a tout d'abord indiqué que le programme 178 regroupait près de 90 % des personnels civils et militaires de la défense, ce qui lui permettrait d'évoquer plus largement la problématique des effectifs du ministère.
Il a souligné qu'après une phase de montée en puissance des effectifs, liée à la mise en place de l'armée professionnelle à partir de 1997, la défense était entrée dans une phase différente, marquée par la volonté de maîtriser la masse salariale en agissant sur les effectifs. Ce changement a coïncidé, en 2006, avec la mise en oeuvre de la LOLF et le passage d'une logique de postes budgétaires à une logique de masse salariale globale.
Il a noté qu'en 2008 les dépenses de personnels de la défense étaient marquées par les mêmes orientations que celles de la fonction publique d'Etat : il s'agissait de ne pas remplacer l'ensemble des départs en retraite, tout en améliorant la rémunération des personnels en poste. A ce titre, 2.426 équivalents temps plein (ETPT) sont supprimés sur la mission « Défense », dont 1.872 militaires et 554 civils, ce qui correspond au non-remplacement, sur deux ans, d'un départ à la retraite sur deux.
Il a rappelé que le ministère de la défense restait le deuxième employeur de l'Etat, derrière l'enseignement scolaire, avec 14,52 % des effectifs et 15,26 % des crédits de rémunération et charges sociales. Il a indiqué que les crédits destinés à la masse salariale passaient de 18 milliards d'euros, en 2007, à 18,3 milliards d'euros en 2008 et que l'évolution à la baisse du plafond d'emploi permettait le financement de mesures catégorielles au profit des personnels civils et militaires. 44,82 millions d'euros sont ainsi consacrés à l'amélioration de la solde des militaires du rang et des sergents, en application des recommandations du haut comité d'évaluation de la condition militaire. Ces mesures s'ajoutent à la poursuite du plan d'amélioration de la condition militaire, qui porte en grande partie sur le logement, et aux crédits du fonds de consolidation de la professionnalisation qui supporte diverses mesures en faveur de la condition militaire.
a souligné que les orientations générales en matière de personnel se déclinaient en fonction des spécificités propres à la défense, qui se caractérisent, d'une part, par la coexistence de personnels civils et militaires à la gestion totalement cloisonnée et, d'autre part, pour les militaires, par l'importance de la proportion des personnels sous contrat (près de 54 %) et par la nécessité opérationnelle d'entretenir un volume régulier de départs et de recrutement pour maintenir une moyenne d'âge peu élevée (31,5 ans en moyenne, 26 ans pour les militaires du rang).
Il a relevé qu'en l'absence de réformes plus vastes, les armées allaient répartir l'effort dans les services de soutien et décaler ou geler les recrutements dans certaines spécialités. Il a observé que les deux processus de réduction d'effectifs, militaire et civil, étaient menés de façon parallèle, sans aucune articulation. Plus généralement, ces deux populations sont gérées de façon totalement cloisonnée et ne sont soumises ni à la même autorité de gestion, ni aux mêmes règles de mobilité et de calendrier de mutation. Il a considéré que le ministère de la défense devrait ouvrir ce chantier afin de s'adapter de façon plus souple aux contraintes d'effectifs.
Il a souligné que l'autre chantier d'importance était celui de la révision des schémas d'implantation, qui devrait être, à la suite de la révision générale des politiques publiques et du nouveau Livre blanc, placée au coeur de la prochaine loi de programmation militaire. En mutualisant davantage les services de soutien, les armées pourront préserver leur efficacité opérationnelle dans un contexte de réduction des effectifs.
Il a précisé que, dans l'attente de cette réforme, les solutions adoptées étaient peu satisfaisantes. Les recrutements sont utilisés comme variables d'ajustement, ce qui est très dommageable à court terme, mais surtout à moyen terme car un arrêt des recrutements accentue la vulnérabilité des armées à toute modification de leur environnement, comme des départs massifs vers de grandes entreprises publiques ou privées.
Il a souligné qu'en outre les armées seraient très certainement exposées à des difficultés croissantes de recrutement pour des raisons démographiques. Il a relevé que l'indicateur fourni par le projet de loi de finances ne rendait pas compte de la dégradation du taux de sélectivité, mais qu'il s'érodait de fait, notamment pour les militaires du rang. Il a cependant souligné qu'à la différence d'autres secteurs marqués par de fortes contraintes, les armées pourvoyaient dans l'immédiat à leurs besoins de recrutement.
