a souhaité savoir si la sécurité d'approvisionnement électrique de la France pouvait vraiment être assurée par un marché européen libéralisé ou s'il n'était pas préférable d'adopter une logique nationale. En réponse, M. Jean-Michel Glachant a déclaré qu'en faisant abstraction de toute considération de coût, une France isolée au sein de l'Europe au plan électrique pourrait globalement assurer son approvisionnement, en rencontrant cependant parfois des difficultés, particulièrement en été. Mais il a estimé que les dégâts industriels et commerciaux d'un tel schéma seraient considérables, une entreprise comme EDF ayant par exemple 13 millions de clients à l'étranger. En outre, après avoir fait valoir qu'en pratique, un tel raisonnement est contraire au « cadre de base » de l'Acte unique de 1986, il a observé que la plupart des pays européens ne considèrent pas l'électricité comme un bien différent des autres et ne partagent pas le sens de la notion de service public qui prévaut en France.
Enfin, M. Bruno Sido, président, ayant souligné que l'approvisionnement électrique soulevait la question de l'indépendance de l'Europe et des pays la composant, a demandé comment le marché pourrait prendre en compte l'effort français dans le domaine nucléaire. En réponse, M. Jean-Michel Glachant a considéré, d'une façon générale, qu'il n'existe pas de contradiction entre la logique de marché et la sécurité d'approvisionnement : la plupart de nos compatriotes ayant les moyens de payer leur électricité, le marché doit pourvoir à leurs besoins, comme dans le cas des autres services publics essentiels ayant une forme commerciale. Rappelant qu'une régulation adéquate constitue une condition nécessaire du fonctionnement sain d'un tel marché, il s'est appuyé sur la qualité du travail effectué par une entreprise privée comme la Compagnie nationale du Rhône pour récuser l'idée qu'un tel encadrement aille jusqu'à confier l'ensemble des missions à un établissement public ad hoc. Ayant souligné que de multiples modalités de fonctionnement de l'activité de production électrique existent dans le monde, de Los Angeles, où cette responsabilité relève d'un département de la municipalité, à la Belgique, où un grand opérateur privé coexiste avec de petites entreprises locales, en passant par la France et son producteur public historique, il a estimé que la sécurité réside avant tout dans la définition de règles et dans le contrôle de leur respect, et non dans le statut du ou des acteurs du marché. Estimant ainsi qu'intrinsèquement, les réseaux de distribution pourraient être régionalisés, il a en revanche convenu que le nucléaire devait avoir une « dimension nationale », à la fois en termes de sécurité et pour assurer un bon retour sur investissement, tout en soulignant que le « national » pouvait avoir un statut aussi bien public que privé, comme l'illustre une entreprise telle que Dassault, à la fois « privée et patriote ». L'intervenant a toutefois conclu qu'en raison des multiples risques liés à l'activité nucléaire et à son intensité capitalistique, il est possible de la confier au secteur public.