Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je citerai deux chiffres : cette année encore, les crédits d'équipement relatifs à la dissuasion augmentent de plus de 20 % et représentent près de 10 % du budget de la défense, ce qui tranche avec la pauvreté des budgets sociaux, alors même que de nombreuses voix, notamment de militaires et de membres éminents de la majorité gouvernementale, s'interrogent sérieusement sur le bien-fondé d'une politique de développement du nucléaire.
La modernisation des armes nucléaires se justifie d'autant moins que ces dernières sont inadaptées aux menaces mondiales du terrorisme et des conflits régionaux. Ainsi, il est urgent de repenser en profondeur notre stratégie et de cesser de penser en termes de dissuasion comme centre et vecteur de la défense.
La commission scientifique de l'Union interparlementaire des pays membres et associés de l'OTAN, dont je suis membre, a tenu sa dernière assemblée générale en Italie, le 12 novembre dernier. Ce fut l'occasion d'un débat à la fois émouvant et sérieux, qui démontre les dangers qu'encourt l'humanité avec la progression des armes nucléaires.
Les Etats-Unis multiplient par deux les crédits consacrés au nucléaire dans l'espace. A cela s'ajoutent les déclarations de M. Poutine nous annonçant de nouvelles armes nucléaires. Il y a vraiment de quoi être très inquiet !
L'avenir nécessite un repositionnement clair, qui doit mettre l'accent sur une politique multidimensionnelle de sécurité : j'entends par là une politique en adéquation et en interaction avec l'environnement interne et européen, international et géopolitique, une politique de relance du processus multilatéral onusien.
En effet, il convient de relancer et de promouvoir l'arsenal législatif en matière de désarmement et de non-prolifération nucléaire dont l'ONU s'est dotée.
A cet égard, je rappelle qu'à l'occasion de la révision du traité de non-prolifération nucléaire qui interviendra l'an prochain à l'ONU, notre pays doit jouer son rôle et garantir nos engagements internationaux, ce dont je ne doute pas. Je souhaite que la France mène une politique courageuse pendant cette discussion à l'ONU, à l'image de la position qu'elle a prise sur l'Irak.
Il faut cesser d'agir en termes de globalisation de l'environnement, comme le fait le gouvernement des Etats-Unis à l'heure actuelle, au travers d'une vision simpliste du monde, pour justifier un désir de domination et une surenchère à l'armement. Il faut à la fois se détacher d'un quelconque suivisme et prévenir tout risque d'être happé dans cette spirale infernale.
Cette mise en garde n'est pas anodine et trouve son prolongement dans la mise en place de l'actuelle politique européenne de défense qui, même si elle est embryonnaire, appelle toute notre vigilance, et c'est pourquoi nous voterons contre le traité constitutionnel européen.