En réponse à ces interventions, M. Philippe Douste-Blazy, ministre des Affaires étrangères, a apporté les précisions suivantes :
- la France considère que, par rapport à des élections anticipées en Palestine, l'objectif prioritaire doit être la formation d'un gouvernement d'union nationale même si, sur le terrain, les récents affrontements à Gaza ont donné le sentiment d'un début de guerre civile ;
- on peut espérer que les autorités israéliennes donneront suite à l'engagement de libérer certains prisonniers palestiniens ; l'absence d'éléments nouveaux en ce sens depuis la rencontre du 23 décembre peut être liée aux difficultés au sein de la coalition gouvernementale, mais également aux contraintes des procédures judiciaires ; la France regrette pour sa part qu'aucune libération ne soit pour l'instant intervenue ; elle condamne également les nouvelles implantations de colonies en Cisjordanie annoncées par les autorités israéliennes ;
- la réunion du Quartet que la France propose d'accueillir à la fin du mois constituera un enjeu important ; l'implication plus forte de l'Union européenne a été entravée par les dissensions inter-palestiniennes et elle se trouverait facilitée si le Hamas faisait un pas en direction de la reconnaissance, même implicite, d'Israël ;
- la conférence de Paris sur le Liban a bien entendu un objectif politique, mais elle vise aussi à mobiliser l'aide internationale en faveur de la reconstruction afin de permettre au gouvernement libanais d'agir et de ne pas laisser au Hezbollah le monopole des initiatives en la matière sur le terrain ;
- la reprise du dialogue avec la Syrie nécessite que cette dernière marque par des actes concrets sa volonté de respecter la souveraineté et l'indépendance du Liban ;
- on ne peut que condamner avec la plus grande fermeté l'organisation par l'Iran d'une conférence visant à remettre en cause l'existence même de l'Holocauste ;
- les autorités israéliennes ont démenti formellement tout projet de frappes contre les installations nucléaires iraniennes ;
- la résolution 1737 du Conseil de sécurité enjoignant à l'Iran d'arrêter ses activités nucléaires sensibles a été votée à l'unanimité ; elle offre le choix à l'Iran de continuer à s'isoler ou, au contraire, ce que l'on doit encore espérer, de saisir l'occasion qui lui est de nouveau donnée de coopérer avec la communauté internationale ;
- la remise en cause du droit à l'énergie nucléaire civile pour l'Iran risquerait de fragiliser le traité de non-prolifération nucléaire (TNP) sur la base duquel, en contrepartie de ce droit, de nombreux pays ont renoncé à toute capacité nucléaire militaire ; il faut également veiller à ce que les pays du sud ne ressentent pas le régime international de l'énergie nucléaire comme discriminatoire à leur encontre ; en revanche, la question des garanties offertes par le TNP face au risque de passage d'un programme nucléaire civil à un programme militaire reste posée ;
- les changements intervenus au Congrès américain ne vont pas forcément se traduire par un changement radical d'orientation de la politique étrangère, celle-ci demeurant essentiellement déterminée par le Président Bush et par Mme Rice ;
- face au communautarisme et à l'escalade de la violence en Irak, il convient de veiller à associer l'ensemble des communautés aux institutions et à renforcer les instruments de souveraineté que constituent l'armée et la police, actuellement moins puissantes que les milices ; dans la perspective d'une sortie de crise, l'Irak doit d'abord miser sur ses propres atouts, notamment ses ressources naturelles considérables ; un dialogue doit s'établir avec les pays de la région ; enfin, il est indispensable de fixer un horizon clair pour le départ des forces étrangères ;
- préoccupée par les incidences possibles sur son territoire des évolutions au Kurdistan irakien, la Turquie plaide pour l'unité de l'Irak, ce qui rejoint les préoccupations françaises et celles de l'ensemble des voisins de l'Irak ;
- la situation en Afghanistan est marquée par la reprise des offensives des talibans, par une recrudescence à un niveau inégalé de la culture du pavot et par la dégradation des relations avec le Pakistan ; le rétablissement de la sécurité passe par un renforcement de l'armée et de la police afghanes, ainsi que par le déploiement des forces de l'OTAN dans certaines zones aujourd'hui incontrôlées ; il faut également continuer à aider les autorités afghanes à construire un véritable Etat ; c'est pourquoi le Président Chirac s'est exprimé, au sommet de l'OTAN de Riga en novembre dernier, en faveur d'une stratégie globale, politique et économique, l'OTAN se recentrant sur les opérations militaires ;
- le bilan humanitaire au Darfour est d'ores et déjà extrêmement lourd puisqu'on évoque 300 000 morts, 1,5 à 2 millions de personnes déplacées et environ 150 000 personnes privées de tout accès à l'aide humanitaire ; au-delà de ce drame, il existe un risque d'éclatement du pays et de déstabilisation régionale, dans une zone charnière entre monde africain et monde arabe ;
- la nouvelle force internationale au Darfour comptera 20 000 hommes (16 000 militaires et 4 000 policiers et gendarmes), ce qui la place parmi les plus grosses opérations de maintien de la paix engagées par les Nations unies ; elle sera composée de soldats africains et dotée d'un commandement africain, mais bénéficiera du soutien logistique de l'ONU ; l'actuelle mission de l'Union africaine souffrait d'un manque criant d'équipement qui paralysait ses possibilités d'action ; la nouvelle force conservera une mission centrée sur la sécurisation et l'interposition, mais elle bénéficiera des moyens logistiques de l'assurer plus effectivement ;
- la France entretient des contacts réguliers avec la Libye au sujet du Darfour ;
- l'Érythrée joue un rôle important dans la région, tant vis-à-vis du Darfour que de la crise somalienne ; dans cette dernière, elle a soutenu les islamistes en se déterminant largement en fonction de son contentieux avec l'Éthiopie ; la France entretient des contacts réguliers avec l'Érythrée et une rencontre avec le président érythréen est prévue en marge du prochain sommet France-Afrique ;
- le gouvernement ne peut accepter les mises en causes infondées à son encontre dans la responsabilité du génocide rwandais ; la rupture des relations avec le Rwanda n'est pas de son fait et il apparaît nécessaire d'attendre un apaisement des esprits avant de reprendre le dialogue avec ce pays ;
- en Côte d'Ivoire, des possibilités de dialogue entre le Président Gbagbo et les forces du Nord pourraient se développer ; la force Licorne a reçu mandat des Nations unies pour appuyer le processus politique et son retrait n'est donc pas d'actualité ;
- si une progression des formations islamistes au Maroc devait se réaliser lors des prochaines élections, elle soulèverait des interrogations sur la future coalition gouvernementale et sur les relations qu'elle établira avec le roi.