a tout d'abord fait un bref rappel quantitatif. En première lecture, le Sénat avait examiné un projet de loi de quinze articles répartis en trois titres respectivement consacrés :
- à la réglementation des professions du tourisme, en particulier les agences de voyages et les voitures de « grande remise », et à la création de l'Agence de développement touristique de la France, dorénavant appelée « Atout France », dénomination donnée par les députés ;
- à la rénovation de l'offre touristique, notamment le classement des hôtels et de divers autres types d'hébergement ;
- à l'accès aux séjours touristiques, avec l'élargissement des chèques-vacances aux salariés des entreprises de moins de 50 salariés et la problématiques des résidences en temps partagé.
Tout en approuvant les lignes directrices de ce texte, le Sénat y avait apporté un certain nombre d'adjonctions, dont sept articles additionnels :
- trois d'entre eux prévoyaient le dépôt de rapports du Gouvernement au Parlement sur l'accueil des touristes dans les aéroports internationaux français, sur la situation des résidences de tourisme et sur les difficultés de mise aux normes des petits établissements hôteliers ;
- quatre autres visaient, respectivement, à encadrer l'activité des motos-taxis, à réformer la durée des baux commerciaux dans les résidences de tourisme, à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour transposer la directive « timeshare » du 14 janvier 2009 et, enfin, à élargir les possibilités de dégrèvement de taxe de séjour forfaitaire en cas de circonstances exceptionnelles.
Sur les vingt-deux articles qu'elle a examinés, l'Assemblée nationale n'en a adopté que deux conformes (les articles 2 et 16). Elle en a supprimé trois (dont deux par coordination) et, surtout, elle en a ajouté seize, dont certains ne sont pas anodins, tels que ceux concernant la réduction du taux de TVA dans la restauration à 5,5 % ou la déclaration d'intérêt général pour certaines enceintes sportives. Ce sont donc au total trente-six articles que le Sénat doit examiner en deuxième lecture.
Puis Mme Bariza Khiari, rapporteure, s'est réjouie que les députés aient confirmé les positions du Sénat, sous réserve parfois de modifications strictement rédactionnelles, sur les points suivants :
- aux articles 1er et 3, la réforme du régime de la vente de voyages et de séjours, avec notamment des améliorations et précisions apportées en matière de formation professionnelle, de garantie financière et de régime de responsabilité des agences en ligne ;
- à l'article 4, l'immatriculation des exploitants de voitures de grande remise auprès d'Atout France et, avec l'article 4 bis A, la création d'un encadrement analogue de l'activité des motos-taxis ;
- à l'article 6 relatif à l'agence Atout France, avec en particulier la fixation détaillée de ses missions et leur élargissement à toutes missions d'intérêt général compatibles avec l'objet de l'agence, des responsabilités reconnues en matière de classement, un rôle de diffuseur d'informations gratuites au sujet de ces classements, et enfin la possibilité pour les organismes locaux de tourisme de participer à l'agence ;
- concernant le classement, la fixation à cinq ans de la durée du classement hôtelier prévu par l'article 8 et la possibilité de créer un label pour les hôtels exceptionnels ; la création légale, par l'article 9, du classement homologué par l'Etat des chambres d'hôtes, au même titre que les autre types d'hébergement ;
- en matière de résidences de tourisme, l'approbation du contenu de l'article 9 bis relatif à la durée des baux commerciaux et du principe posé par l'article 10 bis d'un rapport du Gouvernement sur la situation de ces résidences, tout en l'élargissant à tous les types d'hébergement ;
- à l'article 11, la déclaration obligatoire d'un meublé de tourisme auprès de la mairie et, à l'article 12, le fait que la formation sur les boissons alcoolisées des exploitants de « tables d'hôtes » pourrait être dispensée par leurs fédérations nationales ;
- s'agissant de l'article 14 et des chèques-vacances, l'Assemblée nationale n'a pas remis en cause ce qui constituait une « ligne jaune » à ne pas franchir : le caractère public de l'Agence nationale des chèques vacances (ANCV). Elle a de surcroît maintenu l'extension du bénéfice des chèques-vacances aux chefs d'entreprises de moins de 50 salariés et prévu que les concubins des bénéficiaires seraient également concernés ;
- en ce qui concerne les contrats de jouissance d'immeuble à temps partagé, les députés, conformément aux engagements pris par le Gouvernement au Sénat, ont achevé la transposition de la « directive timeshare » dans le cadre de l'article 15, ce qui leur a permis de supprimer l'article 15 bis qui autorisait la délégation législative par ordonnance ;
- enfin, les députés ont adopté sans modification l'article 16 relatif à la modulation de la taxe de séjour forfaitaire en raison de circonstances exceptionnelles et retenu également le principe du rapport du Gouvernement sur les difficultés de mise aux normes des petits établissements hôtelier posé par l'article 17, tout en déplaçant sous un article 8 bis nouveau et en précisant le contenu et les objectifs du rapport.
