Intervention de Rémi Aufrère

Commission des affaires économiques — Réunion du 7 janvier 2009 : 2ème réunion
Organisation et régulation des transports ferroviaires — Audition de M. Rémi Aufrère secrétaire fédéral et de M. Gérard Le mauff secrétaire général adjoint de la cgt-fo cheminots

Rémi Aufrère, secrétaire fédéral :

Puis la commission a procédé à l'audition de M. Rémi Aufrère, secrétaire fédéral, et de M. Gérard Le Mauff, secrétaire général adjoint, de la CGT-FO Cheminots.

a indiqué qu'à ses yeux le projet de loi relatif à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires était indissociable de la réforme issue de la loi du 13 février 1997, par laquelle la France était allée au-delà de ses obligations européennes en établissant entre la SNCF et Réseau ferré de France (RFF) une séparation non seulement comptable mais aussi fonctionnelle. En effet, cette dissociation entre les deux établissements publics a eu pour effet, d'une part, de créer des dysfonctionnements dans l'organisation ferroviaire et, d'autre part, d'accélérer le désengagement de l'Etat.

S'agissant du projet de création d'une autorité administrative indépendante chargée de la régulation ferroviaire, il a estimé que telle n'était pas à ses yeux la meilleure formule. Il a considéré qu'il aurait été préférable de conserver, quitte à en développer les compétences, l'actuelle mission de contrôle des activités ferroviaires au sein du ministère chargé des transports. Les services de l'Etat sont en effet les meilleurs garants d'une réelle indépendance vis-à-vis de l'ensemble des acteurs, dans la mesure où ils sont placés sous le contrôle des autorités politiques en charge de l'intérêt général. A l'inverse, des personnalités dites indépendantes ne sont pas, quant à elles, nécessairement hors de toute influence. D'une façon plus générale, ce souci de l'indépendance procède lui-même du principe communautaire de mise en place d'une concurrence libre et non faussée, or l'exemple récent de la crise financière a montré que ce principe ne devait pas être érigé en dogme et pouvait tout à fait être remis en cause.

a ensuite évoqué la question de la dette ferroviaire qu'il considère comme un des problèmes centraux du secteur. Il a estimé que l'une des traductions de cet endettement était la pression actuellement exercée par RFF en faveur d'une augmentation des péages, ce qui aboutit à mettre la SNCF en difficulté. Il a fait valoir que l'exemple allemand, souvent cité par les commentateurs, n'était pas transposable en France, le système ferroviaire allemand ayant bénéficié d'une reprise intégrale de son endettement par l'Etat fédéral à la fin des années 1990. Il a estimé qu'une telle politique était aujourd'hui indispensable dans notre pays, en particulier en ces temps où la puissance publique a su trouver des ressources très importantes pour assainir la situation des banques. En effet, l'équation financière issue de la réforme de 1997 ne permet pas aujourd'hui de garantir un financement satisfaisant du réseau. Les 13 milliards d'euros programmés par le contrat de performance entre l'Etat et RFF pour la période 2008-2015 risquent d'ailleurs de s'avérer insuffisants, 1.800 kilomètres de voies ferrées étant d'ores et déjà sujets à des ralentissements. Les choses pourraient même continuer de se détériorer compte tenu de l'état des infrastructures après 15 années d'investissements insuffisants pour la régénération des voies, insuffisance soulignée par le rapport de l'Ecole polytechnique de Lausanne en 2005 ainsi que par celui de la Cour des comptes. Au moment où les Etats-Unis d'Amérique répondent à la crise économique par un vaste plan d'investissements dans les infrastructures publiques, le Sénat pourrait utilement défendre la mise en place d'une programmation pluriannuelle des dépenses en faveur du réseau ferroviaire, tout en s'assurant que celle-ci ne se limite pas à des effets d'annonce comme c'est trop souvent le cas des décisions prises à l'occasion des Comités interministériels d'aménagement et de compétitivité des territoires (CIACT).

Enfin, il a craint que l'on assiste en France à la mise en place d'une concurrence faussée mais dans un sens inverse de celui qui est souvent dénoncé. En effet, ce ne sont pas les nouveaux opérateurs qui risquent de subir les principaux déséquilibres dans la mesure où ils ne s'intéressent qu'aux segments de trafic les plus rentables. En revanche, le développement de la concurrence risque de porter atteinte aux péréquations dont bénéficient aujourd'hui les liaisons les plus déficitaires assurées par la SNCF, notamment les grandes liaisons transversales de voyageurs telles que Lyon-Nantes ou Lyon-Bordeaux.

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