Dans ce contexte, il a estimé que le plan pour l'égalité des chances, qui visait à ouvrir plus largement les lycées et les écoles militaires aux jeunes socialement défavorisés, était tout à fait dans l'intérêt des armées, en permettant de mieux refléter la diversité de la société française après la suspension du service national, mais aussi de recruter des personnes dans un vivier plus large.
Il a remarqué que l'élargissement du champ du recrutement se traduisait par un effort particulier sur la formation, qu'une part limitée des personnels recrutés avait vocation à faire une carrière longue et que, par conséquent l'accent devait être mis sur la reconversion. Sur ce dernier point, il a estimé que, là encore, l'indicateur fourni était très insuffisant.
Evoquant la problématique des retraites, il a indiqué qu'en dépit de limites d'âge assez basses, compte tenu des possibilités de retraite à jouissance immédiate à 15 et 25 ans de service, rares étaient les militaires qui faisaient liquider leur pension à la limite d'âge statutaire. Ces règles spécifiques se traduisent par un taux de cotisation employeur de 103 % en application duquel la contribution au compte d'affectation spéciale sur les pensions s'élevait à 5 milliards d'euros sur le programme 178. Il a indiqué que, pour 2008, la charge des pensions militaires était estimée à 8,5 milliards d'euros.
Abordant enfin les opérations extérieures, il a noté que le processus de budgétisation des surcoûts marquait le pas avec une stabilisation de la provision à 360 millions d'euros. Il a rappelé que, pour 2007, ce surcoût était estimé à 650 millions d'euros et souligné que rien ne laissait présager une diminution du niveau d'engagement de la France en 2008. En 2008, comme en 2007, quelque 300 millions d'euros de dépenses devraient donc trouver un financement en cours d'année, ce qui représente un risque pour les programmes d'armement qui ont longtemps été la variable d'ajustement aux surcoûts des opérations extérieures. Il a estimé, en conclusion, que le Sénat s'apprêtait à voter un budget de transition dans l'absence de réformes substantielles. La commission devrait veiller à ce que ces réformes soient accompagnées de façon satisfaisante tant sur le plan social que sur celui des infrastructures ou encore des équipements.
s'exprimant également au nom de M. Philippe Nogrix, rapporteur pour avis, empêché, a ensuite présenté les crédits de fonctionnement du programme 178.
Avant d'analyser ces crédits, il a rappelé le caractère spécifique du projet de loi de finances pour 2008 dans le domaine de la défense : il s'agit d'un budget de transition, qui clôt l'exécution de la loi de programmation militaire (LPM) 2003-2008, et qui a été construit dans l'attente des conclusions des travaux menés, tant par la commission du « Livre blanc » que par l'audit de l'ensemble des ministères. Pour accompagner cet audit, le ministre de la Défense a installé, le 4 septembre 2007, un groupe de travail composé de sept chefs d'entreprise chargés d'analyser les propositions d'économie et de réorganisation qui vont être proposées par cet audit.
Le but recherché est d'inscrire le ministère de la Défense dans une logique de maîtrise de la dépense publique, a souligné M. André Dulait.
Cette maîtrise portera, selon les termes du ministre, « sur différentes fonctions sans lien avec l'activité opérationnelle des armées, notamment la logistique, les transports, les achats, la communication et l'informatique ». L'ensemble de ces fonctions relève du titre 3, dont l'essentiel des crédits est cependant affecté au financement du maintien en condition opérationnelle (MCO) des différents équipements utilisés par les trois armées.
s'est félicité qu'un effort marqué ait été accompli depuis 2000 pour en rationaliser l'organisation et en réduire les coûts. Il a précisé que les financements affectés au MCO des divers équipements en service dans les armées aient été nettement accrus depuis 2002, en contraste avec leur trop faible volume antérieur. Cet effort budgétaire, destiné à redresser des taux de disponibilité parfois inférieurs à 50 %, s'est accompagné d'une rationalisation, qui n'est pas achevée, de l'organisation et des modalités de réalisation des opérations de MCO. Le Service de Soutien de la Flotte (SSF) a été créé, a-t-il rappelé, en 2000 puis, en 2002, la structure interarmée de maintenance des matériels aéronautiques de défense (SIMMAD), qui a beaucoup contribué à mutualiser et rationaliser les opérations de maintenance aéronautique, et donc à freiner l'impressionnante croissance de leurs coûts. Le Service industriel de l'aéronautique (SIAé), sera institué au 1er janvier 2008 pour en prolonger l'action. Il aura pour tâche d'organiser la délégation au secteur privé des activités de soutien générales, et donc de limiter la maintenance au sein des forces aux activités de proximité.
