a débuté sa présentation par la projection d'un documentaire réalisé par Public Sénat lors de sa visite sur pièces et sur place à l'Opéra national de Paris (OnP), dans le cadre du contrôle sur l'exercice de la tutelle.
Puis il a indiqué, en introduction, que le ministère de la culture comptait 78 établissements publics (EP), soit deux fois plus qu'il y a vingt ans, dont certains, comme l'OnP ou le Louvre, étaient très prestigieux. Il a précisé que ceux-ci employaient, au total, 20.000 agents et consommaient 40 % des crédits de la mission « Culture ». Il a déclaré s'être interrogé, à l'instar du ministère des finances et du ministère de la culture, sur le caractère de ces établissements : « puissances autonomes » ou « instruments au service du ministre » ?
En premier lieu, M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a livré quelques observations générales.
Il a constaté que le ministère de la culture n'avait pas calqué son organisation fonctionnelle sur les structures de programme prévues par la LOLF. Il a rappelé qu'à l'origine il y avait confusion entre gestion et tutelle, certains directeurs d'administrations centrales étant également présidents d'EP.
Il a identifié deux types de tutelles : la tutelle financière, au titre du ministère de la culture, exercée par la direction de l'administration générale (DAG), et la tutelle sectorielle, dite encore « tutelle métier », éparpillée entre des directions sectorielles du ministère, plus faibles que les établissements publics qu'elles étaient censées contrôler.
Il a regretté que l'apport principal de la LOLF, le pilotage de la performance, n'ait pas été intégré à cette tutelle technique.
Il a constaté que les responsables des programmes de la mission « Culture » étaient absents de la tutelle des opérateurs, alors que la direction du budget avait créé une mission « Opérateurs et tutelles », et la DAG, parallèlement, un bureau des opérateurs nationaux. Il a rappelé que le Louvre représentait 18 % et la Bibliothèque nationale de France 12 % du programme « Patrimoines », et l'Opéra national de Paris 22 % du programme « Création ».
En second lieu, M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a présenté la situation particulière des quatre EP.
S'agissant de l'Opéra national de Paris, M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a indiqué que cet EP, régi par un décret de 1994, pris après l'achèvement des travaux de l'Opéra Bastille, s'était vu confier les missions de développer l'art lyrique et chorégraphique, de rendre accessible le patrimoine lyrique et chorégraphique, de créer des oeuvres contemporaines et de former les chanteurs et les danseurs.
Si le cahier des charges de 1992 n'a jamais été appliqué, un rapport présenté par M. Hugues Gall, alors directeur de l'OnP, au ministre de la culture, l'a remplacé en 1995, sans délibération du conseil d'administration. Ce rapport imposait notamment à l'OnP d'assumer 340 représentations par saison. Il est encore en vigueur, le nouveau cahier des charges présenté par son successeur, M. Gérard Mortier, n'ayant toujours pas été approuvé.
a exposé le bilan artistique de la saison 2004-2005, qu'il a jugé brillant, avec 750.000 spectateurs, 450.000 visiteurs et 350 représentations. Il a précisé que l'OnP recevait une subvention de l'Etat de 109,4 millions d'euros, sur un budget total de 177,8 millions d'euros (dont 68 % de masse salariale pour 1.619 équivalents temps plein travaillés, ETPT), et que les ressources propres de l'établissement public s'élevaient à 68,4 millions d'euros soit 38,5 % du budget.
Il a constaté que l'équilibre financier avait été rétabli en 2007, grâce à l'augmentation de 10 % des tarifs, parallèlement à la création de billets au prix attractif de 5 euros pour les jeunes, mais surtout, grâce à l'aide publique, qui correspond à 57 % des charges de fonctionnement et 46 % des charges d'investissement.
Il a ensuite décrit le fonctionnement de « la tutelle », qu'il a qualifiée de « codirection budgétaire ». Conformément au « rapport Gall » précité, qui appelait à un « dialogue de gestion » avec Bercy, le contrôle a priori est limité aux seuls contrats de personnel supérieurs à 50.000 euros, et le rôle du contrôleur d'Etat est avant tout d'expertiser et d'auditer. De même, le ministre de la culture joue plutôt le rôle d'un avocat que d'un cotuteur. Le ministre des finances, le véritable « patron financier », laisse une large autonomie stratégique au directeur de l'OnP.
