Intervention de Gérard Larcher

Commission d'enquête sur l'immigration clandestine — Réunion du 15 mars 2006 : 1ère réunion
Audition de M. Gérard Larcher ministre délégué à l'emploi au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes

Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes :

a évoqué, en préambule, les causes multiples des mouvements migratoires : ils résultent des écarts de développement, de conflits locaux ou régionaux, des déficits démographiques observés dans les pays développés et des progrès des moyens de transport et de communication. Ils sont accélérés par l'actuel mouvement de mondialisation, qui aggrave souvent les inégalités. Deux frontières sont particulièrement vulnérables : celle qui sépare les Etats-Unis du Mexique et celle de l'arc méditerranéen, entre l'Europe et l'Afrique.

Il a rappelé que la France n'était pas le seul pays confronté à l'immigration irrégulière, les Etats-Unis accueillant sur leur sol environ dix millions de sans-papiers, selon les estimations les plus courantes. Deux représentants du Government Accountability Office (GAO), organisme de recherche du Congrès américain, venus en France dans le cadre d'une étude sur la lutte contre le travail illégal et l'immigration clandestine, ont d'ailleurs été récemment reçus au ministère du travail.

Il a souligné que des flux migratoires massifs pouvaient avoir un effet déstabilisant pour la société, en faussant la concurrence sur le marché du travail, en plaçant les étrangers dans une situation de fragilité propice aux pires exploitations et en réduisant le soutien de l'opinion à une politique d'immigration régulière et à la nécessaire politique d'asile.

a ensuite souhaité revenir brièvement sur la politique de la France en matière d'immigration de travail. Le recours à la main-d'oeuvre étrangère est possible, à la demande des entreprises, après examen de la situation locale de l'emploi et vérification des règles d'égalité de traitement avec les salariés nationaux ou étrangers en situation régulière. La France est cependant dans une situation démographique plus favorable que celle de la plupart des pays européens et dispose d'importantes réserves de main-d'oeuvre, du fait du taux de chômage élevé des jeunes, des seniors et des étrangers en situation régulière. Il convient donc d'attirer surtout des cadres de haut niveau et des étudiants à fort potentiel. De plus, 100.000 étrangers entrés régulièrement sur le territoire accèdent, chaque année, de plein droit, au marché du travail.

a rappelé que la lutte contre le travail illégal était une priorité de la politique gouvernementale. Le Gouvernement a renforcé la coordination des différentes administrations concernées, notamment en réactivant la commission nationale de lutte contre le travail illégal, et a lancé un plan d'action en juin 2004, réactualisé en début d'année 2006.

Deux types d'infractions sont plus particulièrement en lien avec l'immigration clandestine : les prestations de services frauduleuses impliquant des entreprises étrangères et l'emploi d'étrangers sans titre.

En matière de prestations de services, il a indiqué que les pouvoirs publics veillaient au respect de la directive 96/71/CE du 16 décembre 1996, concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services, qui prévoit que les règles du droit du travail s'appliquent aux salariés détachés sur notre sol. Les services de contrôle ont, par ailleurs, observé que la sous-traitance pouvait donner lieu à des dérives, ce qui amène le Gouvernement à encourager l'élaboration de chartes de bonnes pratiques.

Concernant l'emploi d'étrangers sans titre, il a rappelé que cette infraction se rencontrait surtout dans les secteurs de l'agriculture, du BTP, et des hôtels, cafés et restaurants, qui se caractérisent par des pénuries de main-d'oeuvre, un faible niveau de qualification et une forte pénibilité du travail.

a insisté sur la qualité de la collaboration entre les services et sur leur grande réactivité. Les opérations de grande envergure menées au dernier trimestre 2005 ont été très positives, ne serait-ce qu'en vertu de leur effet d'exemplarité, et seront renouvelées cette année.

Les sanctions encourues par les employeurs ont également été renforcées. La loi du 2 août 2005 relative aux PME a prévu la possibilité de refuser les aides publiques aux entreprises en infraction et la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 a prévu le remboursement des allègements de cotisations sociales. Une circulaire interministérielle du 9 décembre 2005 insiste sur l'importance de recouvrer la contribution spéciale due à l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) et un décret va être pris prochainement pour obliger les employeurs d'étrangers sans titre à participer financièrement à leur réacheminement dans leur pays d'origine.

a ensuite souligné la nécessité d'agir sur les causes profondes de l'immigration illégale. A ce titre, permettre aux entreprises de répondre à leurs besoins de main-d'oeuvre grâce à une immigration choisie devrait freiner l'effet d'appel sur l'immigration illégale. Le ministère du travail doit également veiller au bon fonctionnement du marché du travail, pour ramener vers l'emploi des populations qui en sont aujourd'hui exclues.

Le projet de loi sur l'immigration et l'intégration va fournir de nouveaux outils, notamment la carte de séjour pluriannuelle destinée aux personnes qui, par leurs talents et leurs compétences, sont susceptibles de participer au développement de l'économie et au rayonnement de la France, et va faciliter l'accès des étudiants étrangers au marché du travail.

Le Gouvernement a par ailleurs décidé une ouverture progressive et maîtrisée de notre marché du travail aux ressortissants des nouveaux Etats membres de l'Union européenne.

a conclu en rappelant que le développement des pays d'émigration était bien sûr la meilleure réponse à apporter à l'immigration clandestine. Une conférence du dialogue 5+5, qui réunit cinq pays d'Europe et cinq pays d'Afrique du Nord, s'est tenue en novembre 2005, pour discuter des flux migratoires en Méditerranée occidentale, et a abordé notamment la question du codéveloppement.

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