a tout d'abord rappelé les contraintes spécifiques du marché de l'électricité, s'agissant d'un bien non stockable, nécessitant des capacités de production construites à l'avance, devant être acheminé à tout instant par des réseaux de transport et de distribution et qui est consommé de façon très irrégulière dans le temps. Puis il a relevé que, depuis trente ans, la France est approvisionnée en électricité de façon stable et sûre du fait de ses surcapacités de production, en particulier nucléaires, qu'il a estimées à 10 gigawatt (GW), et de la robustesse des réseaux français, dont il a souligné que la forte connexion avec ceux des pays voisins permettait à notre pays d'importer et d'exporter de l'électricité.
a ensuite évoqué les inquiétudes que pouvaient susciter les « crises de libéralisation » survenues dans d'autres pays à la veille de l'ouverture totale des marchés de l'électricité et du gaz en Europe. Il est ainsi revenu sur la crise californienne du début des années 2000, expliquant qu'elle avait pour origine la divergence entre les prix du marché de détail, sur lequel le régulateur californien (la Commission californienne des équipements collectifs publics - CPUC) avait autorité, et ceux du marché de gros, relevant du régulateur fédéral (la Commission fédérale de régulation de l'énergie - FERC). Le manque de coopération persistant entre ces deux régulateurs a fait durer ce hiatus des prix jusqu'à entraîner la faillite des fournisseurs californiens. Il a déclaré qu'il s'agissait donc d'une « crise d'autorité » incombant principalement à l'échelon fédéral. Puis il a rappelé la retentissante faillite du courtier d'énergie texan Enron en 2001, indiquant que cette société avait pu créer un « marché virtuel », totalement déconnecté de la réalité physique, à cause la sous-réglementation qui prévalait aux Etats-Unis à l'époque. Il a souligné que l'autorité politique avait tiré les conséquences de ces échecs, le président des Etats-Unis, M. George W. Bush, ayant obtenu en 2002 le remplacement du président de la FERC par celui du régulateur texan ; l'ordre était revenu sur les marchés américains depuis lors.
Puis M. Jean-Michel Glachant a noté que d'autres « crises » avaient eu lieu plus récemment aux Etats-Unis et en Europe, précisant toutefois qu'elles n'avaient pas touché le marché à proprement parler, mais le réseau, rangeant dans cette catégorie :
- la panne ayant affecté le Nord-Est des Etats-Unis et une partie du Canada le 14 août 2003, seuls les gestionnaires de réseau de transport d'électricité (GRT) de Pennsylvanie et du Maryland ayant alors su gérer la situation ;
- la panne du réseau londonien, le 28 août 2003, provoquée par le manque de maintenance du réseau de distribution local ;
- la panne survenue en Italie le 28 septembre 2003, à la suite du non respect de « règles élémentaires d'interconnexion » par le GRT suisse ;
- la défaillance du réseau de l'Europe continentale le 4 novembre 2006, due à une erreur du GRT allemand E.ON Netz.
Ayant observé que la concomitance de telles crises avec le processus de libéralisation des marchés électriques le rend, aux yeux de beaucoup de citoyens, ledit processus responsable de ces pannes, il a insisté sur la nécessité que les GRT accomplissent leur tâche avec le plus grand soin, d'autant plus que leur mission se complexifie avec l'augmentation de la consommation, les changements d'usage de l'électricité et les évolutions des lieux de résidence des Européens.
a enfin mentionné la troisième « crise » affectant, après celles des marchés et des réseaux, le secteur électrique : la crise des prix. Il a considéré qu'elle déstabilisait d'autant plus les Français que ceux-ci, en raison notamment de la dominante nucléaire du bouquet électrique national, sont habitués à une relative constance de ce point de vue. Il a lié la forte hausse moyenne du prix de l'électricité de ces dernières années à l'évolution du prix du gaz, dont il a remarqué qu'il était lui-même longtemps resté stable.
Dans un tel contexte, il a alors examiné la possibilité, pour la France, de se déconnecter du système européen. Il a tout d'abord jugé qu'une telle éventualité serait très peu profitable, alors même que les surcapacités de production de notre pays peuvent permettre d'alimenter environ 10 millions de consommateurs. Puis il a observé que la France doit parfois importer de l'électricité de ses voisins afin d'équilibrer son réseau, rappelant notamment, à ce sujet, les difficultés rencontrées lors de l'épisode de canicule de l'été 2003. Il a enfin estimé que le développement à long terme d'entreprises comme EDF, Areva ou Alstom ne pouvait s'envisager sans qu'elles s'appuient sur un vaste marché européen ouvert.
a conclu son propos liminaire en soulignant que des solutions pragmatiques existaient afin de garantir la sécurité d'approvisionnement électrique dans le cadre de marchés libéralisés, celles-ci passant par une régulation des marchés et des réseaux adéquate et cohérente entre pays de l'Union européenne, et une harmonisation des conceptions et des mécanismes techniques au niveau communautaire, les contrôles et les sanctions en cas de manquements devant, en outre, être sévères. Il a enfin suggéré que se réalise une coopération industrielle de l'énergie, associant les Etats membres les plus en pointe sur les questions énergétiques.
Un vaste débat s'est ensuite instauré.