Intervention de Jean de Ponton d'Amécourt

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 1er décembre 2010 : 1ère réunion
Situation en afghanistan — Audition de m jean de ponton d'amécourt ambassadeur en afghanistan

Jean de Ponton d'Amécourt, ambassadeur en Afghanistan :

Pour éclairer ces problèmes fondamentaux à long terme, permettez-moi quelques chiffres. L'espérance de vie est de 43,8 ans, ce qui place l'Afghanistan au 188e rang sur 195 pays au classement de l'ONU. L'écart entre l'espérance de vie des hommes et des femmes s'est réduit -43,9 ans d'une part, contre 43,8 ans de l'autre-, ce qui constitue un progrès. Le taux de mortalité des enfants, de la naissance à l'âge de 5 ans, s'élève à 16 %. Le taux de croissance de la population est de 2,6 %, pour un taux de fécondité de 6,6 %. Une famille compte en moyenne 10 enfants. Chaque année, on dénombre 1,5 million de naissances pour une population de 32 millions. En matière d'éducation, même si cela reste insuffisant, on a enregistré de grands progrès, même si on compte encore 9,5 millions d'adultes illettrés, dont 5,5 millions de femmes et 4 millions d'hommes. Le taux de scolarisation des enfants de 7 à 12 ans est passé de 37 % en 2005 à 52 % aujourd'hui. Concernant la santé, les femmes bénéficient de soins anténataux à 36 % ; la population se trouve éloignée d'un centre de soins d'une heure à 85 % et d'une heure de marche à pied à 68 %. En bref, des progrès ont été accomplis, mais l'Afghanistan reste l'un de pays les plus pauvres au monde.

Beaucoup reste encore à faire mais, quand on interroge les Afghans, toutes les enquêtes effectuées montrent que leur priorité c'est d'abord la paix. Ils ne veulent plus que l'insurrection prenne leurs enfants pour en faire des combattants, que les forces de l'Alliance ou les forces afghanes menacent leurs familles. Après s'être entretués durant trente ans, ils n'en peuvent plus ! Deuxième priorité, la justice. De fait, la guerre a occasionné une quantité invraisemblable de dépossessions de biens. Le ministre de la Justice et le ministre de l'Agriculture, un homme remarquable, établissent un cadastre pour lutter contre le pillage systématique des biens publics par les grands feudataires. Ceux-ci, une fois qu'ils se sont emparés d'un terrain, évacuent les propriétaires des terres avoisinantes, si besoin est par la violence la plus extrême. Ensuite, ils réalisent une espèce de cadastre privé et offrent les parcelles à des personnes privées, moyennant finance, en échange de leur protection. Autre terrain : les problèmes familiaux, les viols, les enlèvements. La justice a fort à faire, mais elle est peu efficace et corrompue comme l'était la nôtre dans l'Europe du XVIIe siècle. Leur droit est à la fois influencé par la tradition romano-germanique, via la Turquie et l'Égypte et les professeurs de droit que la France y envoyait, et la charia. La troisième priorité des Afghans est l'emploi, ce qui est bien compréhensible quand des milliers d'Afghans vivent dans la plus extrême pauvreté.

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