Intervention de Josselin de Rohan

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 12 janvier 2011 : 1ère réunion
Contrôle des importations et des exportations de matériels de guerre et marchés de défense et de sécurité — Audition de M. Laurent Collet-billon délégué général pour l'armement

Photo de Josselin de RohanJosselin de Rohan, président :

Nous accueillons le délégué général pour l'armement, M. Laurent Collet-Billon afin de nous éclairer sur les enjeux de la transposition des deux directives européennes dites du « paquet défense » par un projet de loi que le Gouvernement a déposé en première lecture sur le bureau du Sénat, et que nous devrions être en mesure de rapporter devant la commission le 15 février prochain pour un examen en Séance publique à une date qui n'a pas encore été fixée mais qui aura lieu très vraisemblablement début mars.

Je ne reviens pas sur la présentation de ces deux directives puisque notre commission a été éclairée le 6 octobre dernier par une communication de notre collègue Daniel Reiner sur cette question, puis par l'audition le 13 octobre de notre collègue député, Yves Fromion, auteur d'un rapport sur la question.

Le « paquet défense » repose sur l'équation suivante :

- afin de renforcer la politique européenne de défense et de sécurité, il est nécessaire de développer une base industrielle et de technologie de défense européenne, j'ajouterai autonome ;

- afin de renforcer cette « BITDE », il est nécessaire de réaliser un authentique «marché européen des équipements de défense» ;

- pour réaliser ce marché unique de l'armement il est nécessaire, d'une part, de faciliter les échanges intracommunautaires d'équipements de défense, c'est l'objet de la directive dite « transfert intracommunautaire » (TIC) et, d'autre part, d'harmoniser les procédures d'appel d'offres sur des équipements de défense, chaque fois que les Etats européens renonceront à se prévaloir de l'article 346 du Traité de Lisbonne dont l'application permettra toujours de passer commande de gré à gré à leurs fournisseurs nationaux dans l'objectif de sauvegarder les intérêts supérieurs de leur sécurité. C'est l'objet de la seconde directive dite « marchés publics de défense et de sécurité » (MPDS).

A ce stade de notre compréhension du sujet, la transposition par le projet de loi de la directive TIC, bien qu'étant d'une grande technicité, ne soulève pas de difficultés majeures. Elle substitue au principe général de la prohibition de l'exportation et de l'importation des équipements de défense, le principe de la liberté du commerce et de l'industrie encadré par un mécanisme complexe de certifications pour l'importation et de licences pour le transfert au sein du marché et de licences d'exportation, au-delà du marché européen.

En revanche, la transposition de la directive « marchés publics de défense » inquiète nos industriels.

Et c'est précisément sur cette question que je voudrais que vous nous fassiez part, M. le délégué général, de vos analyses et de votre connaissance approfondie du sujet.

Tout d'abord sur le champ d'application de cette directive : est-ce qu'elle vise bien les armes, les munitions et les services et travaux qui les accompagnent ou bien se cantonne-t-elle aux « équipements de défense » notion plus vague et dont nous avons du mal à vrai dire à cerner les contours ?

Ensuite, est-ce que la DGA est susceptible d'entrer dans le champ d'application de cette transposition ou bien fait-elle l'objet d'une transposition spécifique, par voie réglementaire, dans le code des marchés publics.

Enfin, que craignent vraiment les industriels français ?

Je comprends qu'il nous faut trouver un point d'équilibre entre les intérêts de l'Etat français, ce qui suppose de mettre en concurrence ces industriels afin de faire baisser les prix des équipements. Mais en même temps, il ne faut pas ouvrir la concurrence au point d'ouvrir le marché européen à tous les vents de la concurrence internationale, ce qui aurait des effets dévastateurs sur notre base industrielle. On ne peut pas à la fois vouloir l'Europe et la démanteler.

Bref, il appartient au législateur de ne pas succomber aux sirènes de nos industriels qui n'ont pas nécessairement tous une vision enthousiaste de la concurrence lorsqu'elle s'applique à eux, mais en même temps éviter, comme le rappelait le Président de la République dans ses voeux aux français, que l'Europe en général et la France en particulier soit le seul lieu où la naïveté industrielle ait cours. Protéger notre industrie, demander la réciprocité dans les négociations commerciales, militer pour une préférence communautaire, n'a rien d'anormal.

Le point d'équilibre proposé par le texte du Gouvernement est peut être, à cet égard, perfectible ? Je vous cède la parole.

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