Evoquant d'abord la situation dans les territoires palestiniens, M. Philippe Douste-Blazy a rappelé la récente victoire électorale du Hamas, qui allait le conduire à occuper une place centrale au sein de l'Autorité palestinienne. Il a précisé que le Président Mahmoud Abbas avait chargé, lors de la séance inaugurale du nouveau Conseil législatif palestinien, le 18 février dernier, un représentant du Hamas, M. Ismaïl Haniyeh, de former le gouvernement. M. Haniyeh dispose de trois à cinq semaines pour parvenir à constituer un gouvernement que le Hamas souhaite d'union nationale. Le ministre a estimé que ce contexte plaçait le Président Abbas au centre du jeu politique palestinien, car il était le garant de la pérennité des institutions, et le partenaire principal de la communauté internationale. Alors qu'il constituera sans doute le principal contre-pouvoir au futur gouvernement dominé par le Hamas, le Président Abbas demeure fidèle à une solution négociée du conflit israélo-palestinien, seule capable d'aboutir à deux Etats vivant côte à côte dans la paix et la sécurité. Il a d'ailleurs rappelé les principes politiques qui devront encadrer l'action du futur gouvernement : maintien de la négociation avec Israël, respect des accords passés avec ce pays, ainsi que le dépôt des armes, sous le contrôle exclusif des forces de sécurité internationales. M. Philippe Douste-Blazy a estimé que le Hamas avait montré certains signes d'évolution possible mais refusait encore à ce stade d'entrer dans une logique de dialogue et de responsabilité, marquée par la reconnaissance d'Israël et la reprise du processus de paix.
Le ministre a ensuite fait état de la situation prévalant aujourd'hui en Israël, caractérisée par la campagne électorale pour les législatives du 28 mars prochain. Cette campagne est dominée par l'avenir du processus de paix et les relations qu'il sera possible d'entretenir avec une autorité palestinienne dominée par le Hamas. Les autorités israéliennes semblent avoir fait, pour l'heure, le choix d'une ligne dure, refusant de poursuivre le versement des taxes perçues au nom de l'Autorité palestinienne, durcissant les conditions de circulation dans les territoires, accroissant les obstacles à l'entrée et à la sortie des territoires palestiniens aux membres du Conseil législatif. Le ministre a relevé que les sondages plaçaient le parti Kadima, fondé par Ariel Sharon, largement en tête des intentions de vote, loin devant le Parti travailliste et le Likoud. M. Ehoud Olmert, Premier ministre par interim, pourrait donc se voir confirmé à son poste.
Le ministre a constaté que la communauté internationale souhaitait afficher une position ferme et cohérente face à cette nouvelle donne régionale, et procéder à une évaluation générale des politiques dans la perspective d'une relance, à terme, du processus de paix. Trois principes fondamentaux que devra suivre tout gouvernement palestinien ont recueilli l'unanimité : renonciation à la violence de façon explicite et publique, reconnaissance de l'Etat d'Israël et des accords précédemment conclus entre Israël et les Palestiniens, notamment les accords d'Oslo de 1993. L'Union européenne et les Etats-Unis s'accordent également sur le refus de tout contact avec les dirigeants du Hamas, mouvement qui reste inscrit, à ce jour, parmi les organisations terroristes. Cette position ne pourra être réexaminée qu'à la lumière des engagements pris par le Hamas vis-à-vis des trois principes évoqués.
Puis M. Philippe Douste-Blazy a évoqué la question cruciale du maintien de l'assistance internationale à l'Autorité palestinienne. Cette assistance, d'un montant annuel de 1,3 milliard de dollars, est indispensable au fonctionnement de l'Autorité et constitue sa principale ressource. L'Union européenne a donc décidé de maintenir son assistance, dans l'attente de la composition du prochain gouvernement palestinien et de ses orientations politiques.
Le ministre a déclaré que le respect, par le Hamas, des trois principes déjà cités constituait un préalable indispensable, dont le non-respect conduirait au réexamen de l'assistance européenne. Il convenait cependant de prévenir le développement d'une situation chaotique dans les territoires palestiniens, car un effondrement de l'Autorité palestinienne et de l'économie de ces territoires offrirait un terrain propice à tous les extrémismes et à une reprise de la violence à grande échelle. Il a cependant estimé que le peuple palestinien ne devait pas se sentir puni pour avoir voté en faveur du Hamas, et a donc appelé à une action sur le futur gouvernement palestinien, et le Hamas derrière lui, de nature à lui faire adopter des positions acceptables par tous.
Le ministre a ensuite évoqué le dossier nucléaire iranien. Il a estimé que la communauté internationale devait manifester conviction et fermeté face à ce dossier, et a rappelé que, depuis le mois d'août 2005, le gouvernement iranien persistait dans une position de fermeture, dans ses actes comme dans ses décisions. Cette position s'est notamment traduite par la reprise des opérations de conversion de l'uranium, la reprise de l'enrichissement et l'introduction de matière nucléaire dans les centrifugeuses, la coopération insuffisante avec l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique), le refus de discuter réellement des propositions russes, enfin, les propos inqualifiables du Président iranien sur Israël et l'Holocauste. Les cinq membres permanents du Conseil de sécurité ont fait montre d'unité dans ce dossier. Comme l'a montré la résolution de l'AIEA du 4 février dernier et le rapport transmis au Conseil de sécurité, M. Philippe Douste-Blazy a rappelé que la visite à Moscou du Premier ministre français avait été l'occasion d'une convergence d'analyse avec les Russes, et que la France se félicitait du rôle positif joué par Moscou dans ce dossier. Le ministre a souligné que son homologue britannique, M. Jack Straw, avait adopté une attitude analogue. La politique iranienne du fait accompli devrait conduire le directeur général de l'AIEA, M. El-Baradeï, à faire rapport à cette instance qui sera transmis au Conseil de sécurité de l'ONU. Il incombera ensuite à cet organe de prendre les décisions adéquates.