a ensuite évoqué les apports du Sénat modifiés par l'Assemblée nationale dans leur forme mais pas dans leur esprit :
- sur le régime des bons-cadeaux figurant à l'article 1er, rappelant que c'était à son initiative que des dispositions avaient été introduites dans le texte pour donner un cadre à cette activité qui s'est développée récemment dans un flou juridique insatisfaisant pour la protection du consommateur, elle a précisé que le Sénat avait proposé d'obliger les émetteurs de ces bons à passer par une centrale de réservation, responsable de la prestation touristique. L'Assemblée a suggéré un dispositif différent faisant directement porter la responsabilité sur l'émetteur lui-même. A la réflexion, la rédaction des députés semble vérifiable car le modèle économique des bons cadeaux veut que l'acheteur du bon n'est en général pas son utilisateur final : dès lors, il est bien plus protecteur pour ce dernier de pouvoir s'adresser à l'émetteur en cas de difficulté, et le dispositif en sera simplifié puisque toutes les informations permettant d'engager la responsabilité de l'émetteur devront figurer sur les emballages de ces bons-cadeaux ;
- à l'article 4, relatif aux voitures de grande remise, l'Assemblée nationale a renvoyé au décret le soin d'établir les conditions d'aptitude professionnelle des chauffeurs. Le Sénat peut accepter cette solution dès lors que le ministre a confirmé devant la commission que figureront au titre de ces conditions des capacités linguistiques et que les modalités que le Sénat avait prévues pour justifier de ces aptitudes (le stage, l'exercice d'activités antérieures, un examen professionnel ou la possession d'un diplôme, d'un titre ou d'un certificat agréé) seront bien retenues par le décret ;
- sur l'article 4 bis, relative aux motos-taxis, si les députés ont approuvé le principe de l'encadrement de cette activité, ils ont préféré aux modalités retenues par le Sénat celles d'un de leur collègue, M. Didier Gonzalès, qui ont fait l'objet de négociations approfondies tant avec la profession qu'avec le ministère de l'intérieur. Dès lors que les objectifs sont bien les mêmes et que la situation du consommateur est sécurisée en même temps que les conditions de concurrence avec les taxis sont bien prises en compte, le texte de l'article 4 bis A est acceptable ;
- les députés ont ensuite supprimé l'article 4 bis qui demandait un rapport sur l'accueil des touristes dans les aéroports internationaux français. A la demande de la rapporteure, le ministre s'est engagé devant la commission à fournir à la représentation nationale, dans le courant du premier trimestre 2010, ce rapport attendu par de nombreux sénateurs, malgré l'absence de disposition législative expresse ;
- aux articles 8 et 9, les députés ont jugé peu efficient d'interdire à un même organisme évaluateur de contrôler plus de deux fois successivement le même établissement, cette mesure ne trouvant à s'appliquer pour la première fois qu'en 2023. Ils ont préféré interdire à ces organismes de commercialiser d'autres prestations de services concomitamment à l'évaluation, ce qui est plus intéressant pour garantir l'objectivité de celle-ci ;
- à l'article 9, les députés ont également supprimé la procédure d'évaluation des chambres d'hôtes par un organisme accrédité. Il est vrai que le Sénat avait créé le classement des chambres d'hôtes sans tenir compte de l'extrême hétérogénéité tant de l'offre de ces structures que des organismes qui procèdent à l'évaluation, pour lesquels la procédure COFRAC est sans doute inadaptée en raison de sa très grande rigueur. Il est donc préférable, dans un premier temps, de procéder par voie réglementaire pour établir un dispositif d'évaluation adapté à la réalité de ce secteur de l'offre d'hébergement, en liaison avec les associations représentatives, l'agence Atout France et les organismes locaux de tourisme. Il vaut mieux créer un système visant à faire entrer les chambres d'hôtes dans le cadre d'une offre d'hébergement de qualité standardisée qui fonctionne, après avoir mené une consultation, quitte à le légaliser ultérieurement, plutôt que de vouloir « boucler » immédiatement le dispositif de classement au risque de le rendre si rigoureux que beaucoup de gestionnaires de chambres d'hôtes trouveraient trop lourd et trop coûteux de s'y engager ;
