Intervention de Alain Juppé

Réunion du 29 novembre 2011 à 14h30
Loi de finances pour 2012 — Action extérieure de l'état

Alain Juppé, ministre d’État :

Il est vrai que la situation des crédits, très tendue, a amené à revoir, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2011, les modalités de financement de la troisième catégorie aidée de la Caisse des Français de l’étranger, c’est-à-dire les assurés individuels résidant hors de l’Espace économique européen et dont les ressources n’excèdent pas la moitié du plafond de la sécurité sociale.

Conformément à l’article 140 de la loi de finances pour 2011, le budget de l’action sanitaire et sociale de la Caisse des Français de l’étranger est désormais financé par cette dernière ainsi que par un concours de l’État, fixé à 498 000 euros. Un groupe de travail a été constitué sur l’exercice de la solidarité nationale envers les expatriés en matière de protection sociale : piloté par la Direction de la sécurité sociale, il permettra de préciser les modalités de financement de la troisième catégorie aidée.

Mesdames, messieurs les sénateurs, j’en viens maintenant aux observations formulées par les différents rapporteurs pour avis, en commençant par Mme Aïchi et M. Bernard-Reymond.

Madame, monsieur le rapporteur pour avis, je vous félicite de votre rapport consacré aux crédits du programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde ».

S’agissant, tout d’abord, des effectifs de ce programme, je ne peux que partager votre constat selon lequel mon ministère a fourni de considérables efforts au cours des dernières années, qui se sont traduits, je le rappelle, par une baisse de 20 % en dix ans.

Sur ce point, j’ai obtenu un arbitrage du Premier ministre afin qu’il soit pris acte des efforts déjà consentis, notamment en 2010, au cours de laquelle une avance avait été prise.

Notre effort pour 2012 en matière de réduction d’emplois a ainsi pu être revu à la baisse, passant de 226 à 140 ETP : l’effort à fournir demeure évidemment important, mais il permet en tout état de cause de ne pas aller au-delà de l’objectif assigné au ministère pour la période 2009-2013.

Je tiens à le préciser, si les effectifs du programme 105 et du programme 151 « Français à l’étranger et affaires consulaires » ont été les premiers à être mis à contribution dans le cadre de la RGPP I, ils le seront dans une moindre mesure dans celui de la RGPP II.

Par ailleurs, vous relevez la très légère baisse qu’enregistrent les crédits de la Direction de la coopération de sécurité et de défense au titre du premier coup de rabot récemment voté par l’Assemblée nationale.

Je voudrais réaffirmer ici que ce secteur demeure une priorité de l’action du ministère et que les plans et programmes en cours seront poursuivis avec détermination, notamment dans la zone sahélienne, qui fait à juste titre l’objet de vos préoccupations.

En ce qui concerne les questions immobilières, auxquelles vous accordez, dans votre rapport, une importance toute particulière, je vous sais gré d’avoir souligné l’important chantier de rationalisation de notre parc immobilier.

Je le disais tout à l’heure, la politique consistant à financer l’intégralité de nos besoins immobiliers, y compris l’entretien, à partir de produits de cessions, a atteint ses limites. À cet égard, la rebudgétisation partielle de l’entretien de notre parc immobilier marquera, je l’espère, un tournant.

Madame Aïchi, j’ai été quelque peu surpris par vos interrogations relatives à notre politique immobilière, dont je veux souligner la totale transparence : l’ensemble des cessions sont validées dans leurs principes comme dans leurs montants par la commission interministérielle chargée d’émettre un avis sur les opérations immobilières de l’État à l’étranger, la CIM, présidée par un ancien membre de la Cour des comptes.

Bien évidemment, il est totalement impossible, au moment de la présentation d’un budget primitif, de prévoir ce qu’il va se passer dans l’année qui suit. Nous saisissons des opportunités immobilières : un certain nombre d’opérations sont susceptibles de se dénouer sans qu’elles aient été forcément prévues.

Quant à la différence entre le montant respectif des estimations et des réalisations, je ne sais que dire ! Vous-même avez peut-être, sur le plan intérieur, l’expérience de l’évolution du marché immobilier et de la difficulté de faire des prévisions. Celles et ceux à qui il arrive, à titre personnel, de mettre un bien en vente le savent, la réalisation n’est pas toujours à la hauteur des attentes. Il peut y avoir d’heureuses surprises, mais tout dépend de l’état de tension du marché immobilier.

C’est en tout cas ainsi que cela s’est passé. Notre politique me semble donc assez intelligente dans son principe : il ne s’agit pas de figer notre patrimoine, car celui-ci doit évoluer. Dans certains cas, nous avons intérêt à regrouper nos implantations ; dans d’autres, mieux vaut créer des bâtiments nouveaux.

