Nous arrivons en effet au terme de nos travaux. Nous avons procédé à une actualisation de notre rapport d'étape pour tenir compte des évolutions survenues depuis lors. Certaines de nos propositions ont été intégrées dans les lois de financement de la sécurité sociale ; d'autres procédaient d'une réforme structurelle. Irons-nous vers de simples aménagements ou vers une grande réforme ?
Dans son premier rapport, la mission a dressé un panorama complet de la prise en charge de la dépendance. Elle a évalué l'effort public à 21 milliards d'euros, soit un point de Pib. La création de l'allocation personnalisée d'autonomie (Apa) au début des années 2000 et l'effort important de création de places et de médicalisation au sein des Ehpad placent la France en bonne position par rapport à ses voisins. Cependant, il reste à relever le défi du vieillissement de la population, car le nombre des plus de soixante-quinze ans va doubler dans les prochaines années. Il convient également d'améliorer les dispositifs de prise en charge et de rendre le schéma institutionnel plus lisible. Nous observions en outre un contexte financier et humain très contraint tant par l'état des finances publiques que par le reste à charge des familles.
Nous proposions d'abord de réaliser un effort plus équitable en direction des bénéficiaires de l'Apa à domicile, en améliorant la grille Aggir (autonomie gérontologie groupes iso-ressources), en relevant les plafonds d'aide de manière ciblée pour les personnes isolées et les patients atteints de la maladie d'Alzheimer, de permettre une revalorisation des plans d'aides et de solliciter les patrimoines les plus élevés à travers une prise de gage au moment de l'entrée en dépendance.
Afin de maîtriser le reste à charge et d'améliorer l'efficacité de la dépense en établissement d'hébergement, nous proposions une échelle dégressive de l'Apa en établissement et une adaptation des dépenses fiscales, une réforme de la tarification généralisant les forfaits globaux, une convergence des tarifs soins et le transfert d'une partie des dépenses des personnes hébergées sur la section soins ou la section dépendance.
Pour mettre en place un véritable partenariat public-privé et assurer un financement mixte du cinquième risque, nous nous étions prononcés en faveur du développement de la couverture assurantielle dépendance sur une base volontaire et plaidions pour le réaménagement de certains produits d'épargne, ainsi que pour le développement de contrats de prévoyance.
Nous souhaitions aussi, pour renforcer et clarifier la gouvernance du cinquième risque, clarifier les champs de compétence des différents acteurs et affirmer la parité de financement entre l'Etat et les départements, ce qui n'a jamais été inscrit dans la loi. Nous confortions enfin la place des départements pour en faire les véritables responsables de la politique médico-sociale.
Le rapport d'étape a été un élément important du débat sur le cinquième risque. Si la réforme a été retardée, plusieurs des avancées réalisées sont allées dans notre sens. Il en a été ainsi de la poursuite de l'amélioration de la prise en charge de la dépendance, l'Ondam médico-social personnes âgées ayant progressé de 8,3 % en 2009 et de 10,9 % en 2010 - son nouveau mode de construction entraînera une progression plus modérée en 2011. Le plan de relance de 2009 a dégagé des financements supplémentaires pour améliorer la prise en charge dans les structures d'accueil et accélérer la création de places. Le plan « Solidarité-Grand Age » a également permis d'en créer tout en renforçant la médicalisation des établissements d'accueil. Enfin, le plan Alzheimer a diversifié les formules de répit et lancé l'expérimentation des maisons pour l'autonomie et l'intégration des malades d'Alzheimer (Maia).
La loi de financement pour 2009 a institué une tarification des Ehpad à la ressource, proche de la tarification à l'activité (T2A) du secteur sanitaire. En généralisant les forfaits globaux, son objectif était de rendre la dépense en établissement plus efficace mais elle n'a pas pu entrer en vigueur, faute de décret d'application. Il ne faudrait pas que le prochain débat national serve de prétexte à un nouveau retard.
La loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) a bouleversé la gouvernance du secteur médico-social. Les agences régionales de santé (ARS) visent à décloisonner les secteurs sanitaire et médico-social ; la fongibilité asymétrique garantit des fonds dédiés au secteur médico-social tandis que l'architecture de la planification est rationalisée : un schéma national est élaboré sur proposition de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) ; le schéma régional est établi par le directeur de l'ARS, le préfet n'intervenant plus que dans les domaines régaliens ; le schéma départemental relève quant à lui du président du conseil général. Celui-ci est associé à l'élaboration du Priac sans en être cosignataire comme nous l'avions recommandé. Enfin, la loi a créé une nouvelle procédure d'appel à projets afin de sélectionner les plus conformes aux priorités régionales.
Le plan en faveur des métiers de la dépendance annoncé en 2008 a favorisé une professionnalisation accrue. Les grands axes des actions expérimentées depuis lors seront repris et approfondis dans le cadre des orientions nationales des formations sociales.
La grande réforme de la dépendance s'est fait attendre, mais de nombreuses actions ont été engagées tandis que de nombreuses réflexions ont abouti à des conclusions proches des nôtres. En 2009, la Cour des comptes a maintenu celles qu'elle avait formulées en 2005 : insistant sur le manque de transparence des tarifs de l'hébergement en institution ainsi que sur la grande hétérogénéité de la qualité des établissements, elle relève une gouvernance éclatée, des disparités départementales dans l'attribution de l'Apa et les incertitudes sur le financement de la prise en charge.
Valérie Rosso-Debord, notre collège députée, rejoint nos préconisations sur le rôle des ARS et la convergence entre Ehpad. Elle s'en éloigne néanmoins en proposant un recentrage de l'Apa sur les Gir 1 à 3 et en souhaitant une assurance obligatoire dès cinquante ans. Elle suggère en outre un niveau de récupération sur succession plus faible.
Il nous revient maintenant d'actualiser nos propositions en tenant compte des marges de progrès dans la qualité de la prise en charge. Le problème du reste à charge reste entier. En 2009, l'inspection générale des affaires sociales (Igas) a montré que le reste à charge des résidents ou des familles s'élève en moyenne à 2 200 euros, mais peut atteindre 5 500 euros.