En réponse aux questions de M. Gérard Dériot, rapporteur, sur l'ampleur du mal-être au travail, Mme Danièle Linhart, sociologue du travail, directrice de recherche au CNRS, a précisé que la mesure du mal-être est particulièrement difficile. Son approche en tant que chercheuse est celle d'une sociologie qualitative du travail fondée sur des enquêtes menées tant dans le secteur public que dans le secteur privé, au sein d'entreprises de toute taille. On constate qu'émerge aujourd'hui une dimension tragique et angoissante du travail qui n'existait pas dans les années soixante-dix et quatre-vingt. En se saisissant de la question du mal-être, les syndicats se font le relais du désarroi ressenti par les salariés mais il est impossible d'en avoir une mesure précise, notamment parce que les entreprises ne tiennent pas de registre des suicides commis sur le lieu de travail et que de tels actes sont de toute façon plurifactoriels. Il faut néanmoins noter que la France a une forte consommation de psychotropes et se classe au deuxième rang, en Europe, par le nombre de suicides au travail.
Des pratiques qui relèveraient aujourd'hui du harcèlement existaient déjà dans les années cinquante-soixante, à l'époque où les industries étaient organisées sur un mode taylorien, mais la souffrance des salariés était alors prise en charge par des collectifs qui assuraient solidarité et entraide. La souffrance au travail avait un sens syndical et politique, les salariés s'estimaient victimes de rapports de domination et d'exploitation. Aujourd'hui, les mêmes souffrances sont vécues sur le mode de l'échec individuel et ne trouvent plus de résonnance dans la société.
a souhaité savoir quel rôle joue le management, et spécialement le management intermédiaire, dans la souffrance au travail.