Intervention de Jacques Legendre

Commission des affaires culturelles, familiales et sociales — Réunion du 12 septembre 2007 : 1ère réunion
Enseignement supérieur — Mission d'information portant sur la diversité sociale et l'égalité des chances dans la composition des classes préparatoires aux grandes écoles - examen du rapport d'information

Photo de Jacques LegendreJacques Legendre, président :

a rappelé, au préalable, que la commission avait souhaité, à la suite de la proposition de loi déposée par M. Yannick Bodin et les membres du groupe socialiste, approfondir la réflexion sur un sujet faisant l'objet d'une préoccupation partagée. La mission d'information qu'elle a constituée en son sein a choisi de centrer son propos sur la diversité sociale dans l'accès aux classes préparatoires aux grandes écoles, et n'avait donc pas vocation à aborder, de façon générale, la question du positionnement de ces filières sélectives au sein de notre système d'enseignement supérieur.

Il a indiqué que la mission d'information avait auditionné plus de quarante personnes et effectué quatre déplacements sur le terrain, à l'Institut d'études politiques de Paris, en Seine-et-Marne, dans le Nord puis dans le Calvados. Cela lui a permis de prendre la mesure, par des témoignages concrets, des freins sociaux, financiers ou culturels, mais également des inégalités territoriales, qui persistent pour l'accès aux classes préparatoires et aux grandes écoles.

Rappelant que la mission avait initié ses travaux sur la base d'un soupçon de « reproduction sociale » des élites de notre pays, dont les grandes écoles assurent en grande partie la formation, il a indiqué que le rapport présentait une analyse statistique détaillée, confirmant l'existence de discriminations sociales et territoriales dans l'accès aux classes préparatoires. Il a considéré que la complexité et la relative opacité de ces filières, combinées aux lacunes de notre dispositif d'information et d'orientation des élèves, contribuaient à entretenir une situation qui s'apparente à une forme de « délit d'initié ».

Ainsi, alors que seuls 5 % des élèves entrés en 6e accèdent aux grandes écoles et que les classes préparatoires accueillent près de 9 % des bacheliers généraux et technologiques d'une génération, une étude parue en 2003 montre que la probabilité, pour un enfant de cadre ou d'enseignant, d'intégrer une grande école est de 20 points supérieure à celle d'un enfant d'ouvrier. Cette même étude relève une interruption de la démocratisation de l'accès aux grandes écoles à partir des années 80, alors qu'en parallèle l'université continuait à se démocratiser. Les classes préparatoires accueillent, quant à elles, 54 % de jeunes issus de milieux favorisés, c'est-à-dire une proportion supérieure aux autres filières post-bac.

Si cette situation résulte d'inégalités s'observant en amont, tout au long de la scolarité, elle renvoie également à plusieurs points de blocage identifiés par la mission :

- un phénomène d'auto-censure, lié notamment aux défaillances de notre système d'information et d'orientation ;

- des handicaps financiers ;

- des inégalités territoriales, qui ne concernent pas seulement les banlieues difficiles, mais également les zones rurales enclavées ou les zones industrielles en reconversion ; en effet, 21 départements ne comptent aucune classe préparatoire.

A l'issue de cette présentation, M. Jacques Legendre, président, a indiqué que ces constats interpelaient les grandes écoles et les milieux économiques, soucieux d'élargir leur vivier de recrutement, mais également les pouvoirs publics, puisqu'une société qui ne tire pas le meilleur de chacun de ses jeunes se prive d'une formidable richesse et que cette situation entrave, à terme, la légitimité de notre système de formation des élites.

Il a précisé que la prise de conscience, récente, de ces enjeux avait donné lieu à un « fleurissement » d'initiatives, présentées dans le rapport. Si celles-ci suscitent un vent d'optimisme dont il faut se réjouir, elles soulèvent néanmoins des interrogations, le risque étant qu'elles engendrent de nouvelles inégalités. Ces expérimentations, qui ne concernent en effet qu'un nombre limité de lycées et d'élèves, consistent le plus souvent en un accompagnement sous la forme d'un tutorat. Mais il peut s'agir, comme tel est le cas à l'Institut d'études politiques de Paris, pionnier en la matière, d'une voie d'accès spécifique.

Il a jugé nécessaire de viser un public plus large, les propositions de la mission tendant notamment à ce qu'aucun jeune ne soit exclu des dispositifs d'information et d'accompagnement vers les classes préparatoires et les grandes écoles.

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