Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 29 novembre 2011 à 14h30
Loi de finances pour 2012 — Santé

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé », qui figurent en loi de finances, sont sans commune mesure avec les sommes dont dispose la sécurité sociale, mais ils sont tout aussi essentiels, tant pour les professionnels que pour les usagers du système de soins.

D’ailleurs, et cela a été souligné par M. le rapporteur spécial comme par M. le rapporteur pour avis, ces crédits font aujourd’hui l’objet d’une augmentation en trompe-l’œil. En effet, la hausse de 5 % que cette mission affiche pour 2012 correspond quasi exclusivement au nouveau mode de financement de l’agence chargée de la sécurité sanitaire, faisant suite au scandale du Mediator.

Nous apprécions positivement le fait que le financement de la nouvelle agence ne soit plus lié au nombre d’autorisations de mise sur le marché délivrées par ses soins. En effet, cette situation était source d’ambiguïtés. La rupture avec ce mode de financement entraîne des dépenses supplémentaires pour le budget, ce dont vous tenez compte avec l’augmentation des crédits de la mission.

Mais nous restons très vigilants. Nous ne voulons pas revoir ce qui s’était passé pour le projet de loi de finances pour 2011, lorsque le Gouvernement avait ramené à zéro la dotation de l’État à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. Les missions importantes de cet organisme nécessitent des financements durables. Nous souhaiterions que le Gouvernement s’engage aujourd’hui à ne pas réduire les moyens financiers et humains qui seront dédiés à cette structure.

Nous rejoignons également M. le rapporteur spécial lorsqu’il regrette que « la globalisation des ressources » des agences régionales de santé « altère la lisibilité des crédits qui leur sont affectés ». Une telle situation nous prive de lisibilité sur l’utilisation des crédits alloués aux ARS, et nous ne sommes pas en mesure de comparer pleinement les moyens, leur utilisation et les politiques mises en œuvre dans chacune des régions.

Il est donc impossible de vérifier si les régions les plus affectées par les inégalités territoriales en matière de santé bénéficient de compléments financiers destinés spécifiquement à les réduire.

C’est cette même logique de globalisation, couplée à la régionalisation des compétences, qui rend impossible l’élaboration d’une véritable stratégie en termes de santé publique. S’il est bien évidemment souhaitable que les régions bénéficient de marges d’action qui leurs sont propres, compte tenu des réalités locales, une politique de prévention nationale est primordiale.

Ce constat me conduit à aborder le programme « Prévention des risques infectieux et des risques liés aux soins ». Si nous prenons acte de son augmentation modérée, les remontées qui nous viennent du terrain nous inquiètent. En effet, il semblerait que cette hausse se fasse au détriment des opérations de proximité.

Or les besoins sont grands et les politiques préventives, notamment en matière de dépistages de l’hépatite C et du VIH, ont besoin d’un sérieux renforcement. Ainsi, selon le bulletin épidémiologique de l’InVS, en date du 25 mai 2011, « près d’un demi-million de personnes en France vivent avec une hépatite chronique B ou C, et la moitié d’entre elles ne le savent pas ».

Prenons le cas du virus du SIDA : on estime à 6 700 par an le nombre de personnes découvrant leur séropositivité et à 50 000 le nombre total de celles qui l’ignorent. Le cas des jeunes est particulièrement dramatique. Chaque jour, deux nouveaux jeunes de quinze ans à vingt-quatre ans sont infectés, une situation qu’ils ignorent souvent, puisque 71 % d’entre eux déclarent n’avoir jamais réalisé de dépistage. Il semble bien que notre modèle préventif soit en échec.

La situation exige donc que les pouvoirs publics envisagent un renouvellement et un renforcement de nos campagnes de prévention et de dépistage.

À cette occasion, madame la secrétaire d’État, nous souhaiterions vous interroger sur les tests rapides à orientation diagnostique, les TROD. En effet, un arrêté du mois de novembre 2010 a étendu les conditions d’utilisation de ces tests, ce qui est une bonne chose. Toutefois, les acteurs associatifs ne sont toujours pas autorisés à les utiliser. Pourtant, comme le démontre une étude biomédicale menée par l’association AIDES, une extension de ces tests rapides – on obtient le résultat en demi-heure – dans les lieux que fréquentent les populations les plus exposées est de nature à toucher des publics que l’on ne toucherait pas autrement.

Les seuls dispositifs qui existent actuellement consistent à faire venir les personnes vers les centres de dépistage. Ne serait-il pas pertinent, tout en finançant les associations, de les autoriser à faire de tels tests ?

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