Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, à Lisbonne, en 2000, les quinze pays de l'Union européenne se sont fixé comme objectif de faire de l'Union européenne la première économie de la connaissance d'ici à 2010.
Conscients que le développement des échanges est un puissant moteur de l'économie, les Quinze ont voulu poursuivre la libéralisation des échanges, tant immatériels que matériels : c'est ainsi qu'a été adopté le fameux « paquet télécom », qui assoit la concurrence dans l'ensemble du secteur des technologies de l'information et de la communication, et que nous avons transposé l'année dernière grâce à la loi relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle.
Les Quinze ont également décidé de poursuivre la libéralisation des échanges matériels, en appelant à la poursuite de l'ouverture des marchés dans le secteur des transports et dans le celui des services postaux.
Les services postaux sont, en effet, un instrument essentiel de communication et d'échanges.
Dès 1992, dans son Livre vert sur le développement du marché unique des services postaux, la Commission européenne avait ouvert le débat sur une politique communautaire en identifiant les étapes de réalisation de l'Europe postale.
Ce processus engagé avec nos partenaires européens a permis d'aboutir à l'adoption de la directive du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité, dite plus simplement « directive postale ».
L'intitulé même de cette directive met en évidence le lien indissociable qui doit unir les mesures qui visent une ouverture progressive et contrôlée des marchés et l'amélioration de la qualité de service pour les utilisateurs.
Ainsi, la France a toujours défendu dans la négociation européenne la nécessité de prendre en compte les objectifs de service public et d'aménagement du territoire et a préconisé une harmonisation à un haut niveau de qualité dans le cadre d'un large périmètre de services réservés.
Cette directive postale de 1997, rappelons-le, aurait dû être transposée avant le 31 décembre 2000.
Par la suite, et après la décision des ministres européens des postes du 15 octobre 2001, cette directive a été modifiée par la directive du 10 juin 2002 afin de poursuivre l'ouverture à la concurrence des services postaux.
Cette seconde directive aurait dû être transposée avant le 31 décembre 2002.
La France est ainsi aujourd'hui en retard dans ses obligations de transposition. Et logiquement, deux procédures sont, hélas ! en cours devant la Cour de justice des Communautés européennes, concernant tant la mise en place d'un régulateur indépendant des activités postales que la délimitation du monopole de La Poste, appelé « secteur réservé ».
Le Sénat a adopté en première lecture le projet de loi relatif à la régulation des activités postales en janvier 2004. Plus d'un an s'est écoulé avant la deuxième lecture que nous abordons aujourd'hui. Mais c'était certainement le temps nécessaire à la réflexion et au débat. Il nous faut aujourd'hui, au travers de ce projet de loi, non seulement transposer les directives européennes postales de 1997 et de 2002, mais aussi doter La Poste et ses concurrents des outils indispensables pour devenir des acteurs majeurs du marché mondial des services postaux.
Je souhaite aborder maintenant ces deux questions en revenant sur les avancées consacrées dans ce texte lors de la première lecture par les deux assemblées. C'est aussi l'occasion pour moi de souligner la qualité des travaux que le Sénat a d'ores et déjà menés sur ce texte et la contribution éminente de la commission des affaires économiques, en la personne de son président, M. Jean-Paul Emorine, et de son rapporteur, M. Pierre Hérisson.
Les directives postales que ce projet de loi vise d'abord à transposer sont les garantes de la qualité des services postaux.
Les Etats membres de l'Union européenne ont l'obligation d'assurer la disponibilité d'une offre comprenant toute la gamme du « service universel ». Cette gamme doit être accessible tous les jours ouvrables, sur tout leur territoire, et ouverte à tous les utilisateurs, à un prix abordable. En France, c'est La Poste qui est chargée de cette mission dont les détails sont inscrits dans son cahier des charges.
Les Etats membres de l'Union européenne peuvent octroyer au prestataire du service universel postal un certain monopole, dans la limite des seuils définis par la directive, afin de garantir le financement de cette mission.
Le projet de loi confirme le monopole de La Poste en l'ajustant aux seuils prévus par la directive européenne. Depuis le 1er janvier 2003, le secteur réservé couvre les envois de correspondances d'un poids inférieur à 100 grammes. Au 1er janvier 2006, cette limite tombera à 50 grammes.
L'Assemblé nationale a souhaité, comme le permet la directive, soustraire du domaine réservé de La Poste les envois recommandés utilisés dans le cadre des procédures administratives ou juridictionnelles. Les caractéristiques de ces recommandés seront définis par décret en Conseil d'Etat et ouverts à tous les prestataires de service postaux capables d'offrir ce service avec un haut niveau de qualité.
Par ailleurs, les Etats membres doivent garantir qu'une autorité indépendante des opérateurs postaux est chargée de veiller au respect des règles de concurrence dans le secteur postal et à la bonne fourniture du service universel postal
Le projet de loi prévoit ainsi d'étendre les pouvoirs de l'ART à la régulation du secteur postal. Avec un nouveau service et deux nouveaux membres du collège compétents dans le secteur postal, cette autorité serait alors dénommée, ainsi que vous l'avez proposé, « autorité de régulation des communications électroniques et des postes », ou ARCEP.
A cet effet, l'Assemblée nationale a souhaité porter le nombre de membres du collège de cinq à sept. C'était la proposition initiale de la commission des affaires économiques du Sénat. Je pense donc que, sur ce point, nous pourrons arriver à un accord, puisque c'est l'Assemblée nationale qui vous a rejoints.