Ajoutant que les autres secteurs d'activité, tels la papeterie, avaient été soumis aux mêmes difficultés et faisant état des risques de délocalisations induits, M. Franck Roubanovitch, président du CLEEE, s'est félicité de l'institution du tarif réglementé transitoire d'ajustement du marché (« TaRTAM »), qu'il a jugée indispensable. Puis, exprimant de fortes réserves quant à l'impact positif de l'ouverture du marché de l'électricité, il a observé que si les fournisseurs avaient été très actifs pour démarcher les entreprises, celles qui exercent leur éligibilité se trouvent dans une situation extrêmement négative, qui n'a pas été prévue, faute d'une correcte information, caractérisée par l'impossibilité de pouvoir revenir au tarif une fois l'éligibilité exercée, les distorsions du marché sur un même site, l'augmentation des prix alors que la concurrence aurait dû conduire à leur diminution, la perte de prévisibilité sur ces prix, qui pèse sur les investissements, et enfin la perte de réactivité et de qualité de service des fournisseurs, y compris EDF, dans la maintenance et les réparations. Stigmatisant l'alignement des prix de tous les fournisseurs sur ceux de la bourse Powernext, quelque soit le volume en transaction, il a également regretté la quasi-absence d'offre de contrats long terme, ou la limitation de leur durée à deux ou trois ans assortie de conditions de sortie très pénalisantes, et signalé que les appels d'offre internationaux ne changent pas la donne. Aussi a-t-il mis en garde contre l'ouverture du marché de la fourniture d'électricité aux particuliers qui risquent, selon lui, d'être « piégés » comme l'ont été les industriels. A cet égard, il a observé que si, d'après l'enquête réalisée par la Commission de régulation de l'électricité (CRE) en novembre 2006, seulement 10 % des entreprises considèrent que l'ouverture du marché n'a pas eu d'effets positifs, la grande majorité des entreprises est toutefois sagement restée au tarif régulé.
Puis, qualifiant d'absurde le fonctionnement du marché de l'électricité, M. Franck Roubanovitch a dénoncé le mécanisme de formation des prix qui, assis sur le coût marginal du dernier kilowattheure produit, a un effet inflationniste et ne satisfait, selon lui, à aucune rationalité économique, puisqu'il fait dépendre les prix de long terme du « stress » de court terme. Se référant aux récentes conclusions de l'enquête menée par la Commission européenne, qui a constaté que les résultats de l'ouverture des marchés ont été fortement différents de ceux attendus, il a également pointé le comportement oligopolistique des producteurs qui, pour favoriser une hausse artificielle des prix, ne mettent pas toujours tous leurs moyens en oeuvre, et des fournisseurs, dont il a souligné l'extraordinaire croissance des marges depuis dix ans, tant en France pour EDF que dans les autres pays européens. Il a également stigmatisé les dérives du marché des droits à émission de CO2, observant que certaines entreprises ont indûment facturé à leur clients des droits qui leur avaient été fournis gratuitement, et l'absence de transparence des prix pratiqués par EDF, prenant pour exemple le prix anticipé de l'électricité qui sera produite par l'EPR de Flamanville ou la croissance inexpliquée de 50 % du prix de marché de l'électricité produite aux heures « de base », c'est-à-dire par la filière nucléaire. Pour souligner le caractère largement artificiel du prix de l'électricité, il a fait observer que la seule mise en oeuvre du TaRTAM a conduit, immédiatement et toutes choses égales par ailleurs, à ce que le prix moyen du marché en France, qui était de 2 euros supérieur au prix allemand, lui soit dorénavant inférieur de 3,50 euros.
Indiquant que la majorité des adhérents du CLEEE allaient opter pour ce tarif, dont le niveau est situé à mi-chemin entre le prix réglementé et les prix de marché, M. Franck Roubanovitch a salué la récente publication du décret instituant le mécanisme de compensation des charges, tout en regrettant que le TaRTAM n'encourage pas suffisamment, faute de le valoriser correctement, l'effacement des gros consommateurs les jours ou périodes de pointe. Pour souligner toutefois l'intérêt de ce mécanisme, il a indiqué que les autres stratégies de réaction à l'augmentation imprévue des prix sont soit inadaptées, l'achat d'électricité dans un cadre similaire à celui d'Exeltium n'étant possible que pour les entreprises électro-intensives, soit inefficaces, la solution du groupement d'achat n'ayant par exemple donné aucun résultat satisfaisant pour les établissements d'Accor. Enfin, il a estimé que le caractère théoriquement vertueux de l'augmentation du prix de l'électricité sur le comportement des consommateurs ne peut réellement l'être que si cette augmentation est lissée et régulée, et non erratique et brutale, et qu'en tout état de cause, elle ne doit pas constituer un simple transfert de richesses des consommateurs vers les producteurs.