Intervention de Michel Billout

Réunion du 8 mars 2005 à 22h00
Régulation des activités postales — Article 1er

Photo de Michel BilloutMichel Billout :

Si, en cet instant, nous discutons plus particulièrement de l'activité postale, je tiens d'abord à faire remarquer que nous sommes parvenus aujourd'hui à une étape décisive concernant l'avenir de l'ensemble de nos services publics.

De ce point de vue, il me semble nécessaire de rappeler un certain nombre d'éléments avant d'entamer plus précisément la discussion sur chacun des articles de ce projet de loi, dont les conséquences pour notre service public postal et pour l'établissement public La Poste seront lourdes.

Aucun des grands services publics - qu'il s'agisse de la santé, de l'eau ou des services publics en réseau tels que les transports, l'énergie ou les télécommunications - n'est épargné par la vague de libéralisation engagée à l'échelle internationale et européenne

En vertu de l'Accord général sur le commerce des services, conclu en 1995, les pays membres de l'OMC sont contraints d'ouvrir à la concurrence les secteurs des services, autrement dit de soumettre au marché et à ses règles concurrentielles des pans entiers de l'économie qui, en France, depuis la Seconde guerre mondiale, avaient été exclus d'une gestion strictement marchande.

Ce processus d'ouverture à la concurrence est relayé au niveau européen par des directives visant à la déréglementation de nos services publics. Nous en avons un exemple concret, aujourd'hui, avec les transpositions des directives de 1997 et de 2002 pour le domaine des activités postales, directives que nous avons combattues à l'époque, monsieur le ministre, et que nous combattons encore aujourd'hui.

A l'échelle nationale, ce processus se traduit par un désengagement, un renoncement de l'Etat face à l'emprise progressive du marché.

Nos services publics ont joué un rôle fondamental en matière d'intégration et de correction des inégalités sociales et territoriales. Ils ont permis l'accès à des droits fondamentaux tel le droit à l'énergie. Devons-nous, aujourd'hui, nous priver de ces biens dits « collectifs », accessibles à tous, exclus du domaine marchand et garantissant des droits fondamentaux ?

Finalement, ces directives ont pour conséquence la dégradation de la qualité du service public postal. Les nouveaux impératifs de rentabilité et de concurrence vont légitimer la fermeture des bureaux de poste jugés peu ou pas assez rentables, ainsi que la hausse du prix du timbre.

Voilà à quoi nous condamne ce véritable désengagement de l'Etat, eu égard aux responsabilités qu'il assumait en matière d'aménagement du territoire et d'intégration sociale !

Devons-nous encore ajouter, comme cela ressort parfaitement dans ce texte de loi, qu'un tel désengagement se traduit aussi par un retrait de l'Etat du champ politique, notamment en ce qui concerne la définition d'une politique à visée véritablement industrielle ?

Que nous vaut cette remise en cause de nos services publics et de la conception particulière qui les fondait ? Quel type de société sommes-nous en train de construire pour les générations futures ?

Ce sont autant de questions qui justifient notre amendement de suppression et auxquelles, nous l'espérons, le Gouvernement apportera des réponses précises.

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