Intervention de Michel Teston

Réunion du 8 mars 2005 à 16h00
Régulation des activités postales — Discussion générale

Photo de Michel TestonMichel Teston :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées à Guéret, samedi dernier, pour manifester contre la disparition programmée des services publics, nous débattons de nouveau du projet de loi relatif à la régulation des activités postales.

Certes, nous sommes obligés de transposer les directives européennes pour assurer la mise en place du service universel et l'ouverture à la concurrence. Mais le groupe socialiste n'accepte pas que cette ouverture à la concurrence se traduise, au final, par un démantèlement de La Poste et une remise en cause de sa présence territoriale.

En tant que représentant d'un département à dominante rurale, je ne peux que vivement m'inquiéter du contenu de ce projet de loi.

Comme l'ont déjà expliqué mes collègues Pierre-Yvon Trémel, Pierre-Yves Collombat, Jean-Pierre Sueur et Josette Durrieu, et comme l'expliquera Bernard Piras, nous avons une vision des choses bien différente de celle qui nous est proposée : pour nous, le service public de La Poste comprend plusieurs composantes essentielles auxquelles nous ne saurions renoncer.

Le maillage territorial est la première d'entre elles. Il ne suffit pas d'affirmer que 17 000 points de contact seront maintenus pour rassurer nos concitoyens, encore faut-il dire lesquels. Nous plaidons pour le maintien d'un nombre suffisant de bureaux de plein exercice, c'est-à-dire totalement financés et gérés par La Poste, et, à titre accessoire, pour des agences postales communales et intercommunales pérennes, ce qui suppose, de la part de La Poste, un engagement clair dans la durée et un financement important.

L'élaboration d'un schéma de présence postale départemental représente la deuxième composante à laquelle nous refusons de renoncer. Ce schéma devra être élaboré à partir d'une réelle concertation au sein des commissions de présence postale territoriale ou intégré à des schémas de services publics.

La participation à la politique d'aménagement du territoire par un fonds de péréquation allant bien au-delà de ce que propose ce texte constitue la troisième composante.

La quatrième est un service bancaire universel qui permette à chacune et à chacun de bénéficier des prestations bancaires pour un coût raisonnable.

Si l'on confronte ces exigences au texte sur lequel nous avons à nous prononcer, le constat est clair, monsieur le ministre : le compte n'y est pas !

A l'exigence d'un service de qualité qui corresponde aux besoins des populations, non seulement dans les zones rurales, mais aussi dans les zones urbaines sensibles, ce projet de loi oppose une vision seulement quantitative des choses.

Comme je l'ai déjà souligné, même si la concurrence est désormais une réalité incontournable, est-ce une raison pour mettre en oeuvre des dispositifs donnant aux nouveaux opérateurs plus de marge de manoeuvre et moins d'obligations que La Poste ? D'autant plus que ces opérateurs concentreront leurs activités sur des zones lucratives, laissant à La Poste le soin d'assurer le service dans les zones les moins rentables.

C'est donc la forme de présence territoriale organisée par ce texte qui pose principalement problème.

L'application des critères des 10 % de la population et des cinq kilomètres aurait effectivement des conséquences difficilement acceptables en zones rurales. Ainsi, à titre d'exemple, La Poste pourrait s'appuyer sur ce double critère pour supprimer tous les points de contact actuellement en activité sur neuf des trente-trois cantons de l'Ardèche.

Les variations sensibles de la densité démographique entre plateaux et vallées, zones urbaines et zones rurales, seraient ainsi amplifiées par un déséquilibre total de la présence territoriale de La Poste.

Les agences postales communales peuvent être une solution pour certaines communes, mais, dans ce domaine comme dans bien d'autres, il est à craindre que ce ne soient les collectivités qui, à plus ou moins long terme, aient à supporter des charges supplémentaires, alors que leurs marges de manoeuvre financières sont toujours plus réduites. Pour éviter absolument ce risque, le conventionnement des agences postales communales et leur financement doivent être garantis dans la durée par La Poste.

Enfin, et ce n'est pas la moindre des interrogations, qu'en est-il du statut des personnels de ces structures ?

Le maillage territorial est donc bien un enjeu fondamental de ce texte. On ne peut pas envisager de service public au rabais dans certaines zones ; l'égalité d'accès au service public doit être réaffirmée. C'est pourquoi il me semble impératif de conserver une densité suffisante de bureaux gérés directement par La Poste avant de s'en remettre aux collectivités, ces dernières n'ayant pas vocation à devenir des sous-traitantes de La Poste.

Le maillage territorial est aussi indissociable du financement des activités de service public de La Poste. Dans le texte, le Gouvernement propose un « fonds postal national de péréquation territoriale », mais les conditions de financement, de gestion et de fonctionnement de celui-ci sont particulièrement floues...

L'article 1er bis nouveau du projet de loi dispose que : « Les ressources du fonds proviennent notamment de l'allègement de fiscalité locale dont La Poste bénéficie... ». A la lecture de cet article, il n'y a qu'un seul financeur avéré : La Poste elle-même. En outre, le financement issu d'un allègement fiscal ne me semble pas être, à proprement parler, un financement pérenne. Enfin, garantir le financement d'un fonds de péréquation par des taxes locales, principalement la taxe professionnelle, dont on sait qu'elle pourrait être largement réformée, n'est pas une option sérieuse.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion