Intervention de Philippe Douste-Blazy

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 21 décembre 2005 : 2ème réunion
Audition de M. Philippe Douste-blazy ministre des affaires étrangères

Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères :

a apporté les éléments de réponse suivants :

- les Balkans s'inscrivent, à l'évidence, dans une perspective européenne et leur stabilité est indispensable à celle de l'Union. Aucun parallèle n'a jamais été établi entre un accord sur les perspectives financières et l'octroi à la Macédoine du statut de pays candidat. Toutefois, on ne peut nier que les stipulations du traité de Nice permettent difficilement de faire fonctionner une Europe à vingt-cinq et bientôt vingt-sept. Dès lors, il n'est pas envisageable de programmer de nouvelles séries d'élargissement tant que la réflexion sur la question institutionnelle n'a pas été menée, comme prévu. Il s'agirait là d'un geste négatif en direction de l'opinion publique. Cette position, qui a été formulée dans les conclusions du dernier conseil européen, a d'ailleurs recueilli l'approbation des partenaires de la France. Toute impression de « fuite en avant » doit être combattue, et les travaux qui seront menés sous présidence autrichienne sur les questions institutionnelles et sur les futures frontières de l'Union seront déterminants. La France s'honore de ne pas participer à un processus de fuite en avant sur l'élargissement et les pays qui soutiennent une telle démarche n'ont pas la même conception de la nature de l'Europe ;

- le processus de réflexion sur l'établissement d'un lycée français à Belgrade, qui devrait compter environ 700 élèves, est en cours. Les discussions se poursuivent sur les questions matérielles liées notamment à l'acquisition du terrain, et le dossier a été évoqué lors de la récente visite en France du président de la Serbie ;

- en Côte d'Ivoire, le premier ministre poursuit les consultations en vue d'achever la constitution de son gouvernement. Cette personnalité expérimentée et déterminée bénéficie du soutien de la communauté internationale dont les efforts conjugués devraient permettre d'aboutir à une issue positive. Le Conseil de sécurité des Nations unies vient par ailleurs de renouveler la possibilité de recourir à des sanctions individuelles contre ceux qui feraient obstacle au processus en cours ;

- la communauté internationale a trois attentes principales à l'égard de l'Iran : que ce pays fasse un geste sur la question nucléaire en se conformant aux demandes réitérées par l'Agence internationale de l'Energie Atomique ; qu'il respecte les droits de l'homme, notamment par la libération des prisonniers politiques, et qu'il contribue à la stabilisation au Moyen-Orient. Les propos du président iranien ont été unanimement condamnés. La France travaille à une solution diplomatique sur le dossier nucléaire, mais la « fenêtre » de négociations ne restera pas toujours ouverte. La France a défendu une position de fermeté face à l'Iran, mais devant la violation avérée de ses obligations internationales par ce pays, l'unité de la communauté internationale doit impérativement être préservée. A cet égard, il convient de relever les conséquences du refus par l'Iran de la proposition russe d'enrichir de l'uranium en Russie avant sa rétrocession à l'Iran. L'objectif d'une saisine du Conseil de sécurité viserait à renforcer l'autorité des demandes de l'AIEA et, le cas échéant, à doter l'Agence de capacités d'investigation supplémentaires ;

- la réforme des instituts culturels reste indispensable. Il ne s'agit pas seulement d'une question budgétaire, mais de la capacité à inventer de nouvelles méthodes et de nouvelles formes d'activités culturelles. Il n'est pas question de fermer l'institut culturel de Vienne, où seuls les cours de français « généraliste », activité structurellement déficitaire, devraient être supprimés. A l'avenir, la construction de nouveaux lycées français pourrait bénéficier de l'expertise et du financement de la Caisse des Dépôts et Consignations sous la forme de partenariats public/privé ;

- au sein du budget européen, on ne saurait comparer ou mettre en balance, d'un côté, la politique agricole commune et, de l'autre, la politique de recherche, dans la mesure où il n'existe pas de politique intégrée de la recherche. Les budgets de recherche agrégés des Etats européens sont supérieurs aux crédits de la PAC. D'ici à 2008, la France formulera des propositions sur la structure du futur budget européen concernant de nombreux domaines : PAC, recherche, infrastructures, défense .... L'augmentation de ce budget à hauteur de 1,2 % du PIB communautaire, proposée par certains, aurait conduit à une augmentation de 135 milliards d'euros sur la période couverte par les prochaines perspectives financières. D'ores et déjà, entre 2007 et 2013, les budgets de développement et de recherche bénéficieront d'une augmentation de 33 % , grâce notamment à un emprunt de 10 milliards d'euros auprès de la Banque européenne d'investissement pour financer des programmes ;

- la présidence britannique a écrit à la secrétaire d'Etat américaine afin d'obtenir des explications sur le dossier des prisons secrètes de la CIA. Les Etat-Unis ont répondu qu'ils respectaient la souveraineté des Etats européens et leurs obligations internationales, assurances qui ont été renouvelées par Mme Condoleeza Rice en marge de la réunion ministérielle de l'OTAN. Les démocraties s'honorent de respecter les droits de l'homme dans leur lutte contre le terrorisme, dans laquelle la France est clairement partenaire des Etats-Unis. Il n'y a pas d'indications particulières sur la nature et l'affrètement des deux vols ayant fait escale en France et dont la presse s'est fait l'écho ;

- le discours sur l'immigration, sujet très sensible, doit écarter toute caricature ; il s'agit de prendre en compte le drame vécu par ceux qui rêvent de s'installer en Europe. L'immigration clandestine doit être combattue, mais en privilégiant plus activement le co-développement et le financement de micro projets, qui impliquent la mise en place d'un instrument bancaire euro-africain. Les centres d'études en France (CEF), mis en place dans certains pays, devraient permettre de privilégier une « immigration choisie », en vérifiant les motivations et les compétences des personnes désireuses d'étudier en France.

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