- à l'article 11, l'Assemblée nationale a, à juste titre, supprimé la procédure dérogatoire propre aux autoentrepreneurs, estimant que les maires devaient être informés de la même manière quelle que soit la qualité des personnes proposant des chambres d'hôtes ou des meublés de tourisme
- à l'article 12, elle a souhaité que toutes les personnes offrant des boissons alcoolisées soient soumises à la même formation, supprimant l'idée d'une formation « adaptée » pour les tables d'hôtes : le plus important est cependant demeuré, à savoir que pour les exploitants des tables d'hôtes, leurs fédérations nationales seront autorisées à dispenser cette formation ;
- s'agissant de l'article 14 relatif à l'ANCV, les députés n'ont pas retenu la proposition du Sénat d'élargir ses missions aux non salariés. Cette position est justifiée car il ne faut pas confondre la mission de solidarité sociale de l'ANCV, qui est déjà réalisée au travers notamment de la Bourse solidarité vacances (BSV) et des partenariats noués avec des associations caritatives au bénéfice des publics fragiles, avec sa mission propre au monde des entreprises. Avec les adjonctions adoptées au Parlement, sont désormais couverts tous les salariés, leur conjoint, concubin ou pacsé, et tous les chefs d'entreprises de moins de 50 salariés. Ainsi, seuls les professionnels libéraux qui ne sont pas constitués en société demeurent en dehors du dispositif, ce qui n'est pas choquant ;
- enfin, à l'article 15 relatif au « time sharing », l'Assemblée nationale a remplacé le retrait de droit de la société des héritiers de parts ou actions du capital social par une disposition faisant relever des « justes motifs » pouvant être reconnus par le juge non seulement cette situation d'héritier, mais aussi la fermeture ou l'inaccessibilité de la station ou de l'ensemble immobilier concerné. Cette solution d'équilibre est opportune : elle sécurise la situation des personnes concernées tout en préservant les intérêts des autres associés et en demeurant dans le cadre général du droit des contrats.
a achevé son exposé par la présentation des nombreuses adjonctions substantielles de l'Assemblée nationale, soit dans les articles venus du Sénat, soit par une quinzaine d'articles additionnels :
- à l'article 1er, les députés ont facilité la prise en charge des clients de l'organisme de garantie financière quand celui-ci se substitue au professionnel défaillant en situation d'urgence, ce qui est une bonne chose car dans ces situations, l'accord exprès des clients peut s'avérer impossible à obtenir et maintenir cette exigence peut être tout à fait défavorable au consommateur ;
- à l'article 5, les députés ont précisé que les offices de tourisme pourraient ouvrir des bureaux d'information touristique permanents ou temporaires ;
- à l'article 6, outre l'ajout d'Atout France à la dénomination de l'Agence de développement touristique de la France, ils ont prévu que celle-ci pourrait assurer sa représentation au niveau territorial en s'appuyant, le cas échéant, sur des structures existantes ;
- à la demande du Gouvernement, les députés ont ensuite inséré un article 7 bis afin, pour les bureaux de change manuels, de faire courir les délais de six mois et de deux ans dont ils disposent pour se conformer à la nouvelle législation, non pas à compter de la publication de l'ordonnance « blanchiment » du 30 janvier 2009, mais à compter de la parution de ses textes d'application : il est en effet impossible à ces bureaux de change d'être prêts au 1er août prochain puisque les textes réglementaires d'application de cette ordonnance, qui vont notamment détailler leurs obligations et les procédures à respecter, ne seront publiés que dans le courant du mois de juillet ;
- ont ensuite été insérés trois articles nouveaux qui ne posent pas de problème particulier : l'article 9 bis AA punit l'usage, de nature à induire le consommateur en erreur, des dénominations et appellations réglementées en matière d'hébergements touristiques ; l'article 9 bis A prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement relatif au classement dans l'ensemble des hébergements touristiques marchands, dans la perspective éventuelle de rendre tels ou tels de ces classements obligatoires ; l'article 9 bis B interdit l'installation des résidences mobiles de loisir sur des emplacements de terrains de camping ayant fait l'objet d'une cession en pleine propriété, cette mesure visant à mettre fin à une dérive contre laquelle, actuellement, les élus locaux ne peuvent pas lutter.
