s'est interrogé sur les relations de la France avec l'Afrique du sud dans le domaine de la gestion des crises et, notamment, dans celle de la crise ivoirienne. Evoquant la présence militaire française en Afrique, il a souhaité savoir comment elle était perçue par les opinions publiques locales.
Le général Henri Bentegeat a apporté les éléments de réponse suivants :
- la rivalité entre l'Union européenne et l'OTAN est désormais bien connue et s'exerce aujourd'hui principalement au Soudan, où l'OTAN s'est engagée, alors que l'Union européenne était présente depuis plus d'un an pour remplir des missions identiques, à savoir la formation des troupes, le transport et la planification des opérations. Les deux organisations se sont finalement partagé la tâche dans ces trois domaines ;
- l'Allemagne a accepté de prendre la direction de l'opération européenne en République démocratique du Congo et en sera la « nation cadre ». La mission de cette opération sera la dissuasion et l'intervention, le cas échéant. Les moyens déployés seront cependant très limités, et basés, à titre principal, hors du territoire congolais. Outre l'Allemagne et la France, huit autres pays ont annoncé, à ce stade, leur participation à cette opération ;
- la France n'a pas conclu d'accord de défense avec le Mali, où la tension entre Touaregs et sédentaires est très ancienne. La dissidence temporaire récente d'un lieutenant-colonel touareg exerçant des responsabilités au sein de la garde nationale doit cependant être interprétée comme un problème d'ordre personnel, lié aux perspectives de carrière de l'intéressé. La garde nationale malienne fonctionne dans de bonnes conditions ; elle a intégré la plus grande partie des anciens dissidents et favorise la cohésion entre le sud et le nord du pays ;
- la Somalie est un pays perdu, livré aux seigneurs de la guerre et aux pirates. Ce pays ne fait pas l'objet d'une action concertée de la communauté internationale. La France pour sa part veille en premier lieu, depuis Djibouti, à ce que les problèmes de la Somalie ne s'étendent pas au reste de la région ;
- l'intervention militaire de la France en Afrique fait souvent l'objet d'une perception ambiguë, notamment du fait des liens anciens liant l'armée française à certaines armées africaines. On perçoit encore, au sein des populations africaines et, en particulier, dans la génération des plus de trente ans, le souhait manifeste que la France soit toujours disponible. Ce sentiment est moins perceptible chez les jeunes ;
- un premier bilan des 44 ans de coopération militaire française serait inévitablement contrasté. L'état des armées africaines n'est pas satisfaisant, notamment parce que la plupart des gouvernements ne veulent pas consentir aux efforts financiers nécessaires. Cependant, dans la zone francophone, on peut citer le Sénégal, dont l'armée est de très bonne tenue et, à ce titre, très sollicitée dans les opérations de stabilisation menées sur le continent. Les perspectives de la coopération militaire doivent se concentrer sur la formation de cadres, mais les crédits de la coopération militaire ont été réduits de moitié au cours des dix dernières années, l'accent étant mis, en contrepartie, sur le renforcement de l'appropriation locale, notamment via le programme RECAMP (renforcement des capacités africaines du maintien de la paix) ;
- la dimension stratégique de la présence française en Afrique permet d'abord de protéger les quelque 200 000 ressortissants français, puis d'aider les Africains à gérer des crises, tant qu'elles n'atteignent pas un degré d'intensité trop important. Le « retour sur investissement » de cette présence est difficile à mesurer, mais faible. Notre présence contribue certainement à éviter des drames considérables et donc, à terme, à protéger nos propres intérêts ;
- les relations entre la France et l'Afrique du sud sont excellentes sur le plan diplomatique et très soutenues sur le plan militaire. Les relations militaires sont confiantes et étroites et se traduisent par de nombreux exercices communs. Les quelques malentendus qui ont pu intervenir ont surtout été instillés par ceux-là mêmes qui tirent parti des crises que les deux pays s'attachent à résoudre.