Intervention de Jean-Louis Walter

Mission commune d'information relative à Pôle emploi — Réunion du 8 mars 2011 : 1ère réunion
Audition de M. Jean-Louis Walter médiateur de pôle emploi

Jean-Louis Walter, médiateur de Pôle emploi :

Comme vous l'avez rappelé, je n'ai que huit mois d'ancienneté dans mon poste. Je ne serais donc pas à même de répondre à ce type de questions si je n'avais pas été impliqué, depuis plus de vingt ans maintenant, dans les débats que nous avons eus, au niveau national, sur l'emploi, la formation professionnelle ou les retraites.

D'origine alsacienne, je crois beaucoup aux vertus de l'action régionale et territoriale et l'un des derniers rapports que j'ai rédigés, pour le compte du Conseil économique et social, portait justement sur le dialogue social territorial. Je suis en effet persuadé qu'il est possible de faire beaucoup de choses à l'échelon local.

Je suis un homme d'entreprise assez atypique puisque je suis un pur produit de la formation en alternance. J'ai obtenu mon diplôme d'ingénieur grâce aux formations dispensées par le conservatoire national des arts et métiers (Cnam). Le fait que je vive à proximité de la frontière allemande a sans doute joué un rôle dans le choix de mon orientation professionnelle, puisque nos amis allemands n'ont jamais abandonné l'apprentissage, alors que la France souhaitait, dans le même temps, mener 80 % d'une classe d'âge au baccalauréat.

Je concilie par ailleurs une expérience industrielle et une connaissance des organismes sociaux puisque j'ai quasiment participé, au cours des vingt années qui viennent de s'écouler, à toutes les grandes négociations dans le domaine de l'emploi, de la formation et des retraites. J'ai notamment présidé l'association pour l'emploi des cadres (Apec), l'association générale des institutions de retraite des cadres (Agirc) et l'association pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (Assedic) du Haut-Rhin, et occupé des mandats aux conseils d'administration de l'union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (Unedic) et de l'ANPE. Je dispose donc d'un certain recul sur le fonctionnement de tous ces organismes.

A l'époque de la création de l'assurance chômage - ce qui nous fait remonter à André Bergeron et au Général de Gaulle - la France ne comptait que quelques centaines de milliers de chômeurs. Le système mis en place servait alors d'amortisseur social, tout en permettant aux organisations syndicales de s'extraire un peu de la sphère de l'entreprise. Les partenaires sociaux assumaient tout à la fois les déficits et les équilibres du système et l'assurance chômage se trouvait alors dans une situation plutôt confortable, sur un plan financier, puisque les recettes excédaient largement les dépenses. Le régime d'assurance chômage disposait en outre, à cette époque, de l'une des meilleures conventions collectives nationales de France.

Quelques années plus tard, l'ANPE, qui était une agence de placement, voyait le jour. Or, à mon sens, cette structure n'a jamais eu les moyens ni de sa politique, ni de ses ambitions, et ce quels que soient les gouvernements qui se sont succédé à la tête de notre pays. L'ANPE et les Assedic ont ainsi été, depuis toujours, des lieux d'expression d'insatisfactions, lesquelles n'étaient pas toujours dirigées contre la structure elle-même mais pouvaient également être d'ordre très général, résultant notamment de la rupture du contrat de travail subie par les usagers de ces institutions.

Il y a bien eu quelques tentatives pour faire travailler l'ANPE, les Assedic et l'Unedic ensemble, avant la fusion du début de l'année 2009. Philippe Seguin avait ainsi tenté de mettre en place un service public de l'emploi, mais ce projet n'avait finalement pas abouti. Dans le même ordre d'idée, la loi Borloo de 2005 soulignait, quant à elle, la nécessité de regrouper, en un lieu unique, les compétences des différents acteurs en présence, afin de faciliter le retour à l'emploi des chômeurs de longue durée, notamment. C'est ainsi qu'est né le concept des maisons de l'emploi qui reste, selon moi, encore valable aujourd'hui. Il semble en effet essentiel de trouver un endroit où tous les acteurs puissent travailler ensemble, étant entendu qu'aucun d'entre eux, pris séparément, ne sera en capacité de lutter efficacement contre le chômage.

C'est dans ce contexte que Pôle emploi a vu le jour, issu de la fusion de l'ANPE et des Assedic. Je me demande d'ailleurs si nous ne devrions pas aller plus loin aujourd'hui dans ce processus de fusion, dans la mesure où l'association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), dont nous avons récupéré les psychologues, se trouve quelque peu déséquilibrée dans le contexte actuel.

Le contenu du poste de médiateur que j'occupe aujourd'hui est défini par la loi. Je suis lié à Pôle emploi par un contrat de travail mais, pour autant, je pense que je suis en capacité d'exercer mes fonctions en bénéficiant d'une certaine indépendance, dans la mesure où je ne suis pas en recherche de carrière et où j'ai une personnalité suffisamment forte pour m'affirmer, le cas échéant, et faire valoir un certain nombre d'idées auprès du directeur général, même si celles-ci ne lui font pas plaisir.

Issu de la fusion des Assedic et de l'ANPE, Pôle emploi devra surmonter les différences de culture entre ces deux établissements d'origine, afin de mener une action efficace de lutte contre le chômage, à l'échelle nationale. Ayant vécu, au cours de ma carrière professionnelle, la fusion entre Peugeot et Citroën, qui a mis près de dix ans à être effective alors qu'elle concernait des acteurs qui exerçaient les mêmes métiers, je ne suis d'ailleurs pas surpris que la fusion actuelle entre l'ANPE et le réseau des Assedic nécessite un certain délai pour être effective. Cette opération ne pourra d'ailleurs être pleinement couronnée de succès si nous n'entreprenons pas un renouveau complet du département en charge des ressources humaines (RH), au sein de Pôle emploi. Pour l'heure, en effet, la structure RH de Pôle emploi correspond à celle de l'ANPE et il serait par conséquent opportun d'évoluer vers un autre modèle de fonctionnement.

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