Le ministre a alors évoqué la crise suscitée par la publication, dans un journal danois, de caricatures de Mahomet. La reprise de ces dessins dans plusieurs organes de presse, notamment français, a suscité des interrogations dans l'opinion publique et a provoqué des réactions sérieuses à l'étranger vis-à-vis de notre pays. Ainsi, en Iran, notre ambassade a fait l'objet d'une manifestation hostile et peu spontanée. En Syrie également, la mission diplomatique française a été attaquée et, au Liban, des incidents graves ont conduit au saccage du Consulat du Danemark. L'onde de choc suscitée par cette publication continue à se propager, avec des manifestations violentes, au Nigéria, au Pakistan et en Libye. Le ministre a souligné que les ambassades et consulats français restaient mobilisés pour assurer la sécurité de nos compatriotes et que ceux-ci avaient été invités à faire preuve de vigilance et de prudence. Les autorités françaises s'étaient montrées fermes et actives dès le début de cette crise : ainsi, lors de la première publication des caricatures dans un quotidien français, le ministère a fait connaître sa position de manière précise et publique, en condamnant les violences exercées contre les missions diplomatiques européennes, mais en rappelant également son attachement au principe de liberté de la presse, à l'esprit de tolérance et au respect des croyances et des religions. Le 2 février, les ambassadeurs des pays arabes ont été reçus au ministère des affaires étrangères. Enfin, le Président de la République a condamné, le 8 février dernier, « toutes les provocations manifestes susceptibles d'attiser dangereusement les passions ».
s'est félicité de voir la tension s'apaiser, notamment en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, et a rappelé l'initiative du Haut représentant européen pour la Politique étrangère et de sécurité commune (PESC), M. Javier Solana, de se rendre dans les pays les plus marqués par les troubles. Un projet de résolution est à l'étude à l'Assemblée générale de l'ONU concernant l'islamophobie et la diffamation des religions. La France, pour sa part, s'en tient à la déclaration tripartite signée le 7 février dernier entre les secrétaires généraux de la Conférence islamique et des Nations unies, et le Haut Représentant, M. Solana.
a, par ailleurs, évoqué la situation en Haïti, après l'élection, le 7 février, au premier tour, de M. René Préval à la présidence. La suite du processus électoral, et notamment le deuxième tour des élections législatives prévu le 19 mars, devrait se dérouler dans des conditions transparentes. La France encourage, dans ce contexte, le Président Préval à promouvoir un climat de dialogue qui associerait l'ensemble des forces politiques dans un esprit de réconciliation nationale. Le ministre a précisé que la France entendait poursuivre sa collaboration avec Haïti, notamment dans les domaines du développement et de la sécurité, et soutenait l'action de la MINUSTAH (mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti) dont le mandat vient d'être renouvelé pour six mois. Il convient cependant d'engager une réflexion sur ce mandat pour évaluer les effectifs comme les missions de la MINUSTAH, en tenant compte des priorités des autorités récemment élues.
Le ministre a ensuite abordé l'actualité européenne avec l'analyse de la directive « services » votée par le Parlement européen le 16 février dernier. Il a souligné que les modifications introduites par le Parlement européen donnaient satisfaction à la France sur la plupart des points importants. Ainsi, le principe du pays d'origine a été écarté au profit du respect du droit social du pays d'accueil, comprenant les conventions collectives. Les inspecteurs du travail conserveront, sur notre territoire, tous les moyens actuellement à leur disposition pour contrôler l'application du droit du travail national.
Le ministre a ainsi estimé que le Parlement européen avait permis d'approfondir le marché européen tout en respectant les diversités nationales et les niveaux de protection propres à chaque pays. Le Parlement a également réduit le champ d'application de la directive, qui ne s'applique plus aux services publics non marchands, aux transports, à la santé, aux services sociaux, aux services juridiques ainsi qu'à l'audiovisuel au sens large. Les services d'intérêt économique général, comme les réseaux d'eau, d'électricité ou de gaz, bénéficieront de protections, tout comme les services locaux. Le ministre a estimé que les services publics étaient ainsi protégés d'une mise en concurrence.
Il a observé que ce texte avait été voté massivement par les parlementaires européens, de droite comme de gauche, par le PPE comme par le PSE. L'ampleur de ce vote devra être prise en compte lors des discussions du Conseil européen de mars prochain et par la Commission, dans la proposition révisée qu'elle devra soumettre au Conseil avant l'été. Le ministre s'est félicité de ce vote, qui démontre que le Parlement européen est à l'écoute de l'opinion publique des Etats membres sur cette question difficile. Il a également souligné les bénéfices que l'emploi en France pourrait tirer d'une ouverture des services au sein de l'Union.
a conclu en évoquant le récent déplacement du Président de la République en Inde, qui a notamment permis de faire avancer le dossier nucléaire civil, en négociation depuis plusieurs années. Il a rappelé que la forte croissance économique de l'Inde, qui n'est pas signataire du Traité de non-prolifération (TNP), se traduisait par de gros besoins énergétiques, aujourd'hui satisfaits par des énergies fossiles, comme le pétrole et le charbon. Pour faire évoluer cette situation potentiellement préjudiciable à l'environnement, l'Inde s'est engagée à se soumettre au contrôle de l'AIEA, et la France à lui fournir les éléments indispensables au développement d'une industrie nucléaire civile.
Un débat a suivi l'exposé du ministre.