a estimé très intéressant que la commission des affaires économiques puisse prendre connaissance, dès à présent, des préconisations de cette commission dont il préside les travaux.
Il a fait valoir que les premières conclusions de son rapport seraient remises le 16 janvier 2008 au Président de la République, précisant, à cet égard, qu'il réserverait au chef de l'Etat la primeur des propositions détaillées, ajoutant que, si la commission des affaires économiques du Sénat le souhaitait, il se tenait à sa disposition pour revenir les exposer de manière approfondie.
Il a tout d'abord indiqué que le travail accompli par la CLCF avait été considérable depuis sa mise en place, selon un rythme d'une séance plénière tous les dix jours et des séances quotidiennes en comité plus restreint, précisant que la commission a forgé ses propositions en auditionnant plus de 400 personnalités, groupes ou institutions diverses. Il a insisté sur le caractère non partisan de cette commission soulignant que le travail avait été accompli sans a priori idéologique, estimant que les propositions de la CLCF n'avaient pour ambition que de servir l'intérêt de la France à long terme.
a rappelé le contexte dans lequel s'inscrivaient les préconisations de son rapport, en expliquant que si des réformes avaient été engagées par la majorité de nos voisins européens pour s'adapter à la modernité, en France les circonstances politiques depuis vingt ans, notamment les périodes de cohabitation, n'avaient pas été propices à la conduite de telles réformes, au premier rang desquelles la réforme de l'Etat. Il a ensuite fait observer que le monde actuel allait de plus en plus vite, était de plus en plus instable, concurrentiel et que dans ce contexte de course à la compétitivité et à la productivité, les Nations pouvaient vite basculer dans le déclin. Il a estimé que, pour l'instant, la France était un pays protégé, relativement riche, des risques se profilant toutefois si des réformes ne sont pas engagées rapidement. Il a considéré que les réformes à accomplir étaient à la fois urgentes et « himalayennes ». Urgentes parce qu'elles devaient impérativement intervenir dans les deux années à venir, M. Jacques Attali soulignant, à cet égard, que l'année 2009 fournirait une excellente fenêtre d'opportunité politique compte tenu de l'absence d'échéance électorale nationale. « Himalayennes » au regard de leur ampleur, à savoir qu'elles devraient toucher l'organisation de la concurrence, les modalités d'intervention des dépenses publiques, le financement des PME, les conditions de la justice et de promotion sociale. Reconnaissant que la France avait tragiquement reculé sur l'ensemble de ces points, il a souligné l'urgence de la situation et estimé qu'il était de la responsabilité collective de ne pas laisser passer une chance unique de réformer la France afin qu'elle conserve son rang. Il a précisé que le calendrier de mise en oeuvre des réformes devra être fixé en étroite concertation avec la représentation nationale.
Abordant plus spécifiquement le contenu du rapport, M. Jacques Attali a fait part de ses conclusions provisoires sur le logement et sur la concurrence. Il a souligné que, contrairement aux idées reçues, la CLCF ne préconisait pas un ultra libéralisme débridé mais au contraire un équilibre entre l'Etat et le marché d'une part, entre le pouvoir central et les pouvoirs décentralisés d'autre part.
A propos du logement, il a rappelé la situation problématique que connaissait la France dans ce domaine, à savoir un ralentissement du rythme de construction de logements neufs, une augmentation considérable des prix du foncier, ainsi qu'une gestion peu transparente et coûteuse du logement social. Il a indiqué que le rapport préconiserait, sur ces sujets, notamment une protection accrue des personnes âgées vulnérables ne pouvant plus payer leur loyer, une réduction des coûts de transaction dans la demande de logement des particuliers, ainsi qu'une application plus stricte de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbain (SRU), reconnaissant à cet égard que l'Etat devait prendre ses responsabilités à l'encontre des communes qui ne s'y conforment pas.
Il a ensuite indiqué que la CLCF proposerait, en matière de logement, sept projets innovants dans un contexte de dépenses publiques décroissantes. Parmi ces projets, il a fait état de l'élaboration de projets urbains écologiques, à savoir des quartiers, des villes existantes ou nouvelles, baptisés « écopolis ». Il a précisé qu'il s'agirait de dix villes à la pointe de l'environnement et de la technologie et que les maires ainsi que les opérateurs privés avaient déjà commencé à examiner la faisabilité de ces projets.
Evoquant ensuite le thème de la concurrence, M. Jacques Attali a essentiellement abordé la problématique de la grande distribution. Il a indiqué qu'à la suite de ses nombreuses auditions, la CLCF était parvenue à la conclusion que les lois existantes ne protègent ni les consommateurs, ni les salariés de la grande distribution, ni le petit commerce. A l'inverse, il a expliqué que ces lois avaient fonctionné comme des machines à créer des rentes pour quelques groupes capitalistes qui, s'ils sont devenus des fleurons internationaux de la grande distribution, ce dont il faut se féliciter, ont néanmoins créé des monopoles relatifs. Il a, à cet égard, cité le cas de l'interdiction de la vente à perte qui, contrairement aux idées reçues, constitue en réalité, selon lui, un accord de connivence entre le producteur et le distributeur pour conserver une marge au détriment des consommateurs. Pour mettre fin à cette situation, M. Jacques Attali a estimé que deux solutions étaient possibles :
- l'instauration d'une concurrence pure et parfaite : il s'agirait de mettre fin aux autorisations préalables, en garantissant une liberté absolue d'installation du commerce ou de l'hôtellerie par exemple. Il a indiqué que si cette solution présentait l'avantage de créer un environnement concurrentiel, au bénéfice des consommateurs, elle présentait cependant le risque de conduire à de nouveaux monopoles locaux ainsi qu'à la mise en difficulté des petits producteurs. C'est pourquoi il a préconisé la création d'une autorité de la concurrence forte et indépendante du ministère de l'économie. Il a précisé que cette commission de la concurrence devrait être dotée de vrais pouvoirs d'investigation lui permettant, notamment, d'étudier en détail les conditions de concurrence dans une zone de chalandise. Il a, par ailleurs, tenu à faire remarquer que la concurrence n'avait de sens que si elle était réglementée ;
- l'instauration d'une concurrence « honnête », à savoir une concurrence à laquelle les petits commerçants et les petits fournisseurs peuvent participer. Dans cette perspective, M. Jacques Attali a d'abord évoqué la création d'une obligation légale permettant aux petits fournisseurs d'être payés à moins de 30 jours. Il a ensuite proposé de renforcer les capacités financières du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC) de 70 millions d'euros, son niveau actuel, à 800 millions d'euros, critiquant à cet égard l'attitude scandaleuse de l'Etat qui n'a pas hésité à puiser dans les ressources de ce fonds. Il a, enfin, proposé de créer les conditions pour que les maires aient les moyens de gérer l'urbanisme commercial. Il s'est, dans cette perspective, prononcé en faveur d'un renforcement du droit de préemption des élus sur les terrains commerciaux et a estimé que les plans locaux d'urbanisme (PLU) devraient permettre aux élus locaux de refuser l'installation d'une grande surface.
Au total, M. Jacques Attali, a estimé que ces propositions étaient équilibrées en ce qu'elles permettaient une intensification de la concurrence, tout en préservant une égalité de traitement entre les acteurs. Il a précisé que ces propositions ne représentaient que 3 % seulement de l'ensemble des préconisations de la CLCF.