Intervention de Patrick Dugois

Mission commune d'information sur les politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion — Réunion du 5 février 2008 : 1ère réunion
Audition de M. Patrick duGois délégué général d'emmaüs france

Patrick Dugois, délégué général d'Emmaüs France :

En réponse à ces différentes questions, M. Patrick Dugois a apporté les éléments de réponse suivants :

- si la part respective des SDF évoluant en milieu rural et dans les villes n'est pas connue avec certitude, il est néanmoins acquis que l'environnement urbain est un facteur aggravant d'exclusion et qu'il n'a pas été aménagé pour tenir compte de leurs besoins, les espaces privés y étant inexistants. Sans doute également présente dans les campagnes, la misère y est toutefois moins visible que dans les villes ;

- les causes générales de l'exclusion sont multiples. Si des « accidents de la vie » tels que la perte d'emploi, le divorce ou le décès d'un proche sont des facteurs déclenchants ou aggravants, ils ne font que cristalliser des prédispositions qui seraient demeurées latentes dans une société de plein emploi. Un sondage effectué par Emmaüs a montré que 49 % des Français craignaient de devenir un jour SDF, ce qui explique pour partie la réticence de beaucoup d'entre eux à créer des entreprises. L'affaiblissement des liens de solidarité et la fragilisation des filets de sécurité rendent indispensable une véritable politique de prévention des exclusions, sur laquelle Emmaüs seul n'a pas de prise et qui requiert dès lors un véritable engagement collectif. Cette politique doit être perçue, non comme une charge, mais comme un investissement permettant d'éviter à l'avenir des coûts encore plus importants ;

- le principe de l'accueil inconditionnel doit être entendu et appliqué de façon radicale, indépendamment de la politique d'immigration décidée et mise en place par le Gouvernement ;

- seuls 30 % seulement des bénéficiaires du RMI sont inscrits à l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE). Dès lors, et afin qu'ils ne perdent pas le bénéfice de l'accompagnement professionnel auquel ils pourraient prétendre, il serait opportun de les y inscrire automatiquement. Si certains bénéficiaires du RMI abusent de leur situation en ne cherchant pas à se réinsérer par une activité professionnelle, cela reste toutefois une exception, toute généralisation en ce sens étant fausse et inacceptable. Ainsi, 30 % des SDF parisiens travaillent. La situation de grande détresse dans laquelle se trouvent de nombreux Rmistes ne leur permet pas, de surcroît, de se projeter dans l'avenir et de rentrer dans la situation contractuelle équilibrée que requiert l'accès à un emploi. Afin de sensibiliser les professionnels et l'opinion publique au quotidien des exclus et aux problèmes d'insertion qu'il engendre, une grande campagne d'information nationale serait nécessaire ;

- si un effort a incontestablement été réalisé en matière de logement social, une carence d'un million de logements reste encore à combler. Le problème du logement doit être traité de façon séquentielle, en améliorant pour commencer l'hébergement d'urgence et en fournissant les places de stabilisation qu'il nécessite. Est actuellement menée une politique de volume, au moyen d'outils fiscaux finançant la création de logements vides car proposés à la location à des prix non accessibles à de nombreux foyers. La mobilisation de l'habitat privé est aujourd'hui impérative, près de deux millions de baux étant renouvelés chaque année. Il faut également rénover les 1.800.000 logements insalubres, dont 600.000 sont dans un état de délabrement avancé. En chiffrant à 1,7 milliard d'euros les besoins de financement du logement social, et en proposant de les affecter à la résorption du logement indigne, à l'hébergement d'urgence et à la rénovation des centres d'hébergement, les associations ont fait leur travail d'interpellation des pouvoirs publics, qui doivent à présent prendre des mesures opérationnelles ;

- la demande de reconnaissance du statut des communautés tend à la sécurisation du régime fiscal et social de leurs membres et à la confirmation de leur non-assujettissement au droit du travail.

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