a ensuite indiqué être plus dubitative sur quatre articles nouveaux relatifs aux résidences de tourisme :
- l'article 9 ter autorise le conseil général à exonérer de taxe de publicité foncière les baux à durée limitée d'immeubles faits pour une durée supérieure à douze années ;
- l'article 9 quater soumet les exploitants de ces résidences à l'obligation de tenir des comptes d'exploitation distincts pour chaque immeuble et à les communiquer aux propriétaires, de même que les bilans annuels ;
- l'article 9 quinquies impose que figurent, dans les documents de commercialisation, les informations relatives au droit à l'indemnité d'éviction en cas de refus du renouvellement du bail ;
- et l'article 9 sexies oblige également à mentionner dans ces documents l'identité du gestionnaire de la résidence.
a rappelé que, en première lecture, il avait été convenu avec le ministre qu'un rapport sur ces résidences permettrait au Parlement de faire le point sur une législation qui ne donne pas aujourd'hui satisfaction, avant de la modifier globalement, de manière équilibrée, dans un nouveau texte. Or, si l'idée du rapport est conservée dans l'article 10 bis, les députés ont d'ores et déjà modifié, par petites touches, le régime applicable à ces résidences, sans cette vision d'ensemble qui semblait opportune. C'est pourquoi, sans être opposée sur le fond à ces dispositions, Mme Bariza Khiari, rapporteure, a regretté leur caractère épars et souhaité ne pas les compléter par de nouvelles adjonctions, préférant attendre les conclusions du rapport pour légiférer de manière cohérente et globale ultérieurement.
Puis elle s'est déclarée favorable à l'insertion, à l'article 10, d'une prolongation de trois ans du crédit d'impôt dont bénéficient les maîtres restaurateurs pour leurs dépenses permettant de satisfaire aux normes d'aménagement et de fonctionnement prévues par leur cahier des charges.
Sur l'article 10 bis A portant diminution à 5,5 % du taux de la TVA applicable à la restauration, elle a exprimé son accord de principe mais a demandé au ministre des explications sur les contreparties que la profession s'est engagée à prendre dans le contrat d'avenir signé avec l'Etat, et surtout sur les moyens dont dispose celui-ci pour en garantir l'application.
Enfin, Mme Bariza Khiari, rapporteure, a estimé que les six derniers articles additionnels adoptés par l'Assemblée nationale ne posaient pas de problèmes particuliers :
- l'article 13 bis vise à sécuriser la base juridique du prélèvement sur les jeux de casino ;
- l'article 13 ter déclare d'intérêt général les enceintes sportives figurant sur une liste qui sera fixée par arrêté du ministre chargé des sports. Ce dispositif suscite toutefois la crainte d'une possible privatisation totale en la matière : demain, le stade Coubertin sera-t-il remplacé par le stade Veolia ou Danone ?
- l'article 13 quater autorise le Gouvernement à réglementer par décret les horaires de fermeture des discothèques ainsi que leurs horaires de vente d'alcool ;
- l'article 14 bis prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur le régime des chèques-vacances ;
- l'article 18 sécurise le droit relatif aux entreprises de déménagement ;
- enfin, l'article 19 anticipe la prochaine réforme de la législation applicable au réseau des chambres de commerce et d'industrie en prorogeant le mandat de leurs membres jusqu'au 31 décembre 2010 au plus tard afin d'éviter la succession d'élections à quelques mois de distance seulement.
a conclu son propos en estimant que l'importance du travail effectué sur ce texte, tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, démontrait l'intérêt du Parlement pour le secteur du tourisme.
A l'issue de cette présentation s'est ouvert un large débat.