Néanmoins, M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a observé que cette « tutelle » laissait subsister de grands problèmes relatifs au régime des retraites du personnel et, surtout, au financement des investissements à venir, parmi lesquels les travaux du palais Garnier. Il a précisé qu'il était envisagé de faire appel au mécénat, de mettre en place une délégation de service public mais aussi de puiser sur le fonds de roulement pour couvrir le besoin de financement. Il a constaté qu'une partie du fonds de roulement avait déjà été utilisée pour les réparations urgentes du cintre de l'Opéra Bastille, dont les installations sont notoirement fragiles, et a souligné qu'un mois de fermeture de ce dernier « coûterait » 90 millions d'euros.
Il a souligné que les amortissements de l'OnP n'avaient pas été provisionnés correctement et que les besoins de fonctionnement et d'investissement de l'Opéra Bastille pouvaient être évalués à 12 millions d'euros. En 2007, le besoin d'investissement global de l'OnP s'élevait donc à 19,7 millions d'euros, financés à concurrence de 11 millions d'euros inscrits en loi de finances, et par prélèvement sur le fonds de roulement pour le solde.
s'est étonné que les outils modernes de la tutelle qu'étaient le cahier des charges et le contrat de performances, prévus par la réforme budgétaire, n'aient pas été établis. Il a rappelé que le projet de contrat de performances, préparé par l'OnP, qui analysait les atouts et les handicaps de l'établissement, devrait impérativement être appliqué, sans doute par le successeur de M. Gérard Mortier, M. Nicolas Joël, actuel directeur artistique du théâtre du Capitole à Toulouse.
S'agissant de l'établissement public du « musée du Louvre », régi par un décret de 1992, M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a rappelé que sa mission était notamment de rénover, protéger, restaurer et enrichir les collections publiques mais aussi de développer la fréquentation et de réaliser les opérations commerciales en exploitant sa marque. L'établissement dispose, pour cela, d'un président et de huit conservateurs, son conseil d'administration comprenant le directeur des musées de France et l'administrateur général de la Réunion des musées nationaux (RMN).
Il a constaté que les ressources propres du musée s'élevaient à 73,9 millions d'euros, dont 44,3 millions d'euros de recettes de billetterie. La subvention de l'Etat, qui représentait 60 % de son compte de résultats, était passée à 66 %, en matière d'investissements, en 2006 et devrait être ramenée à moins de 64 % en 2007 grâce à l'accroissement des recettes de mécénat.
Il a observé, qu'à la différence de l'OnP, le musée du Louvre avait signé un contrat d'objectifs et de moyens avec le ministère de la culture en juillet 2006 pour les années 2006-2008. La tutelle ainsi contractualisée s'appuie sur des objectifs et indicateurs de performances clairs et ambitieux. Il a souligné que le président du Louvre avait obtenu une autonomie de gestion budgétaire et le transfert de gestion des personnels du musée.
Il a ensuite rappelé que trois projets stratégiques étaient inclus dans ce contrat de performances : la création du département des arts de l'Islam, l'implantation d'une antenne permanente à Lens ou encore le projet d'aménagement de la Pyramide.
Il a fait valoir que ce contrat comportait des obligations réciproques, l'Etat s'engageant à ne pas effectuer de « régularisation » sur les subventions, et l'établissement s'efforçant de mener une « gestion autonome et responsable ».
a par ailleurs constaté l'affaiblissement de la direction des musées de France (DMF) et de la RMN à laquelle le musée versait, jusqu'en 2003, 45 % de ses recettes de billetterie. Comme l'avait préconisé le rapport de M. Guillaume Cerruti, fait au nom de l'inspection générale des finances, en octobre 2001, le « décroisement » des compétences et des financements entre la RMN et les musées nationaux a été opéré à partir de 2003. Depuis lors, les musées conservent leurs recettes de billetterie tout en justifiant au premier euro la subvention de l'Etat.
a souligné que Le Louvre consacrait ainsi aux acquisitions cinq fois plus de moyens que la RMN ne le faisait à l'époque de la mutualisation des recettes de billetterie. En outre, les compétences d'édition ayant été transférées au Louvre, il s'est interrogé sur la possibilité d'intégrer la RMN à une « grande direction » de l'architecture et du patrimoine (DAPA).
Il a enfin évoqué « l'émergence diplomatique » du Louvre, consacrée par la signature du contrat, le 6 mars 2007, entre la France et les Emirats Arabes Unis, portant création d'un musée universel de 24.000 m² à Abou Dabi. Une personne morale de droit français, l'Agence internationale des musées de France, définit dans ce cadre le projet muséal et contribue à la constitution des collections. Il a précisé que les contreparties financières de l'accord prévoyaient notamment 164,5 millions d'euros versés sur 30 ans à l'Agence, et 400 millions d'euros versés sur 15 ans au musée, au titre de l'utilisation de la marque « Louvre ».
a souligné, qu'à l'instar du Louvre, la BnF disposait de deux sites, le quadrilatère Richelieu et, à Tolbiac, les « quatre tours François Mitterrand ».
