Intervention de Jean-Luc Andrieux

Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques — Réunion du 19 mai 2011 : 1ère réunion
Les installations nucléaires françaises face aux risques naturels

Jean-Luc Andrieux, Sécurité, Santé et Environnement (AREVA) :

directeur Sûreté, Sécurité, Santé et Environnement (AREVA). - Les installations d'AREVA sont diverses, chacune est unique, et elles concernent le cycle du combustible, en amont et en aval des centrales. La gamme de risques est donc étendue, notamment dans l'amont du cycle où, c'est important pour la cinétique, s'allient la partie nucléaire et la partie chimique. L'analyse de sûreté d'une installation intervient dès la phase de construction, puis lors des réexamens de sûreté. Cette analyse commence avec la caractérisation des phénomènes naturels locaux pour lesquels on s'appuie sur un historique des événements et, à ce stade, on prend déjà des marges. Pour cela, Areva s'appuie beaucoup sur des experts externes et internationaux. Nos installations ayant subi des modifications, ce système a été revu régulièrement ces quarante dernières années.

Le deuxième stade de l'analyse de sûreté, c'est l'identification des fonctions importantes pour la sûreté de l'installation. Les risques de dégagements thermiques et de radiolyse concernent surtout l'aval du cycle. La dispersion de matières dangereuses est un risque spécifique à nos installations. Il ne peut y avoir chez nous de criticité, le propre d'une centrale étant d'éviter le déclenchement d'une réaction nucléaire. La radioprotection est également prise sérieusement en compte. Nous analysons systématiquement les agressions dans le cadre d'une méthode déterministe.

Une fois identifiées les fonctions importantes pour la sûreté, il nous faut rechercher un ou plusieurs états de repli sûr, les plus passifs possibles, ce qui est le cas pour la majorité de nos installations, notamment en amont du cycle. Par exemple à Eurodif, l'état de repli, c'est l'arrêt de l'usine : dès lors il n'y a plus d'énergie à évacuer, l'installation s'autoprotège. De même, le risque de criticité est pris en compte dans la construction, le dimensionnement des pièces, comme dans le traitement de l'eau de nos installations. Mais certaines fonctions de sûreté nécessitent des systèmes actifs : refroidissement, ventilation, piscines, par exemple à La Hague ou à Melox.

Après avoir déterminé ces états sûrs de repli, nous définissons, dès la conception, les dispositions nécessaires pour les atteindre : arrêt de l'installation, mise en dépression. Quand Eurodif est arrêté, on a atteint l'état sûr, d'autant plus que, alors, la pression intérieure est inférieure à la pression atmosphérique. Cette étape de l'analyse conduit à l'identification des requis de sûreté pour chaque atelier de l'installation, lesquels seront repris dans la phase ultérieure.

Ces analyses sont prises en compte dans la conception, le dimensionnement, la construction et l'exploitation de l'usine par la mise en place de la défense en profondeur : barrières de prévention, moyens de détection et de surveillance, et par la gestion des écarts ou des situations accidentelles - je vous renvoie à mon audition précédente et à ce que j'ai dit du PUI et des forces d'intervention prévues.

Vous constaterez sur les images de nos installations de Melox que les bâtiments nucléaires sont très peu élancés, fondés sur un radier général - à La Hague ils sont même partiellement enterrés. Les matières radioactives sont confinées à l'abri de trois barrières successives : la « boîte à gants », l'atelier, le bâtiment lui-même. Au-delà de ces barrières statiques, on établit un confinement dynamique par une cascade de dépressions afin de limiter encore les risques. La boîte à gants apparaît relativement légère par rapport aux structures qui la supportent et qui, elles, tiennent compte des éventuels séismes. S'il y a disproportion entre les supports des réseaux fluides et ventilation, et ces réseaux eux-mêmes, c'est qu'ils sont dimensionnés au séisme majoré de sécurité (SMS). Quant aux pupitres de sauvegarde qui permettent de poursuivre la conduite des systèmes de sûreté en cas de séisme majeur, ils ont été testés sur table vibrante pour tenir compte de leur comportement dans une telle hypothèse. Nous avons accompli un gros travail de génie civil dans notre usine d'enrichissement Georges Besse II, avec la mise en place de plots intermédiaires entre les bases de la structure et l'atelier : on y a testé les appuis en vraie grandeur dans des laboratoires spécialisés, notamment en Allemagne.

Le retour d'expérience (Rex) est fondamental. Nous avons déjà intégré celui de phénomènes naturels importants - tempête de 1999, crues du Rhône, grands froids, canicules, qui ont permis de conforter notre expérience et de procéder aux modifications nécessaires. Le Rex sur les événements sismiques nous vient de l'étranger ; nos experts se sont aussi adaptés à l'évolution des règles de calcul. L'expérience d'Areva dans la construction d'usines - Sud-Est, Melox, La Hague - a d'ailleurs été confortée par la succession ininterrompue de grands chantiers sur une période de quarante ans.

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