle, soit deux points de plus que dans l’ensemble de l’Union européenne et quatre points de plus qu’en Allemagne. Structurellement défavorisés par rapport à nos principaux partenaires commerciaux, nous devenons de moins en moins compétitifs. Or moins de compétitivité, c’est moins de croissance, moins d’emplois, donc moins de recettes fiscales de toute sorte.

En matière de taxes, les récents débats ont montré que l’imagination était au pouvoir, y compris au Sénat. Tout, décidément, aura été essayé : même la création, en une seule soirée, de dix-sept nouveaux prélèvements pour un montant global de 5 milliards d’euros…

Des mesures s’imposent pour restaurer la compétitivité et l’efficacité fiscales. Pour leur part, les sénateurs du groupe de l’Union centriste et républicaine sont attachés à une réforme profonde et globale, qui nous permette de sortir de l’ornière du déficit public structurel.

Notre collègue Aymeri de Montesquiou a, dans son excellente intervention, évoqué l’instauration d’une « TVA-compétitivité » destinée à soutenir la modernisation de notre économie.

Nous proposons également une réduction importante des niches fiscales, propre à restaurer l’efficacité de nos impôts dans la forme, c’est-à-dire selon l’assiette et le taux qui sont réellement les leurs.

Cette réforme doit servir de préalable à la création d’une nouvelle tranche de l’impôt sur le revenu, voire de deux, ce qui permettra d’accroître le produit de ce prélèvement.

C’est la raison pour laquelle nous proposerons, sur l’initiative de Jean Arthuis, de remplacer la contribution exceptionnelle prévue à l’article 3 du projet de loi de finances par deux tranches supplémentaires d’impôt sur le revenu.

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