Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 17 novembre 2011 à 14h30
Loi de finances pour 2012 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

Il en est ainsi des plans d’épargne en actions ou des dispositifs concernant les opérations sur titres des plus grandes entreprises.

Nous considérons, pour notre part, qu’il est nécessaire que soit promu, autant que faire se peut, tout circuit de financement de l’économie qui échappe à la logique de la bourse et des marchés.

Nous avons, d’ailleurs, en France, avec le livret A, le livret de développement durable et bien d’autres outils financiers, de quoi intervenir dans un premier temps et de quoi envisager de nouvelles sources de financement de l’activité économique.

La « banalisation » du livret A, gaspillage pour gaspillage, ce sont 60 milliards à 80 milliards d’euros d’épargne populaire qui ont été confiés aux établissements bancaires, lesquels ont pu en user et en abuser ! Les mal-logés, demandeurs de logements sociaux financés sur ces ressources, peuvent attendre ! Or la construction de logements est aussi un facteur de croissance.

Mais attardons-nous un peu sur les établissements bancaires. Nos banques gèrent un flux de plus de 1 500 milliards d’euros, somme de l’épargne à vue des entreprises et des ménages, non rémunérée. Il serait temps de s’attacher à ce que ces sommes soient utilisées au mieux. Or nous n’avons pas l’impression, au vu des difficultés que rencontrent nombre de PME pour obtenir le moindre crédit, que ce soit tout à fait le cas.

Dans le numéro de La Tribune en date du 6 octobre, on pouvait lire que 60 % des appels d’offres ne trouvent pas de financement auprès des banques françaises. Et, pendant ce temps-là, on nous tient de beaux discours sur la croissance…

En tout état de cause, il va bien falloir se décider à mettre en place une taxation des transactions financières. La disposition a été votée en loi de financement de la sécurité sociale. Indépendamment de ce vote, une telle mesure illustre bien la volonté, largement partagée dans l’opinion, de ne plus laisser libre cours aux dérèglements des marchés.

Allons plus loin sur la question des choix fiscaux que nous devons porter : la situation des comptes publics trouve son origine dans l’accumulation ininterrompue de divers cadeaux fiscaux qui ont, au fil du temps, creusé les déficits publics sans régler les questions essentielles de l’emploi, de l’équilibre de notre industrie, de notre potentiel de développement. Marc Massion et François Marc ont évoqué l’exemple de la réforme de la taxe professionnelle.

Nombreux sont ceux qui, sans la moindre preuve, répandent sur les ondes, dans la presse, ou par tout moyen moderne de communication, la fable de l’excès de dépenses publiques dans notre pays. Mon cher Marc Massion, je vous rejoins également sur ce point.

Ce n’est pas l’excès de dépenses publiques qui a créé le déficit public, en tout cas celui de l’État. Car, voyez-vous, les données sont terribles !

En 1985, la part des dépenses de l’État dans le PIB était de 20 % environ. Nous avons connu, à partir de cette année-là, un long « effort », toujours en cours, de réduction des obligations fiscales et sociales des entreprises. Où en est-on aujourd’hui ? Nous avons plus de 1 300 milliards d’euros de dette d’État et le PIB atteint environ 1 960 milliards d’euros en 2011. Or, pour 2012, nous avons, entre l’État et les budgets annexes, 380 milliards d’euros de dépenses, dont presque 50 milliards d’euros, pour le seul service de la dette.

En d’autres termes, mes chers collègues, nous en sommes au même taux de 20 % du PIB pour les dépenses de l’État. Cela signifie tout simplement que la situation n’a pas profondément évolué depuis 1985...

Qu’on cesse donc de stigmatiser l’excès des dépenses publiques en France ! Ce discours ne vise qu’à cacher ce que vous faites pour les entreprises et qui n’est pas bon pour notre pays.

La stabilité des dépenses publiques d’État n’a nullement empêché le creusement des déficits. Cela prouve bien que ce sont des années et des années de diminution des recettes fiscales qui ont conduit à la situation que nous connaissons.

On a ainsi réduit les cotisations sociales des entreprises pour « alléger le coût du travail », diminué l’impôt sur les sociétés pour « assurer la compétitivité de nos entreprises » – M. le président de la commission des finances a repris cette antienne tout à l'heure –, réformé la taxe professionnelle pour « ne pas pénaliser l’embauche et l’investissement », mais cela n’a créé aucun emploi. Nous avons par ailleurs multiplié les régimes fiscaux particuliers, les niches fiscales et, surtout, nous avons creusé les déficits... Il faut mettre fin à cette logique !

Mais je vois qu’il me faut maintenant conclure.

La dictature des marchés, les peuples n’en veulent pas et ils ne manqueront pas, le moment venu, de nous le faire savoir.

La France n’a besoin ni d’un Mario Monti ni d’un Loukas Papademos ; elle a besoin d’une nouvelle politique, d’une nouvelle espérance, d’un nouveau projet. Ce nouveau projet, que nous tentons de définir et que nous défendrons, est bien différent de celui qui nous est proposé. Nous ne voterons donc pas le présent projet de loi de finances.

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