Il a relevé que cet immense et prestigieux établissement coûtait, en fonctionnement, 267.000 euros par jour et recevait plus d'1 million de visiteurs. Son budget total est de 125 millions d'euros, dont 37 % de masse salariale (avec 2.444 ETPT). Le budget de fonctionnement dépasse 57 millions d'euros par an, et celui d'investissement 34 millions d'euros par an, la part de la subvention de l'Etat représentant plus de 90 % du budget de la BnF.
Il a rappelé qu'au temps où la BnF dépendait du ministère de l'éducation nationale, la tutelle était si légère qu'on parlait, pour la qualifier, du « splendide isolement » de la Bibliothèque. Il a observé que ce vocable avait la vie longue, malgré les efforts de la direction du livre et de la lecture (DLL) et de la DAG qui participent aux comités du pilotage informatique et de l'immobilier ainsi qu'au conseil d'administration de l'établissement public.
a constaté qu'il n'existait ni contrat d'objectif et de moyens, ni contrat de performances et que les indicateurs de performances, pièces essentielles de la tutelle, étaient appliqués par l'établissement de son plein gré, sans suivi des autorités de tutelle.
Il a estimé que l'ancien président de la BnF, M. Jean-Noël Jeanneney, s'était fixé, dans le cadre de ce contrat de performances, des objectifs ambitieux, notamment la lutte contre le monopole du moteur de recherche « Google » et la défense de la langue française, ainsi que des buts incontournables comme la rénovation du quadrilatère Richelieu, en liaison avec l'établissement public de maîtrise d'ouvrage culturel (EMOC) et avec l'Institut national d'histoire de l'art (INHA).
Il a regretté l'absence d'un axe « recherche » au sein du document interne de performances et a appelé de ses voeux la fin du « délaissement » de la BnF.
Il a déploré que, par manque de moyens ou par « mutisme » du ministère de la culture et de la communication, les deux dossiers majeurs, dont dépendait l'avenir de la BnF, soient encore ouverts : l'aménagement du quadrilatère Richelieu, qui posait de lourds problèmes de sécurité, et la politique de numérisation, priorité de l'avenir, qui ne permet pas aujourd'hui le traitement de 5.000 livres par an.
a rappelé que la Cité des sciences et de l'industrie (CSI) avait été conçue à l'initiative du président Valéry Giscard d'Estaing, et inaugurée en 1986. Il a précisé que l'établissement avait deux tutelles, le ministère de la recherche, depuis l'origine, et celui de la culture, qui s'était substitué au ministère de l'industrie en 1998.
Il a présenté la mission principale de la CSI, visant à l'accessibilité de tous les publics aux sciences, aux techniques et au savoir-faire industriel. Il a souligné que la CSI recevait 87,6 millions de subventions (dont 47,6 millions affectés au personnel) et comptait 24,4 millions de ressources propres.
Il s'est félicité des indications très positives fournies par le contrat de performances tant en ce qui concerne la stabilité de la subvention de fonctionnement, que la maîtrise des effectifs et de la masse salariale ou le contrôle de gestion rigoureux.
Il a relevé qu'à la différence des autres établissements culturels, la direction centrale responsable de l'exercice de la tutelle était également gestionnaire du programme de rattachement de l'opérateur.
s'est étonné que la cotutelle de la recherche soit en retrait par rapport à celle de la culture, et a regretté notamment sa faible participation au financement des investissements nécessaires à l'aménagement de la CSI, soit 2 millions d'euros sur les 9 millions d'euros prévus. Il s'est en revanche réjoui du succès de la CSI, concrétisé par plus de 60 millions de visiteurs depuis 20 ans et un plan d'investissement ambitieux pour les deux prochaines années.
Au cours de sa visite dans l'établissement, il a indiqué avoir été frappé de l'emploi de l'expression d'« heureuse indifférence » pour qualifier la tutelle du ministère de la culture.
Enfin, il a mentionné le rapprochement de la CSI avec d'autres établissements scientifiques qui ne dépendaient légalement pas du ministère de la culture : le Musée des arts et métiers, le Muséum d'Histoire naturelle et le Palais de la découverte, auquel M. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur », a consacré un rapport d'information au titre évocateur : « Le Palais de la découverte : un condensé de dysfonctionnements administratifs et politiques ». Si l'hypothèse d'un rattachement de ce dernier à la Cité des sciences a été plusieurs fois évoquée, elle ne semble pas souhaitable, alors que la clarification du rôle du ministère de la culture à l'égard du Palais de la découverte est une nécessité impérative.