Je m’inscris tout à fait en faux contre l’idée selon laquelle la présence immobilière de la France à l’étranger serait en voie de dégradation. Après son inauguration, quelques semaines plus tôt, par le Président de la République, j’ai été le premier à résider dans notre toute nouvelle ambassade en Chine. Je peux vous le dire, elle est magnifique, à la hauteur de l’influence que la France entend avoir dans ce pays et de l’image qu’elle veut y donner, contrairement aux bâtiments dont nous disposions auparavant.

Inversement, il est des cas où il faut peut-être réduire la voilure. Était-il absolument indispensable que la France soit propriétaire, sur les hauts de Hong Kong, d’une villa pratiquement inaccessible par les voies de circulation habituelles, une villa évaluée puis vendue à 50 millions de dollars ? Il est selon moi beaucoup plus astucieux, pour promouvoir l’influence française, d’acheter ou de louer un appartement de 400 mètres carrés, comme nous nous apprêtons à la faire, en centre-ville.

Une gestion intelligente de notre patrimoine immobilier peut nous amener à rationaliser notre dispositif.

J’évoquerai maintenant le rapport pour avis consacré au programme 151 de Mme Conway Mouret et de M. del Picchia, dont je veux saluer la qualité.

Pour ce qui est de l’organisation de notre réseau, j’ai déjà évoqué l’évolution récente de nos implantations. Concernant les élections de 2012, je vous sais gré, madame, monsieur, d’avoir rappelé la spécificité des modalités de vote à l’étranger – à l’urne, par procuration, par correspondance et par voie électronique – et l’effort du ministère qui consiste à mettre en place près de 800 bureaux de vote, contre 547 pour l’élection présidentielle de 2007.

Je connais vos inquiétudes quant au retard pris dans la réalisation du test de vote électronique, auquel participeront prochainement plus de 16 000 volontaires.

Le comité de pilotage interministériel, réuni le 10 novembre dernier, a constaté le très bon avancement du projet. Cependant, afin d’être certain de mener à bien ce test mondial dans des conditions optimales et pour que celui-ci porte sur la totalité des fonctionnalités, le comité a préféré reporter le test initialement prévu en décembre à la fin du mois de janvier, ce qui permettra, à mon sens, un bon déroulement des élections.

En ce qui concerne la question des aides à la scolarité, vous avez noté que ce budget conforte la dotation accordée aux bourses et prises en charge. Comme votre commission a pu le constater, au sein de cette enveloppe d’aide à la scolarité, ce sont les bourses qui connaissent la dynamique la plus forte, puisque, entre 2011 et 2012, elles passent de 84 à 93 millions d’euros.

En revanche, le coût de la prise en charge a, lui, été stabilisé. On ne peut donc plus parler de dérapage à propos d’une mesure dont la soutenabilité budgétaire est désormais garantie. Nous reviendrons tout à l’heure sur l’amendement qui a été déposé à ce sujet.

Je voudrais réagir brièvement sur les sujets évoqués par MM. René Beaumont et Jean Besson, rapporteurs pour avis du programme 185.

Tout d’abord, concernant les crédits de ce programme, je ne peux évidemment que constater avec vous qu’ils ont souffert des quinze dernières années ; je n’y reviens pas.

Vous avez raison de souligner que ces crédits ont fourni une contribution importante au premier plan d’économies mis en œuvre par le Gouvernement. Je tiens simplement à vous faire observer que, sur les 8, 4 millions d’euros prélevés sur les crédits du programme 185, dans le cadre du « premier rabot », six seront prélevés sur le fonds de roulement de l’AEFE et de l’Institut français, sans dommages pour l’activité de ces organismes.

S’agissant de l’audiovisuel extérieur de la France, je pense qu’il mérite un examen attentif.

Un récent rapport de l’Inspection générale des finances, actuellement en cours d’examen, soulève un certain nombre de questions quant à la gouvernance du dispositif.

Dans mon esprit, le Quai d’Orsay a vocation à voir sa place renforcée dans cette gouvernance et, en ce qui me concerne, j’y veillerai ! De plus, un certain nombre d’outils que nous finançons – TV5, notamment – permettent de diffuser notre message et de faire rayonner notre langue. Nous devons rester vigilants et nous garder de renoncer !

J’en viens, ensuite, à notre politique d’accueil des étudiants étrangers, pour rappeler que la France reste aujourd’hui le troisième ou le quatrième pays d’accueil au monde. Quand j’entends dire que nous nous serions barricadés dans une forteresse et que l’image de la France est devenue celle d’un territoire d’exclusion, je sais que cela ne correspond en aucune manière à la réalité !

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