Enfin, l'armée de terre mettra en oeuvre, durant l'année 2008, une politique d'emploi et de gestion des parcs (PEGP) qui vise à rationaliser l'utilisation de ses matériels et à réduire le coût de leur soutien.
A ces restructurations s'ajoute la création, depuis décembre 2003, de la Direction interarmée des réseaux d'infrastructures et des systèmes d'information de la Défense (DIRISI), pour gérer l'ensemble des systèmes d'information et de communication de la défense.
Ces efforts dans les domaines des matériels et des réseaux ont été accompagnés par la réforme intervenue en 2003 de l'économat des armées, qui est chargé du soutien logistique et de la fourniture de services, de denrées et de marchandises diverses aux formations militaires en France et à l'étranger.
a ensuite estimé que l'ensemble de ces actions, pour la plupart destinées à restructurer et à mutualiser des moyens destinés aux trois armées, doit être salué, car il démontre que nos forces ne cessent, depuis la professionnalisation, de réfléchir à leur organisation et de l'optimiser, grâce à une démarche interarmées pragmatique.
Puis il a abordé la présentation synthétique des perspectives ouvertes par les crédits de fonctionnement pour 2008 pour chacune des armées. Pour l'armée de terre, il a souligné que les services du commissariat, chargés des commandes des effets de protection, vêtements de combat, ainsi que des tenues diverses, ont besoin au minimum d'un an pour notifier un marché public, éventuellement accru de la durée des recours des industriels écartés. De plus, l'industriel ayant remporté l'appel d'offres n'est pas toujours fiable, les livraisons n'étant pas toujours conformes aux échantillons fournis à cette occasion.
a constaté que les premiers bilans tirés des expériences d'externalisation, qui se sont multipliées depuis la professionnalisation, sont contrastés : 230 millions d'euros ont été ainsi affectés, en 2007, par l'armée de terre, à la réalisation de tâches non militaires (gardiennage et entretien de locaux). Or, le résultat n'est pas toujours satisfaisant, et chaque renouvellement triennal des contrats est l'occasion d'augmentations de leurs coûts, parfois très fortes, allant jusqu'à 30 % dans certains cas.
Le caractère récurrent de la maintenance des matériels lourds de l'armée de terre, comme la croissance continue de son coût, notamment du fait de leur sophistication accrue, devraient être mieux pris en compte avec la nouvelle répartition des parcs décidée pour 2008.
Pour les forces navales, le budget de fonctionnement représente10 % de l'ensemble du budget de la marine, soit environ 440 millions d'euros. La part de ces crédits affectée aux produits pétroliers est, sans surprise, en hausse, et a crû d'un montant d'environ 12 % du fonctionnement en 2004 à 19 % en 2007. Les 20 % prévus en 2008 sont probablement inférieurs à la réalité. La Marine procède elle-même à l'achat et la gestion des carburants de sa flotte, autonomie qui lui est nécessaire du fait de la dispersion de ses bâtiments dans le monde.
a rappelé que le MCO naval était spécifique, puisqu'à la différence des autres armées, qui fonctionnent selon une logique distinguant les matériels en parc et ceux en ligne, la flotte est utilisée en permanence. Elle compte 11 bâtiments à propulsion nucléaire (4 SNLE, 6 SNA et un porte-avions), dont l'entretien programmé consomme environ 70 % des ressources financières affectées au MCO.
Cet entretien passe par un partage des tâches entre industriels et équipages, dont le maintien des compétences est capital pour une flotte dont la centaine de bâtiments sont dispersés dans le monde, loin de leur base. La création du SSF, en 2000, conjuguée à des ressources financières apportées par la LPM 2003-2008, a permis de définir une stratégie, planifiée sur trois ans, de demande à l'industriel d'un nombre de jours de disponibilité (Plan Cap 2005). La visibilité ainsi assurée permet à ce dernier d'organiser et planifier ce travail dans la durée, et cette procédure va être renouvelée pour 3 nouvelles années (Cap 2008). Mais ces taux de disponibilité affichés ne portent que sur la plate-forme, et non sur le système d'arme dont elle est dotée, qui répond à d'autres critères. L'entretien des 240 aéronefs, de 19 types différents, et de 23 ans d'âge moyen est, lui, assuré par la SIMMAD. Tous les moyens techniques dont disposait la marine y ont été affectés, à l'exception des mécaniciens chargés de la maintenance des aéronefs embarqués.
