Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne m’attarderai pas sur le contexte économique et budgétaire dans lequel a été préparé le budget 2012 ; vous l’avez tous en tête.
Les contraintes, dans cette situation, vous sont connues et elles s’imposent, bien entendu, aux Affaires étrangères et européennes, comme aux autres ministères.
Je voudrais simplement rappeler que je ne renie rien de ma prose de l’année 2010. La situation que nous dénoncions à ce moment-là, avec Hubert Védrine, a des origines lointaines, puisqu’elles remontent à plus de dix ans. Les gouvernements successifs ont pris leur part de responsabilité dans cette lente dégradation.
Nous sommes, aujourd’hui, dans un contexte profondément différent.
Je tiens tout d’abord à remercier de leur rapport les rapporteurs spéciaux de la commission des finances. Ils y rappellent l’ampleur des efforts consentis au cours de ces années par ce ministère, et accordent une grande attention à l’évolution de nos réseaux, qu’ils soient diplomatiques, consulaires ou d’influence.
Je note, messieurs les rapporteurs spéciaux, que vous exprimez certaines inquiétudes quant à la révision, à la baisse, des crédits prévus pour les opérations de maintien de la paix et les contributions internationales. Je souhaite vous apporter, à ce sujet, tous les éclaircissements nécessaires.
Nous avons engagé la préparation de ce projet de loi de finances pour 2012 avec un double objectif : renforcer notre outil diplomatique, tout en contribuant à l’effort collectif de redressement de nos finances publiques.
Cette équation est délicate, j’en ai bien conscience, mais elle a, me semble-t-il, pu être résolue, à la faveur d’économies de constatation que nous avons redéployées sous les plafonds prévus dans le cadre du budget triennal 2011-2013, nos crédits respectant ainsi la discipline budgétaire et les engagements de réduction des dépenses pris au titre de la RGPP.
Si l’année 2012 doit ainsi permettre d’amorcer une correction de la trajectoire s’agissant des moyens de notre diplomatie, cela se fera dans un cadre dont j’entends rappeler, ici, le caractère tout à fait responsable.
Je tiens à le préciser, l’évolution d’ensemble de nos contributions obligatoires recouvre en son sein des mouvements de sens contraire.
Tout d’abord, le budget des opérations de maintien de la paix enregistre une baisse de 65 millions d’euros. Cela tient en grande partie à la fermeture, en 2011, de la MINURCAT, la mission des Nations unies en République centrafricaine et au Tchad, soit moins 40 millions d’euros.
Ensuite, l’évolution procède également de la diminution des besoins pour d’autres opérations et d’une hypothèse de change entre le dollar et l’euro plus favorable en 2012, fondée sur un dollar à 1, 40 euro, et non plus 1, 35 euro. C’est l’hypothèse retenue, faut-il le rappeler, pour l’ensemble du volet « dépenses » du projet de loi de finances pour 2012. Il ne s’agit donc pas d’un choix isolé du ministère des affaires étrangères et européennes.
Enfin, il faut noter, dans le sens contraire, une hausse d’environ 25 millions d’euros des contributions au budget des organisations internationales et de la justice internationale.
Ainsi, la budgétisation des contributions ne se limite pas à prendre en compte des dépenses à la baisse ; elle incorpore également l’évolution à la hausse de certains postes.
Je conteste donc l’idée selon laquelle ces contributions pourraient être une « variable d’ajustement », permettant de dégager des « marges artificielles ». Ni ce ministère ni, a fortiori, celui du budget n’ont d’intérêt à engager un quelconque « pari » s’agissant de dépenses obligatoires.
Messieurs les rapporteurs spéciaux, je retiens également de votre rapport un intérêt marqué pour la politique immobilière du Quai d’Orsay. Vous le rappelez dans vos conclusions, les dépenses d’entretien lourd de notre immobilier à l’étranger sont essentiellement financées par des produits de cessions immobilières versés sur un compte d’affectation spéciale.
Je ne peux que partager votre analyse, selon laquelle ce mode de financement est aléatoire et peu incohérent au regard des impératifs de bonne gestion, qui justifieraient une programmation à long terme.
À partir de ce constat, j’ai souhaité que le projet de loi de finances pour 2012 soit l’occasion de recréer une ligne spécifiquement dédiée aux besoins immobiliers d’entretien lourd.
Initialement dotée de 5 millions d’euros, cette ligne a été, c’est vrai, mise à contribution, à hauteur de 2, 5 millions d’euros, dans le cadre du premier coup de rabot découlant du plan annoncé le 24 août dernier. Cette ligne n’en permettra pas moins de procéder, dès l’an prochain, à des opérations prioritaires de remise aux normes.
Je reviendrai un peu plus tard sur les grandes orientations de notre politique immobilière, pour répondre aux questions qui m’ont été notamment posées par Mme Aïchi, rapporteur pour avis.
Je suis en outre très sensible à l’analyse que vous faites, messieurs les rapporteurs spéciaux, des dépenses de fonctionnement de mon ministère, dépenses dont vous soulignez le caractère contraint.
Il convient en effet de noter que les dépenses de fonctionnement de nos postes à l’étranger sont soumises à des facteurs non maîtrisables, tels que la hausse des loyers locaux, le prix de l’énergie et des fluides, ou bien encore les tarifs aériens.
C’est ce constat qui m’a conduit à refuser une nouvelle diminution des budgets de fonctionnement des postes en 2012, qui resteront donc au même niveau qu’en 2011, à défaut de pouvoir faire plus.
Un tel choix est contrebalancé par un effort sur d’autres dépenses, plus aisées à encadrer – communication, informatique, frais de représentation –, l’effort du ministère allant, sur ces lignes, au-delà de la norme gouvernementale.
Je souhaiterais réagir aux développements que vous consacrez à l’évolution des réseaux qui relèvent du ministère, qu’il s’agisse du réseau diplomatique, du réseau consulaire, ou bien encore de notre réseau culturel et d’influence.
En ce qui concerne le réseau diplomatique, vous connaissez mon attachement au maintien d’une présence française universelle.
Nos intérêts sont mondiaux. Nous devons, en conséquence, promouvoir nos positions, notre langue, les intérêts de nos compatriotes, partout dans le monde. Il n’empêche, notre réseau doit s’adapter, et ce pour une double raison.
D’une part, la géographie politique nous l’impose. Nous avons ainsi ouvert, au mois de juillet, une nouvelle ambassade à Djouba, au Soudan du Sud, au moment de la proclamation de son indépendance.
D’autre part, il importe que nos moyens soient ajustés, pays par pays, en fonction des enjeux de notre présence.
Vous le rappelez dans votre rapport, la RGPP a ainsi conduit à un « reformatage » du réseau diplomatique, permettant d’identifier trois types d’ambassades : une trentaine d’ambassades à « missions élargies » ; une centaine d’ambassades à « missions prioritaires » et les plus petites, dites « postes de présence diplomatique », qui sont une trentaine également.
Cette classification a permis de nourrir une véritable réflexion sur les missions assignées à chacun de nos postes, missions qui ont été adaptées à nos intérêts pays par pays.
Il en va de même s’agissant du réseau consulaire. Je tiens à le souligner, celui-ci s’est redéployé sans que soit affectée sa capacité à demeurer le premier au monde, par le nombre et la qualité des services qu’il rend à nos compatriotes.
J’ai entendu cet après-midi, de la bouche de plusieurs orateurs, cette critique selon laquelle la présence française à l’international serait en voie de quasi-disparition. Je rappelle que nous avons le premier réseau consulaire et l’un des tout premiers réseaux diplomatiques au monde.