Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, ce budget, qui est le dernier de la législature, est, une fois encore, sur la voie du déclin. Bien que la tendance à la baisse des crédits se soit ralentie, il suit la pente entamée depuis vingt ans qui diminue peu à peu les moyens du ministère des affaires étrangères et européennes.
Cela est d’autant plus regrettable que ce budget est censé donner à notre pays les moyens nécessaires à la défense de ses valeurs, de sa langue, de sa culture, mais aussi de ses intérêts à travers le monde.
Le résultat est que l’action extérieure de la France est handicapée par un affaiblissement continu de notre réseau diplomatique et culturel. Pourtant, avec un budget réduit, l’efficience du travail réalisé dans nos représentations permanentes, nos ambassades, nos consulats, nos écoles, nos centres culturels, et à travers les programmes d’aide et de coopération, est remarquable.
Je veux à cet égard saluer la compétence et la grande qualité des fonctionnaires et des personnels de tous grades qui mettent œuvre au quotidien, et parfois dans des conditions difficiles, les grandes orientations de la politique étrangère de notre pays.
Cela étant dit, je partage bon nombre des critiques qui ont été émises par les rapporteurs et je veux formuler ici quelques remarques sur les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».
Avec un peu moins de 3 milliards d’euros de crédits de paiement et 2, 914 milliards d’autorisations d’engagement, ce budget, à structure constante, affiche, par rapport à la loi de finances initiale pour 2011, une diminution de 2 % en autorisations d’engagement et de 1, 4 % en crédits de paiement.
Force est de constater que la révision générale des politiques publiques, qui s’applique à tous les ministères, est beaucoup plus sévère pour les personnels du ministère des affaires étrangères.
Depuis 2006, environ 1 400 emplois ont été supprimés au sein du ministère. D’ici à 2013, 450 le seront encore ; sur quatre personnes partant à la retraite, trois emplois disparaîtront.
Le programme « Action de la France en Europe et dans le monde », qui finance une grande partie de l’administration centrale et le réseau des ambassades, est faible en dotations – 522 millions d’euros pour 162 chancelleries – et est particulièrement touché : les crédits diminuent de 0, 8 % en autorisations de paiement et de 1, 3 % en crédits de paiement par rapport à 2011. La dégradation se poursuit donc.
Vous admettrez, monsieur le ministre d’État, que les perspectives ne sont guère réjouissantes pour ces hommes et ces femmes qui se consacrent tant à notre diplomatie.
Je voudrais particulièrement relever la diminution de 14 % de notre contribution aux opérations de maintien de la paix. Je comprends qu’il s’agit de prévoir la fin de la mission des Nations unies à laquelle nous participons au Tchad et en République centrafricaine.
Mais parce que les crédits consacrés à ces opérations ont été souvent sous-estimés et que les conflits dans le monde ne sont pas sur le point de diminuer, je redoute que nous n’ayons plus à l’avenir les moyens de répondre aux demandes de maintien de la paix de l’ONU.
Je crains qu’elle ne soit le prétexte à privilégier désormais des opérations sous le seul drapeau de l’OTAN.
Enfin, le programme « Diplomatie culturelle et d’influence », dont l’intitulé traduit assez l’importance, connaît lui aussi des difficultés et des disparités dans la répartition des crédits. C’est ainsi, par exemple, que malgré ses besoins et le rôle déterminant qu’elle joue pour le rayonnement de notre langue, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger reçoit une subvention qui stagne.
Les seuls crédits qui progressent sont ceux du programme « Français à l’étranger et affaires consulaires », l’essentiel de cette progression s’expliquant d’ailleurs par l’approche des élections législatives.
Si un budget est en grande partie la traduction d’une politique, je considère alors, monsieur le ministre d’État, que les crédits qui vous sont alloués ne vous permettront pas d’assurer à notre pays sa capacité de rayonnement et d’influence, c’est-à-dire de tenir la place qui doit être la sienne.
Vous aviez vous-même, en d’autres temps, tiré la sonnette d’alarme et reconnu que si nous continuions dans cette direction, l’outil de notre influence et de notre diplomatie serait irrémédiablement cassé.
Aujourd’hui, vous faites preuve de davantage de pragmatisme et vous feignez de croire qu’il est malgré tout possible de faire mieux avec moins.
Pourtant, dans le contexte international actuel, avec la globalisation, la guerre financière et économique sans merci que se livrent les États, la singularité de notre pays, son influence politique et éthique pourraient être un contrepoids indispensable à la domination silencieuse des nouveaux maîtres du monde que sont devenus les marchés financiers.