a tout d'abord indiqué que les dispositions du projet de loi sur l'égalité des chances ne lui donnent pas entièrement satisfaction. En effet, le texte propose la mise en oeuvre d'une obligation de moyens, alors que l'Etat devrait se fixer une obligation de résultat afin de corriger les ruptures d'égalité existantes, grâce à des politiques publiques plus ciblées.
a indiqué avoir adressé une note à M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, en amont du projet de loi, qui résume ses principales propositions. Six d'entre elles n'ont pas été prises en compte :
- le programme national de rénovation urbaine (PNRU) va à l'échec. Les moyens financiers dont il est doté sont entre 30 % et 50 % inférieurs aux dotations de la rénovation urbaine dans d'autres pays européens. C'est ainsi que l'Anru, l'agence nationale de rénovation urbaine, ne dispose pas des moyens nécessaires pour répondre aux besoins de l'ensemble des quartiers éligibles à ces interventions.
Par ailleurs, la mise en oeuvre du PNRU n'est pas parfaitement efficace, dans la mesure où la dimension intercommunale est souvent absente. Elle est pourtant indispensable pour supprimer les ghettos. L'objectif de la diversité devrait être un des objectifs centraux du PNRU. En outre, certaines communes, qui ont reçu des ressources considérables, ne disposent pas des moyens administratifs et humains nécessaires pour en assurer la mise en oeuvre dans de bonnes conditions.
Le PNRU ne devrait pas non plus ignorer les problèmes que posent l'école et l'activité économique, qu'il n'est pas possible de traiter dans le seul cadre communal. Les problèmes d'intégration se posent en effet à l'échelle d'immenses conurbations. Il faut avoir la possibilité de gérer de façon intégrée, à l'échelle adéquate, des problématiques telles que le logement, l'emploi, la localisation des activités économiques, la pauvreté.
Enfin, il est regrettable que l'Anru réfléchisse actuellement à l'accélération de ses procédures sans coordination avec la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT). Il faudrait en réalité fusionner les deux organismes ;
- l'école est le second sujet non abordé par le projet de loi. Le Gouvernement a sans doute souhaité éviter la confrontation avec les syndicats. Dans les endroits où le zonage ne favorise pas la diversité en raison des stratégies d'évitement déployées par les familles, il faudrait supprimer celui-ci afin de permettre des échanges entre le centre ville et la périphérie. Le maire, auquel il appartient de déterminer le ressort territorial de chaque école, doit gérer le zonage en fonction de l'objectif de diversité.
En revanche, les projets que le ministre de l'éducation nationale élabore en faveur des zones d'éducation prioritaire (Zep) devraient favoriser la recherche de l'excellence pédagogique dans les quartiers. Ceux-ci connaissent actuellement un fort développement des « langages de médiation » qui appauvrissent considérablement le contenu de la langue française. De fait, l'enseignement du français est en difficulté dans les quartiers. Il faudrait notamment traiter les cas de dyslexie, très fréquents, et exiger un niveau minimal de maîtrise de la langue lors de l'entrée au collège.
Il serait aussi nécessaire de modifier certains cursus. La création de formations secondaires mettant en valeur certains savoir-faire non académiques des enfants serait utile. A cet égard, il conviendrait, par exemple, de noter le dynamisme ou l'effort en s'inspirant de l'expérience développée avec succès en Grande-Bretagne.
Pour favoriser la diversité, il faudrait aussi spécialiser certains lycées dans l'accueil des enfants des Zep et leur faire nouer des partenariats privilégiés avec des établissements prestigieux de l'enseignement supérieur ;
- le troisième sujet insuffisamment traité dans le projet de loi est la formation. Il faudrait développer les formations en alternance et augmenter le nombre de bourses. La France aura besoin, dans les prochaines décennies, d'une main-d'oeuvre qualifiée que les jeunes des quartiers devraient fournir. Actuellement, une naissance sur cinq est assurée par des parents appartenant à des minorités d'ascendance étrangère. Cette population représentera près d'un tiers de la relève de main-d'oeuvre dans les prochaines décennies. Or, ces jeunes sont actuellement exclus du marché de l'emploi. Par ailleurs, le niveau général du système éducatif est en train de baisser, ce qui va entraîner une érosion de qualité de la main-d'oeuvre, avec des conséquences à terme sur la localisation des activités et sur la compétitivité des entreprises françaises. La France manque d'ores et déjà d'ingénieurs, et cette situation ne saurait qu'empirer, dans la mesure où les descendants d'immigrés les mieux formés se dirigeront vraisemblablement vers les Etats-Unis ou le Canada, dont la politique d'accueil est très efficace. La France a donc intérêt à améliorer sensiblement sa politique de formation ;
- le sujet des discriminations est aussi traité de façon insuffisamment efficace. Le Président de la République a reconnu récemment que les discriminations ont des conséquences sociales spécifiques : cumul transgénérationnel des inégalités dans l'accès à l'école, au logement et à l'emploi, qui touche des populations noires ou d'origine arabe ; relégation territoriale et construction d'une France à deux vitesses ; taux de chômage, deux à quatre fois plus important pour les groupes marqués ethniquement que pour la moyenne nationale. Cette situation devrait faire l'objet de politiques spécifiques, très actives et volontaristes ;
- en ce qui concerne l'emploi, les entreprises vont de plus en plus être confrontées à la diversité des candidats à l'embauche. M. Yazid Sabeg a indiqué qu'il est, à cet égard, à l'origine de la charte de la diversité des entreprises, qui vise à lutter contre les discriminations et à compenser un certain nombre de handicaps devant l'emploi, dont souffrent de nombreux candidats issus de l'immigration. L'application de cette charte doit être généralisée ;
- en ce qui concerne enfin les créations d'entreprise, il serait intéressant de mettre en place l'équivalent du « Small business act » américain et de favoriser la pérennisation des entreprises créées.
a conclu en faisant part de sa conviction que la France ne pourra pas éviter un débat sur son identité. Il faut en particulier trancher la question de la visibilité et du décompte des minorités. La France doit se regarder en face : il est nécessaire de mettre en place un recensement affichant les caractéristiques ethniques de la population dans tout un ensemble de lieux, l'école et l'entreprise en particulier. Il serait indispensable de disposer ainsi d'un « référentiel » dans lequel les gens aient la possibilité de se reconnaître de façon transparente et anonyme.