L'entretien des infrastructures est source de préoccupation, car si elles ne couvrent que 3 % du domaine militaire, elles sont à la fois concentrées et disparates. La priorité incontestable étant l'entretien des installations nucléaires, celui des casernements en pâtit. De plus, les infrastructures héritées de DCN, relayée en 1995 par la DGA, sont dégradées, entraînant des risques majeurs, avec des fluides sous tension, ou des grues vieillissantes.
Pour les forces aériennes, l'essentiel du titre 3 est consacré au MCO, dont les crédits sont alloués à la SIMMAD. Les crédits consacrés à l'entraînement des personnels sont calculés en fonction d'hypothèses budgétaires sur le coût des carburants, aujourd'hui dépassées. Les objectifs retenus, dans ce domaine, par la LPM 2003/2008 risquent d'en pâtir ; tel est également le cas pour les autres armées. Jusqu'à présent, les niveaux d'activité pour les pilotes des différents aéronefs en service dans l'armée de l'air ont été globalement tenus. Ainsi, l'activité moyenne en heures de vol d'un pilote de combat était-elle de 171 h en 2005, 175 h en 2006 et était prévue à 178 h en 2007, alors que l'objectif était de 180. L'écart entre objectifs et heures réalisées est plus marqué pour les pilotes de transport : les heures effectives tournent autour de 300, contre 400 prévues. Cela est largement dû au vieillissement de cette flotte, notamment composée de Transall, que l'on s'efforce de ménager le plus possible.
Les crédits affectés à l'entretien des infrastructures existantes, dont les 38 bases aériennes situées en métropole, ne permettent pas de les entretenir de façon convenable. Ce déficit récurrent peut s'évaluer à environ 100 millions d'euros par an. Plusieurs éléments concourent à une réflexion spécifique sur les implantations de l'armée de l'air. En cinq ans, de 2000 à 2005, les flottes ont été réduites de 20 %, et l'armée de l'air retirera du service 500 appareils anciens de 2000 à 2012, alors que 150 appareils nouveaux lui seront livrés dans le même temps. A cette contraction du volume des flottes s'ajoute le caractère multinational des 50 avions de transport européens A 400 M, qui devraient être en service à partir de 2010. Cette construction en coopération devrait conduire à une mutualisation, entre les pays partenaires, des activités de soutien des appareils. L'ensemble de ces éléments conduira probablement à un resserrement des implantations de l'armée de l'air, qui ne sera d'ailleurs source d'éventuelles économies qu'au terme d'un processus coûteux étalé sur plusieurs années.
Avant de conclure, M. André Dulait, rapporteur pour avis, a mis l'accent sur les problématiques principales qui sous-tendent l'appréciation des financements consacrés au soutien des armées :
- le poste de dépense le plus important, le MCO, notamment aéronautique, a fait l'objet depuis 2002 d'une forte restructuration, fondée sur une « interarmisation » pragmatique avec la création de la SIMMAD. Cette structure doit encore améliorer son fonctionnement pour réduire les coûts d'entretien des matériels, mais beaucoup a déjà été fait ;
- en matière de dépenses courantes de fonctionnement, la sous-traitance d'activités non militaires présente, à l'usage, de dérives financières importantes faute de concurrence et de compétences suffisantes au sein des armées en matière de négociation de ce type de contrat. L'adjudication, la gestion de marchés publics comme la location de services sont des métiers à part entière, et l'on ne saurait reprocher aux militaires d'avoir besoin de temps pour les maîtriser. Cependant, il semble acquis que la location de services est coûteuse, et qu'elle le sera de plus en plus, car elle fait appel à de la main-d'oeuvre qui, même peu qualifiée, voit ses rémunérations croître régulièrement. L'efficacité des services ainsi accomplis n'en est pas pour autant garantie : l'entretien des locaux et des espaces verts, par exemple, présente des résultats très disparates. Or, des locaux dégradés pèsent notablement sur le moral des personnels. La seule piste réaliste pour réduire ces coûts passe, elle aussi, par le resserrement des implantations militaires. En conclusion, et suivant l'avis du rapporteur pour avis, la commission a adopté les crédits affectés, au sein du programme 178, au soutien des forces.