Intervention de Jean Faure

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 28 juin 2011 : 1ère réunion

Photo de Jean FaureJean Faure, co-rapporteur :

La communauté internationale n'est pas unie mais divisée, ce qui nuit à l'efficacité de son action. Elle occupe une place très importante, puisque l'on compte plus de 15 000 fonctionnaires internationaux pour un pays d'une taille comparable à un département français. Elle reste toutefois divisée. Alors que le bureau du représentant civil international est chargé de la mise en oeuvre du « plan Athisaari » et de rendre l'indépendance du Kosovo irréversible, le mandat des autres organisations internationales repose sur la résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations unies, qui est neutre à l'égard du statut.

Par ailleurs, l'efficacité de ces organisations est freinée par les divisions entre les Etats membres, dont certains ont reconnu l'indépendance et d'autres non, par les intérêts divergents entre les Etats et par l'absence de réelle volonté politique, à l'image de la mission EULEX de l'Union européenne qui est chargée de faire respecter l'Etat de droit, mais qui se heurte à des obstacles tant de la part des autorités de Pristina que des Serbes du Nord.

Les différentes attitudes de ces organisations à l'égard des « structures parallèles » du Nord, soutenues par Belgrade et plus ou moins contrôlées par des organisations criminelles, est symptomatique de ces divisions.

Alors que le bureau du représentant civil international cherche à les éradiquer et qu'EULEX les considère comme illégales, la KFOR et l'OSCE les tolèrent tandis que la MINUK leur reconnaît même une certaine légitimité.

On trouve également de fortes différences culturelles entre ces organisations et entre les différentes nationalités qui les composent.

Ainsi, certains de nos interlocuteurs se sont montrés critiques sur l'image donnée par le nombre très élevé de fonctionnaires internationaux et leur niveau de vie dans un pays relativement pauvre.

La longue présence de l'ONU, et son mode de fonctionnement, qui aurait déteint sur les autres organisations, ont également été souvent critiqués par nos interlocuteurs.

Si les Français semblent très appréciés, à la fois par les Kosovars albanais, et par les Serbes, cela semble moins vrai pour d'autres nationalités, qui n'entretiennent pas les mêmes rapports et hésitent à se rendre au Nord. De plus, les militaires et les gendarmes français sont souvent les seuls à être disponibles en permanence, y compris la nuit et le week-end, ce qui n'est pas toujours le cas des autres.

Dans ce contexte, il faut s'interroger sur l'efficacité de la présence internationale, et notamment du soutien financier très important qu'elle apporte à ce pays. Il me semble que cette aide financière engendre une certaine forme d'assistanat, qui n'est pas propice au développement des initiatives et à la responsabilisation des autorités kosovares. Je pense en particulier au développement économique. La population kosovare est très jeune : 50 % a moins de 25 ans. Mais, avec un taux de chômage de 45 %, le pays n'est pas en mesure de répondre aux attentes de cette jeunesse.

Il me semble donc indispensable de réfléchir à une évolution de la présence internationale, afin de la rendre plus efficace.

Ainsi, la police kosovare est aujourd'hui une institution efficace et crédible. Est-il toujours nécessaire d'avoir autant de policiers ou de gendarmes internationaux pour remplir des fonctions que les policiers kosovars sont en mesure d'assumer ? Ne serait-il pas plus utile de réduire le nombre d'agents internationaux mais de recruter certains spécialistes, notamment en matière de lutte contre la criminalité organisée ou l'immigration illégale ? De même, la présence de l'OSCE est-elle toujours justifiée ?

Si l'indépendance est désormais acquise, il reste à construire un véritable Etat.

Le dialogue entre Pristina et Belgrade est très positif. Il devrait permettre de résoudre un certain nombre de difficultés pratiques rencontrées par les citoyens dans leur vie quotidienne, par exemple en matière d'état civil ou de droits de propriété. Il pourrait également permettre de désenclaver le pays et de développer l'économie du Kosovo qui reste très dépendante de l'aide financière de la Communauté internationale et des transferts de fonds de la diaspora albanaise. A terme, ce dialogue devrait déboucher sur la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo. Pourquoi l'Union européenne ne pourrait-elle pas dire clairement à la Serbie qu'il est nécessaire qu'elle reconnaisse l'indépendance du Kosovo pour adhérer à l'Union européenne ?

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